Plusieurs économistes alertent de l’imminence d’une nouvelle crise financière

mardi 22 août 2017

Au risque de doucher l’enthousiasme des journalistes et des lecteurs du Journal du Dimanche, persuadés d’assister au « retour de la croissance », à la « soudaine mais réelle embellie », indéniablement due à « l’effet Macron », trois économistes américains mettent en garde contre une nouvelle crise financière transatlantique, dans le quotidien allemand Die Welt. En essence, Jacques Cheminade nous avait prévenu à la fin de sa campagne présidentielle. Aujourd’hui, Daniel McFadden, Eric Maskin et Edward Prescott, tous trois lauréats du prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel, estiment que le risque de krach à court terme est très élevé mais que les médias détournent l’attention du problème, en focalisant sur la peur de la confrontation nucléaire, les attaques terroristes et la déstabilisation de la présidence américaine.

« Les esprits les plus brillants en économie sont clairement en désaccord avec la présidente de la Réserve fédérale américaine Janet Yellen », écrit Die Welt, faisant référence aux déclarations de Yellen en juin où elle assurait qu’ « il n’y aura pas de nouveau krach financier de notre vivant ». Edward Prescott pense au contraire qu’ « une nouvelle crise financière va certainement arriver dans un ‘futur non-lointain’ ».

En même temps, Bloomberg a rapporté hier que des analystes de plusieurs banques américaines ont prévenu le 2 août dernier, à travers le Treasury Borrowing Advisory Committee (TBAC, un groupe d’économistes travaillant au sein d’établissements bancaires et conseillant le Trésor américain), qu’un « choc dans l’ingénierie financière » pouvait surgir à tout instant. « L’ingénierie financière » désigne le processus de cavalerie financière par lequel les grandes entreprises ont accumulé de la dette en empruntant auprès des banques ou sur le marché des obligations, et utilisé ce crédit pour acheter leurs propres actions, augmenter les dividendes des actionnaires ou acheter d’autres entreprises, faisant ainsi gonfler une bulle qui est passée de 7000 Md$ en 2010 à 14000 Md$ en 2017.

La présidente du TBAC Jason Cumminns explique que cette bulle a pu se développer grâce à la politique de « quantitative easing » (assouplissement quantitatif, c’est-à-dire une politique de taux d’intérêts très bas, voire négatifs) des banques centrales, et que la perspective d’une inversion de cette politique prévu par la Réserve fédérale (Fed) risque de « conduire à une chute brutale des prix des obligations et des actions ». Et Bloomberg de conclure que « les investisseurs sous-estiment les remous que l’action de la Fed pourrait provoquer dans le marché des obligations d’entreprises ».

La Chine recadre ses investissements à l’étranger afin de favoriser les Nouvelles routes de la soie

Le Conseil d’État chinois a annoncé il y a trois jours la mise en place de mesures de régulation sur les investissements à l’étranger, dans une approche qui ferait hurler les chantres du dogme du laissez-faire, laissez-passer. Bloomberg rapporte que les mesures consistent à « guider » les investissements des entreprises chinoises en distinguant trois catégories : les investissements interdits, restreints et encouragés : « Les interdictions concernent les jeux d’argent, l’industrie du sexe et tout investissement contraire à la sécurité nationale. Les restrictions visent l’immobilier, l’hôtellerie, les secteurs du cinéma, du divertissement et du sport, les équipements obsolètes et les investissements contrevenant aux normes environnementales. Enfin, encouragés sont les investissements s’inscrivant dans le cadre du projet ’Une ceinture, une route’ [les Nouvelles routes de la soie], le progrès technologique, la recherche et le développement, l’exploration des ressources pétrolières et minières, l’agriculture et la pêche ».

Cette décision s’ajoute à une série de mesures dirigistes mises en œuvre par le gouvernement chinois, dans l’objectif de brider les activités spéculatives, d’assécher le « shadow banking » et de concentrer le crédit de plus en plus vers l’économie réelle, et en particulier vers les projets de développement mutuel des Nouvelles routes de la soie. On devrait en prendre de la graine, ici en Occident. Mais, pour nos savants perchés en haut de leur tour d’ivoire, notre économie se porte bien et s’il y a un risque il viendra de Chine, comme l’explique le JDD du 20 août, citant l’économiste Jean-Hervé Lorenzi : « on est très, très inquiets du niveau élevé de la dette chinoise publique et privée. Dans un an, deux ans ou dans cinq ans, la crise chinoise éclatera ». « Un tel scénario », ajoute le JDD, « ferait flamber les taux d’intérêts, stopperait la croissance et aurait des effets ravageurs sur nos finances publiques ». Ah, ces satanés Chinois qui vont mettre par terre tous les bienfaits de notre Macron jupitérien !

Dans le monde réel, notre mobilisation se poursuit pour forcer au Parlement et au Sénat un débat sur la séparation des banques de dépôt et des banques d’affaires, première étape pour la mise en banqueroute organisée de ce système avant qu’il n’entre dans la phase finale de sa mort annoncée. Alors, signez notre pétition, et interpellez votre député !