Helga Zepp-LaRouche sur China Radio International

La Nouvelle route de la soie est la prochaine étape dans l’évolution de l’humanité

mercredi 10 septembre 2014

Helga Zepp-LaRouche est la présidente internationale de l’Institut Schiller et du parti allemand Büso (Mouvement des droits civiques/Solidarité).

Surnommée en Chine Mme Route de la soie, Helga Zepp-LaRouche y fut invitée pour participer à plusieurs colloques et conférences. Le 4 septembre, elle fut interrogée par le programme radio en langue anglaise In the Know (Ceux qui sont au courant).

Jeudi le 4 septembre 2014

Annonceur : Ici « Les gens qui savent », une émission hebdomadaire couvrant en profondeur l’actualité qui façonne la Chine, le monde, ainsi que votre vie. Voici votre hôte, Zheng Chenguang.

Zheng Chenguang. : Le monde traverse aujourd’hui de profonds changements. Dans aucun autre domaine ces changements ne sont aussi frappants que dans l’ordre financier international, ainsi que dans la sécurité régionale et mondiale.

Les pays des BRICS ont pris l’initiative d’établir leur propre banque de développement, dans la mesure où les réformes en cours au sein du FMI et de la Banque mondiale laissent beaucoup à désirer.

La montée en puissance du tristement célèbre Etat islamique en Irak et au levant [aujourd’hui EI], contre lequel a été déployé un grand nombre de combattants depuis l’Occident, en particulier la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, l’Australie et la Belgique, a amené le président américain Barack Obama à ordonner des frappes aériennes pour faire obstacle à sa progression sur le terrain. La Grande-Bretagne est entre-temps devenue le premier grand pays occidental à élever les niveaux de sécurité sur son propre territoire.

En Ukraine, l’ingérence de l’OTAN, sous l’impulsion des Etats-Unis, a forcé la Russie à réagir promptement et avec force. En date de mercredi dernier [3 septembre], la Russie et l’Ukraine ont conclu un accord à long terme pour un cessez-le-feu dans l’est de l’Ukraine. Mais l’avenir reste encore très incertain.

En mer de Chine orientale, la présence militaire japonaise croissante place en même temps le Japon et la Chine sur la voie d’une éventuelle collision.

Quels sont donc les risques que posent ces situations instables pour la sécurité régionale et globale ? Comment peut-on contenir la crise potentielle pouvant découler de ces événements ?

Bonjour. Vous écoutez « Les gens qui savent », une émission qui décrypte les principaux titres de l’actualité chinoise et internationale. Ici Zheng Chenguang, à Beijing. Nous allons nous entretenir dans cette émission avec Helga Zepp-LaRouche, fondatrice de l’Institut Schiller, un groupe de réflexion international sur les questions politiques et économiques.

Helga, bienvenue à nouveau sur CRI [China Radio International].

Helga Zepp-LaRouche : Bonjour.

Zheng Chenguang : Vous étiez avec nous il y a presque six mois maintenant. Dites-nous ce que vous avez fait au cours de cette période, en particulier avec l’Institut Schiller ?

Helga Zepp-LaRouche : Eh bien, il y a eu, au cours de ces six mois, énormément de développements nouveaux. Il a eu le sommet entre le président Xi Jinping et le président Poutine à Shanghai en mai, un sommet extrêmement important d’un point de vue stratégique, suivi en juillet de la réunion des BRICS au Brésil, tout aussi importante, puis le sommet entre les BRICS et les chefs d’Etat des pays d’Amérique du Sud. De cette série de réunions a émergé quelque chose de fantastique, qui est l’élaboration d’un nouvel ordre financier et d’un nouveau système économique. C’est extrêmement important, car cela a engendré un immense espoir parmi de nombreux peuples, qui pourront enfin initier le type de développement répondant à leur véritable intérêt. Prenez par exemple l’Egypte : le nouveau gouvernement de Al-Sissi est en train de mettre en œuvre un nouveau canal de Suez élargi et de construire des complexes agro-industriels, de nouvelles villes et une centrale nucléaire sur la côte pour la production d’énergie et l’irrigation.

