Helga Zepp-LaRouche sur Radio Chine international

jeudi 1er octobre 2015, par Helga Zepp-LaRouche

Le 25 septembre 2015, la radio publique chinoise Radio Chine international (RCI) donnait la parole à la présidente et fondatrice de l’Institut Schiller, lors d’une table ronde d’une heure sur les relations sino-américaines, présentée par Liu Kun et Brian Kopczynski. Mme Helga Zepp-LaRouche était rejointe par d’autres experts : le Pr Tao Wenzhao de l’Académie chinoise des sciences sociales, le Pr Rick Dunham de l’université Tsinghua et le Pr Mark Beeson de l’université d’Australie occidentale.

A la première question : « Qu’est-ce qui fait que deux géants politiques, la Chine et les Etats-Unis, s’aiment, et qu’est-ce qui fait qu’ils se repoussent ? », Mme LaRouche répondit :

Il est extrêmement important que les deux plus grands pays du monde par la taille et le pouvoir aient une relation stable ; la meilleure partie des Etats-Unis regarde la Chine de ce point de vue. En ce qui concerne le président Xi, il a montré très clairement qu’il veut s’ouvrir avec la politique du gagnant/gagnant. Cependant, je pense vraiment qu’il existe aujourd’hui une disparité complète dans l’approche que peuvent avoir les deux pays par rapport aux problèmes mondiaux. »

L’animateur de la chaîne chinoise constata alors amèrement que seul le quotidien USA Today avait fait sa une sur la visite d’Etat du président Xi aux Etats-Unis.

La question suivante était : « Où la Chine se place-t-elle dans la stratégie globale des Etats-Unis et vice versa ? », à quoi Mme Zepp-LaRouche répondit :

Je pense que la clef se trouve dans les différentes propositions émanant de la Chine, fortement marquées par une conception confucéenne selon laquelle un monde ne peut réellement fonctionner que s’il est basé sur une relation harmonique entre nations. C’est aussi ce qui inspire l’offre du président Xi d’une coopération gagnant/gagnant. L’année dernière, lors du sommet de l’APEC sur la Route de la soie, il a invité le président Obama à coopérer avec la Chine dans sa politique "Une route, une ceinture", selon un nouveau modèle de coopération entre grandes nations. C’est un concept complètement différent des relations internationales, fondé sur la souveraineté, le respect mutuel et la reconnaissance de systèmes sociaux différents. Je pense qu’on a là un modèle très attractif, adopté par les pays des BRICS, et qui s’étend également aux pays de l’ASEAN et aux pays d’Amérique du Sud qui bénéficient de ce type de coopération gagnant/gagnant avec la Chine.

Du point de vue chinois, le plus grand problème, et en même temps le plus grand espoir, serait que les Etats-Unis répondent à cela. L’offre qui leur a été faite est toujours sur la table et plusieurs médias chinois l’ont renouvelée : les Européens, les Etats-Unis et la Chine devraient coopérer.

Je ne peux qu’espérer que les Etats-Unis, actuellement en proie à de graves problèmes – leur système financier est dans un état lamentable et bien des gens considèrent que la situation est pire qu’en 2008, avec un krach financier qui peut arriver à tout moment – pour les Etats-Unis, donc, la seule porte de sortie serait de saisir leur chance dans cette offre. Le sujet divise. Certains la voient comme totalement dans l’intérêt des Etats-Unis et souhaitent cette coopération, d’autres la rejettent, estimant qu’ils sont les seuls dirigeants du monde, la seule superpuissance, que la Russie n’est qu’une puissance régionale et que la Chine devra être endiguée…

Même le chef de l’état-major, le général Martin Dempsey, a averti que les Etats-Unis ne devraient pas tomber dans le "piège de Thucydide" en considérant la Chine comme une puissance menaçante à qui on doit faire la guerre. Et s’il lance cet avertissement, c’est qu’il doit avoir de bonnes raisons.

Économie

Le débat s’est ensuite porté sur l’économie chinoise. « Ce qui m’inquiète, affirma le Pr Dunham, c’est que les Etats-Unis aient refusé de faire partie de la Banque asiatique pour l’investissement dans les infrastructures (BAII) et promeuvent à la place la création d’une zone de libre-échange transpacifique (TPP). » Le Pr Tao a relevé que beaucoup d’Américains, dont Henry Kissinger entre autres, ont salué l’initiative de la BAII et reprochent à Obama de ne pas s’y joindre.

Lorsqu’on lui demanda si « les liens économiques et commerciaux peuvent toujours jouer un rôle stabilisateur, alors que les relations sino-américaines sont devenues houleuses », Mme LaRouche a acquiescé :

Lorsqu’il existe de solides relations économiques, il y a toujours moyen de surmonter les tensions. De tous les accords, je retiens comme majeur celui prévoyant de construire une ligne de train rapide entre Los Angeles et Las Vegas. Ce n’est certes pas mon trajet préféré, car il conduit au casino, mais le fait que la Chine fournisse des technologies ferroviaires de pointe est important. En Chine, 18 000 km de TGV d’excellente qualité ont fait leurs preuves. Tout le monde se rend à l’évidence que l’infrastructure américaine, routes comme chemins de fers, a besoin d’être entièrement rénovée. J’ai proposé que les Etats-Unis acceptent l’offre chinoise du gagnant/gagnant. Une coopération peut s’instaurer en vue de rénover l’ensemble du système ferroviaire. Pourquoi ne pas relier la côte Est à la côte Ouest par des trains rapides ? Ce serait plus intéressant que l’avion. Si les Etats-Unis s’associeraient à l’initiative de la Nouvelle Route de la soie, la reconstruction serait possible.

Les invités ont alors évoqué le recul de l’économie chinoise, citant un chiffre de Moody’s Analytics qui quantifie l’effet de contagion pour le reste du monde. Ainsi, pour un recul de 1% du PIB chinois, l’économie américaine perd 0,2 % de croissance.

Il existe une grosse différence entre les économies chinoise et américaine, a objecté Mme Zepp-LaRouche, car cette dernière est essentiellement tirée par les valeurs monétaristes de Wall Street, alors que la chinoise obéit à une logique dictée par l’économie réelle. La Chine a connu une croissance industrielle sans précédent et s’est engagée dans des projets industriels aux quatre coins de la planète.

Ainsi, une petite secousse sur la bourse chinoise n’a pas du tout le même effet qu’en Occident. Wall Street est totalement en faillite. Je ne me risquerais donc pas à comparer les deux économies selon ces critères. L’économie réelle américaine est dans un état pitoyable alors que l’économie chinoise, en s’étendant à travers toute la planète, a gagné en substance et en solidité.

Pour conclure le débat, la question fut posée de ce que l’on pouvait attendre de la visite d’Etat de Xi Jinping aux Etats-Unis. Mme LaRouche rappela l’appel qu’elle avait adressé aux divers chefs d’Etat et dirigeants devant parler à l’Assemblée générale des Nations unies. « Ils ne doivent pas rater cette occasion de faire naître un nouveau paradigme pour le monde. De grands dangers nous guettent : krach financier, terrorisme, crise des réfugiés en Europe, qui est réellement hors de contrôle, etc. On a vraiment besoin d’écrire une nouvelle page pour la civilisation et je suis convaincue que l’offre de la politique "gagnant/gagnant" du Président Xi est le meilleur modèle à notre disposition. »