Du progrès dans la coopération entre la Russie et les États-Unis en Syrie

vendredi 25 août 2017

La situation du monde est aussi complexe que dangereuse. Face au déferlement continu de la ratatouille médiatique, il est essentiel de se concentrer sur les points d’appui dont nous disposons, y compris les progrès qui existent. Car, malgré la nouvelle dégradation dans leurs relations suite aux sanctions votées par le Congrès américain le 28 juillet, et malgré les efforts du ’deep state’ pour empêcher Trump de normaliser les relations avec les Russes et les Chinois, les États-Unis et la Russie poursuivent leur effort conjoint en Syrie, initié lors de la rencontre entre Poutine et Trump début juillet à Hambourg avec l’accord de cessez-le-feu dans le sud-ouest syrien.

Questionné par plusieurs médias chinois et japonais mercredi, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergey Ryabkov a déclaré : « nous avons récemment observé un progrès considérable dans notre dialogue avec les États-Unis sur la Syrie ». Ryabkov a fait ce commentaire dans le contexte d’une discussion sur le climat de guerre froide et sur les « réponses extrêmement mesurées et modérées » de la Russie face aux actions hostiles des États-Unis. Le droit international nous permet de riposter, a-t-il expliqué, mais « nous avons calibré très prudemment nos mesures de représailles politiques et diplomatiques », car « nous sommes conscients que dans certains cas cela peut davantage nous nuire que nous servir ».

« Le concept de ’zone de dé-escalade’, que nous avons développé [en Syrie] sans la participation des États-Unis, mais qui a impliqué d’autres partenaires comme la Syrie et l’Iran, s’avère être très efficient », a déclaré Ryabkov. « En réalité, nous pensons que l’implication des États-Unis dans ce travail constructif est très productif, et nous allons continuer dans ce sens ». Le vice-ministre des Affaires étrangères a aussi exprimé le souhait de la Russie de voir les deux pays coopérer, sur la base de cette lancée, dans d’autres domaines tels que le contrôle des armements et la non-prolifération du nucléaire.

Plutôt optimisme sur l’avenir, Sergeï Ryabkov a affirmé s’attendre à de nouveaux progrès dans les relations avec les États-Unis et l’administration Trump. Interrogé sur la possibilité d’un conflit ouvert entre les deux pays, il a répondu : « je ne pense pas qu’une telle confrontation soit possible dans ce nouvel environnement... [La situation] n’en est pas au point d’évoluer vers une guerre chaude ». (source Tass)

D’un autre côté, la porte-parole du Département d’État américain Heather Nauert a affirmé mercredi à des journalistes que les États-Unis comptent bien continuer leur effort pour améliorer leur relations avec la Russie. « Nous avons dit dès le début de cette administration que le niveau de confiance [entre les deux pays] est au plus bas. Nous ne voulons pas que cela reste ainsi. Nous souhaiterions avoir une meilleure relation avec ce gouvernement, il n’y a aucun doute », a-t-elle répondu à un journaliste qui lui demandait si nous étions dans une nouvelle guerre froide. Nauert a également déclaré : « nous continuons de chercher de nouveaux domaines de coopération mutuelle avec eux, comme nous l’avons fait notamment pour le cessez-le-feu que nous avons établi dans le sud-ouest de la Syrie. (…) Mais nous considérons regrettable ce qui s’est passé avec notre ambassade à Moscou ».

A contrario, le chef du Pentagone James Mattis, qui joue un rôle trouble au sein de l’administration Trump, a profité de sa visite à Kiev pour souffler sur les braises. Lors de sa conférence de presse avec le président ukrainien Porochenko, Mattis a insisté sur le fait que les États-Unis se tiennent résolument aux côtés de l’Ukraine et continue de rejeter « l’annexion » de la Crimée par la Russie. « En dépit des dénégations de la Russie, nous savons qu’ils cherchent à redessiner les frontières internationales par la force », a-t-il lancé, prétendant que cette ambition des Russes vise à affaiblir les nations européennes souveraines et à provoquer des tensions. Mattis et Porochenko ont notamment discuté de la possibilité que les États-Unis fournissent des armes létales au régime de Kiev pour sa guerre dans la région du Dombass.

Rapport de Reuters sur la réalité « bourdonnante » de la coopération russo-américaine en Syrie

Un reporter de l’agence de presse britannique Reuters a pu se rendre en début de semaine sur la base américaine d’Al Oudeid au Qatar, le Combined Air Operations Center (CAOC), rapportant que la coopération russo-américaine autour de la « déconfliction » en Syrie est bien active, tel un « bourdonnement ». « Malgré l’augmentation des tensions entre les États-Unis et la Russie, on est surpris de voir que c’est en Syrie que les contacts entre militaires résistent silencieusement à la tempête », rapporte Reuters. Les officiers russes et américains communiquent régulièrement sur la ligne de séparation en Syrie entre les forces soutenues par les Américains et celles soutenues par les Russes. Il y a 10 à 12 appels chaque jour sur la ligne téléphonique entre le CAOC et les quartiers généraux russes à Lattaquié, ce qui permet d’éviter les collusions entre les avions russes et américains.

« Ce n’est pas une moindre affaire, étant donné les complexités de la guerre civile syrienne », écrit Reuters. Le lieutenant-général Jeffrey Harrigian, commandant en chef des forces aériennes américaines au Moyen-Orient, a expliqué au journaliste : « nous avons dû faire face à des problèmes très compliqués, mais nous avons généralement réussi à maintenir la ligne de déconfliction et à trouver un moyen de poursuivre notre mission. Nous devons négocier, et parfois les appels téléphoniques sont très tendus. Car l’enjeu est pour nous de protéger nos propres forces et nos partenaires dans la coalition, et de détruire l’ennemi. » Le lieutenant-général Stephen Townsend, commandant américain de la campagne anti-Daesh, a ajouté que « les Russes sont tout à fait professionnels, cordiaux et disciplinés ».