D’autres pays ont entrepris de lancer de nouveaux projets, comme le Nicaragua qui va construire un « nouveau canal de Panama », avec l’aide de la Chine. Beaucoup de pays se sont mis d’accord pour coopérer avec la Chine, la Russie et l’Inde afin de développer l’énergie nucléaire. C’est comme si une gigantesque révolution était en cours, où les pays qui s’étaient laissés intimider par le FMI et la Banque mondiale pour les empêcher de faire ces choses et satisfaire à toutes sortes de « conditionnalités », disent en gros : « Non, nous n’avons plus peur, nous allons enfin faire ce qui est dans notre propre intérêt. »

Pour ce que l’Institut Schiller a fait au cours de cette période, en premier lieu, nous sommes extrêmement heureux, car si on regarde nos anciennes publications des années 1970 et 1980, il s’agit là de projets que nous avions défendus, et maintenant ils deviennent réalité ! Nous sommes donc tellement enthousiastes à propos de la Nouvelle route de la soie, à propos des BRICS, que nous avons entrepris de tenter de convaincre les Etats-Unis, l’Allemagne, la France, l’Italie, de se joindre aux BRICS et de soutenir ce processus, de ne pas y être hostile. Heureusement, on peut espérer que ce soit possible car l’industrie allemande, par exemple, aimerait bien se joindre à ce processus.

Zheng Chenguang : Vous avez évoqué la création de quelques nouvelles institutions financières globales comme un développement majeur au cours des six derniers mois, je présume que vous parlez de l’AIIB en Asie (la Banque asiatique de développement dans l’infrastructure) et de la Nouvelle banque de développement des BRICS à l’échelle mondiale. Mais comment évalueriez-vous la capacité de ces banques, en particulier du point de vue financier, à réellement décoller ? Le FMI et la Banque mondiale existent depuis plusieurs décennies. Comment verriez-vous les futures relations entre les institutions financières chapeautées par les BRICS et celles qui existent déjà ?

Helga Zepp-LaRouche : D’abord, nombreux sont ceux qui, en Europe et aux Etats-Unis, soulignent que les banques soi-disant « trop grosses pour faire faillite » sont en pire état aujourd’hui qu’en 2008, juste avant la crise de Lehman Brothers. Elles ont 40 % de dettes en plus, leur encours en produits dérivés atteint les 2 mille milliards de dollars, une somme incroyable qui ne pourra jamais être payée. Ces banques sont donc dans une situation terrible, et lorsque les détracteurs de l’AIIB et de la Nouvelle banque de développement affirment qu’elles sont trop petites, ou qu’il faudra trop de temps pour les mettre en place, ou demandant « qui paiera pour tout cela ? », tout ceci est un mauvais raisonnement, car ce sont les gouvernements souverains qui créent du crédit pour la production. Et ce qui est si intéressant à propos de l’AIIB et de la Nouvelle banque de développement est qu’elles sont entièrement consacrées au financement de ces projets, et non pas à la spéculation, et s’avéreront dans l’avenir comme constituant un système financier supérieur. C’est pourquoi nous tentons de convaincre les Etats-Unis de revenir à leur propre tradition économique du Système américain, celle instaurée par le premier secrétaire au Trésor Alexander Hamilton, qui a créé la première Banque nationale, dotée du pouvoir de fournir du crédit destiné à la production.

Zheng Chenguang : Vous avez également mentionné l’Europe. Etes-vous en train de dire que les Européens devraient créer une autre banque pour aider à financer d’autres projets ? Nous croyons comprendre que le FMI est contrôlé par les Européens.

Helga Zepp-LaRouche :En fait, je dis que le système financier actuel, associé à la mondialisation, est fini. Il est totalement en faillite ! Nous avons affaire à une véritable escroquerie. Ce dont vous pouvez vous rendre compte par vous-même dans le cas de la lutte entre l’Argentine et les fonds vautours. En 2001, NML [Capital] avait acheté des obligations argentines à prix cassés, pour un total de 48 millions de dollars, si je me souviens bien. Six ans après, ils voulaient en tirer 850 millions de dollars du gouvernement argentin, ce qui aurait fait un profit de 1608 %, un taux usurier ! Ils n’ont pas travaillé pour obtenir cet argent, ils ont seulement investi dans la spéculation, et aujourd’hui ils cherchent à pousser l’Argentine à la faillite. Cette dernière, heureusement, inspirée par le développement des BRICS et par le sommet qui s’est tenu en Argentine même, ainsi que par la visite du président Xi Jinping, revendique son droit souverain à payer sa dette selon les termes qui lui ont permis de survivre. Ce qui est une très bonne chose.

Cependant, il est intéressant de constater que ces fonds vautours ont acheté des obligations similaires au Portugal, en Espagne, en Italie. Ils cherchent à infliger aux pays européens le même traitement qu’ils espèrent faire subir à l’Argentine. Je crois par conséquent que cela conduira à un affrontement et à des changements radicaux, car il est impossible pour ces pays de survivre s’ils se soumettent à la volonté de ces vautours !

Zheng Chenguang : Parlons maintenant de la sécurité globale et des questions politiques. Nous assistons aujourd’hui à différents événements dans le monde arabe, qui sont très préoccupants. Il y a en particulier ces groupes militaires et le terrorisme qui se propagent ; la montée de l’EI, qui n’est pas formé seulement de terroristes arabes mais aussi de détenteurs de passeports australiens, britanniques et américains ! Plusieurs entités tiennent les Etats-Unis pour responsables des problèmes existant à l’heure actuelle dans le monde arabe, en raison de la guerre d’Irak et de leurs interventions en Syrie et en Libye, en l’occurrence. Qu’en pensez-vous ?

Helga Zepp-LaRouche : Il est vrai que le mal est condamné à en engendrer toujours plus. Il s’agit de la guerre initiée par Tony Blair et George Bush contre Saddam Hussein, s’appuyant sur des mensonges. Il n’y avait aucune arme de destruction massive, il n’y avait aucune ville au monde pouvant être frappée en 45 minutes, tout cela reposait sur des mensonges concoctés à l’époque par le MI6, sous la direction de Tony Blair : il s’agissait avant tout d’une tentative de changement de régime contre tout pays refusant de se soumettre à l’idée de mondialisation.

Cette guerre a causé des souffrances incroyables, et pas seulement en Irak, car si vous regardez toute cette longue série de guerres, si vous regardez la situation actuelle en Afghanistan, en Libye, en Syrie, dans la bande de Gaza, ainsi que la manière dont le terrorisme s’est propagé dans la plus grande partie de l’Afrique, au centre comme au nord, vous verrez que toute cette politique, même du point de vue de l’intérêt immédiat des Etats-Unis, est un échec complet.

Nous avons donc, pour résumer, deux problèmes : l’EI a des armes américaines, et savez-vous d’où elles proviennent ? Une bonne hypothèse serait que ces armes leur ont été fournies dans le cadre de transferts effectués par la CIA entre la Libye et l’opposition syrienne. Elles se sont ensuite retrouvées entre les mains d’éléments encore plus radicaux, plus radicaux même qu’Al-Qaïda, et c’est aujourd’hui un gros problème.

Tout ceci démontre que l’affrontement actuel, qui est encouragé par l’OTAN, les Etats-Unis et l’Europe contre la Russie, est extrêmement stupide. Il devrait au contraire y avoir une coopération internationale entre la Russie, la Chine, l’Inde, l’Iran, les Etats-Unis et l’Europe ; tous doivent travailler ensemble pour résoudre un problème de cette ampleur. Xi Jinping a parlé d’un ordre de sécurité qui se doit d’être inclusif, affirmant qu’il est impossible d’avoir la paix dans certains pays et le chaos dans d’autres ; je crois qu’il a absolument raison. Il faut une architecture de sécurité inclusive.

Zheng Chenguang : Jusqu’à présent, pour tous ces gouvernements occidentaux, la seule solution pour résoudre le problème de l’EI est de se contenter de les bombarder, mais cela ne résoudra pas le problème à sa racine. Ainsi, vous parliez d’une plus grande coopération et coordination entre différents pays pour y arriver. Pouvez-vous nous donner quelques exemples d’efforts concrets pouvant être faits...

Helga Zepp-LaRouche : Déjà en novembre 2012, l’Institut Schiller avait organisé une conférence à Francfort, en Allemagne, où fut présenté un plan de paix et de développement complet pour l’ensemble de la région s’étendant du Caucase à l’Afghanistan en Asie centrale, jusqu’au golfe [Persique], ainsi qu’à la Méditerranée. Toute la région doit être vue comme une seule entité. La Route de la soie doit s’étendre à tous ces pays. Si la Russie, la Chine, l’Inde, l’Iran et espérons-le, les Etats-Unis et les pays européens, coopèrent entre eux et déclarent la guerre au désert… Si vous regardez une carte, vous verrez en effet que la côte atlantique de l’Afrique, la région du Sahel, la péninsule arabique, l’Iran et certaines régions de Chine forment une grande bande désertique, pratiquement inhabitable, sans aucune ville ni agriculture.

Nous avions donc élaboré un plan de développement, consistant essentiellement à élargir la Route de la soie, à la prolonger, pour en faire ce que nous avions alors appelé le « Pont terrestre eurasiatique », afin de développer le désert en faisant appel à trois méthodes : utiliser l’eau des aquifères, ou encore détourner certaines rivières en construisant des barrages et enfin, chose la plus importante, utiliser l’énergie nucléaire, à des fins pacifiques, pour alimenter de grandes usines de dessalement de l’eau de mer afin d’irriguer les déserts. De cette manière, on peut développer l’agriculture, l’industrie, mais il faut également construire l’infrastructure dans toute la région, en faire un réseau aussi dense que celui que l’on trouve par exemple en Allemagne. L’Allemagne est un très bon exemple d’une infrastructure soigneusement coordonnée, où les rivières et les fleuves, les canaux, les chemins de fer à grande vitesse et les routes sont intégrés, ce qui est une très bonne chose pour l’industrie et les villes.

Ainsi, en adoptant une approche de ce type, on offre une perspective de prospérité économique pour les jeunes de cette région, car la plupart d’entre eux ne rejoindraient pas les groupes terroristes s’ils avaient un espoir de prospérité pour l’avenir. La solution n’est donc que la paix par le développement. Je pourrais simplement dire que les politiques mises en œuvre actuellement en Egypte s’orientent déjà très rapidement dans cette direction. L’Egypte et l’Iran forment deux pôles d’espoir naturels pour cette région.

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Zheng Chenguang : Ce Pont eurasiatique a été, comme vous l’avez dit, proposé il y a déjà un certain temps. L’année dernière, nous avons vu le président chinois Xi Jinping proposer lui aussi cette Ceinture économique de la nouvelle route de la soie, reliant la Chine à travers toute l’Eurasie jusqu’en Europe de l’est et peut-être même de l’ouest, avec Rotterdam pour destination finale. Que pensez-vous de cette proposition ? Pensez-vous qu’elle a certains points communs avec le Pont terrestre eurasiatique ?

Helga Zepp-LaRouche : Absolument. Je pense que la Nouvelle route de la soie est le fondement d’un ordre pacifique pour le XXIe siècle. Comme vous le savez, nous avons proposé le Pont terrestre eurasiatique lorsque l’Union soviétique s’est effondrée, car le rideau de fer avait cessé d’exister. A l’époque, il s’agissait d’intégrer les centres de population et industriels européens à ceux de l’Asie, par des corridors de développement. Nous avons donc été très heureux lorsque Xi Jinping a annoncé la Nouvelle route de la soie l’an dernier, car c’est ce pour quoi nous luttons depuis vingt-cinq ans. Durant cette période, nous avons consacré des centaines de conférences et de séminaires à ce projet, que nous avions entre-temps élargi pour en faire le Pont terrestre mondial. Je sais que la Chine s’est montrée intéressée à la construction d’un tunnel sous le détroit de Bering, ainsi que d’autres projets comme le second canal de Panama au Nicaragua, qui font partie, en réalité, d’un Pont terrestre mondial.

Il ne faut donc pas voir la Nouvelle route de la soie comme une simple connexion traversant l’Asie centrale, mais comme une évolution de l’humanité, amenant l’infrastructure dans toutes les zones enclavées de la planète afin d’accroître la productivité des populations qui les habitent. Cela doit vraiment être fait si nous souhaitons élever l’humanité à un nouveau niveau d’existence. C’est pourquoi nous pensons que la Chine poursuit actuellement la meilleure politique dans le monde.

Zheng Chenguang : Nous parlions tout juste de l’Eurasie centrale, et l’on voit dans cette région un grand potentiel de déstabilisation avec l’Ukraine, où les conflits ont causé d’immenses pertes et souffrances pour le peuple ukrainien. La crise semble bien loin d’être arrivée à son terme et l’Union européenne menace Moscou de sanctions supplémentaires.

Jusqu’où pensez-vous que cette crise peut aller ? Est-elle une réflexion du schisme politique actuel, ou de l’affrontement entre la Russie et l’Occident ? Pensez-vous que l’Occident devrait prendre en compte les intérêts de la Russie, étant donné qu’ils sont tous inter-reliés : la Russie est le principal fournisseur d’énergie permettant de produire la chaleur dont auront besoin les Européens pour passer l’hiver.

Helga Zepp-LaRouche : Ces sanctions auront un effet extrêmement néfaste, non seulement pour la Russie mais pour l’Europe également ! Elles font du tort à l’industrie allemande, et c’est pourquoi il y a une rébellion non seulement au sein de l’industrie allemande mais également de l’industrie française, ainsi qu’italienne. L’Association des affaires européennes vient de publier un avertissement cinglant à ce sujet.

Je reporte toutefois l’entière responsabilité de cette crise sur l’OTAN et l’Union européenne. Même le Conseil des relations étrangères de New York, aux Etats-Unis (plusieurs articles ont d’ailleurs été publiés là-dessus) partage cette opinion, estimant que la crise a été causée par le non respect des promesses faites à Gorbatchev et à Eltsine à l’époque, selon lesquelles l’OTAN ne s’étendrait jamais jusqu’à la frontière russe. C’était la promesse faite en 1991 à la Russie, et elle a été violée. En 1991, il n’y avait aucune raison de créer une architecture de sécurité excluant la Russie. Il aurait été très facile de l’intégrer à une alliance de sécurité, mais du fait que les néo-conservateurs aux Etats-Unis et Margaret Thatcher avaient décidé de créer un empire mondial – la mondialisation n’est qu’une autre façon de désigner cet « empire mondial » – ils décidèrent d’élargir pas à pas l’OTAN toujours plus vers la Russie, d’élargir l’Union européenne pour l’encercler et d’organiser des révolutions de couleur.

Il y a eu récemment une conférence sur la sécurité à Moscou, où des militaires russes ont montré très clairement que les révolutions de couleur sont une forme de guerre, même si elle n’est pas déclarée. Lorsque vous cherchez à acheter, avec de l’argent, des militants dans un pays et les utilisez pour renverser son gouvernement, c’est une forme de guerre. Ainsi, le renversement du gouvernement ukrainien en 2004, la fameuse « révolution orange », était déjà une guerre, et l’ultimatum lancé à l’Ukraine en novembre dernier, pour la forcer à signer l’Accord d’association avec l’Union européenne, visait en réalité à rendre la Russie vulnérable : si vous expulsez la flotte de la mer Noire hors de Crimée, la Russie n’est plus en mesure de se défendre.

Cette politique est donc très dangereuse. Idem avec que ce qu’ils vont chercher à accomplir cette semaine dans le cadre du Sommet de l’OTAN au pays de Galles, en transformant l’OTAN en machine de guerre contre la Russie.

Zheng Chenguang : Venons-en maintenant aux relations entre la Chine et les Etats-Unis. L’année dernière, lorsque les présidents chinois et américain se sont rencontrés à Sunnylands [en Californie], ils se sont accordés pour établir un nouveau modèle de relations entre grandes puissances, et surtout des relations qui puissent être vues comme stables. Mais il y a eu quelques éternuements : par exemple, les Etats-Unis ont lancé un mandat d’arrestation contre des responsables militaires chinois, accusés d’être à l’origine de cyberattaques contre les Etats-Unis. Même le cas Snowden est encore, vous le savez, très largement discuté ici en Chine et ailleurs. Un autre incident concerne l’intensification des opérations de surveillance de la part des Etats-Unis le long des frontières chinoises, qui ont provoqué une forte opposition du côté chinois. Plus important encore, concernant les relations sino-japonaises : il semble, aux yeux de nombreux Chinois, que les Etats-Unis se font complices d’une tentative japonaise de s’emparer de la Chine ! Pensez-vous que les Etats-Unis devraient agir d’une manière plus responsable, afin de stabiliser la région, plutôt que de la déstabiliser ou d’y semer le trouble ?

Helga Zepp-LaRouche : Bien sûr ! Je pense que le modèle avancé par la Chine pour un nouveau type de relation entre les grandes puissances est un merveilleux modèle, par lequel chaque pays s’engage à respecter la souveraineté de l’autre, à respecter les différents systèmes sociaux, et à ne pas s’ingérer dans les affaires internes de l’autre. Je pense que les Etats-Unis suivent une politique dictée par Wall Street, qui n’est pas dans leur propre intérêt. Wall Street a toujours été, historiquement, dépendante de l’Empire britannique. Si vous regardez l’histoire, Wall Street finançait la Confédération contre Lincoln. Wall Street n’est en aucun cas une institution américaine, mais fait partie de la faction impérialiste de la mondialisation. Je sais qu’il y a aujourd’hui un fort élan au Congrès américain pour rétablir la loi Glass-Steagall adoptée par Franklin Roosevelt en 1933, en réaction à la crise financière mondiale des années trente. Beaucoup de députés et sénateurs tentent à l’heure actuelle de prendre cette direction. Le mouvement politique associé à Lyndon LaRouche cherche à mobiliser tout le pays derrière cette initiative avant que n’éclate le prochain krach. Car si la crise financière devait éclater – ce qui ne saurait tarder – elle serait encore pire que celle de 2008, et nous sommes dans une course contre la montre.

Je pense qu’il y aura une grande bataille aux Etats-Unis mêmes, très bientôt. Les Etats-Unis vont-ils redevenir une République, respectant leur Constitution, ou s’associer aux Britanniques pour bâtir un empire ? Cette bataille décidera de l’existence ou non d’une paix mondiale.

Zheng Chenguang : Helga, un grand merci pour vous être jointe à nous et être venue en personne discuter avec nous.

Helga Zepp-LaRouche : Merci à vous.