Les BRICS, une manœuvre géopolitique ? Tu parles !

mardi 5 septembre 2017

Le 9e sommet des BRICS se poursuit en ce moment même à Xiamen, en Chine, et il sera suivi dans la foulée par le Forum économique orientale de Vladivostok. Ce partenariat, qui représente une contribution de 60 % de la croissance mondiale, incarne le nouveau paradigme du monde devant se substituer aux vieilles pratiques impérialistes, et pour lequel nous nous battons ici. Il est intimement lié avec les Nouvelles routes de la soie, aux côtés de l’Organisation de la Coopération de Shanghai et de l’Union Économique Eurasiatique.

C’est le futur qui frappe à nos portes.

« les BRICS ne sont pas un club pour discuter, mais une force d’intervention permettant que les choses s’accomplissent », a déclaré le président chinois Xi Jinping lors de son discours d’ouverture. « Notre objectif est de bâtir un grand marché d’échanges et d’investissements, de promouvoir une circulation fluide des monnaies et des capitaux, d’améliorer la connectivité des infrastructures et de créer des liens rapprochant les peuples. En poursuivant ces objectifs, nos cinq pays s’engagent dans une coopération effective dans de nombreux domaines comme l’économie, le commerce, la finance, la science, la technologie, la culture et la santé, donnant un sens concret à la volonté de bâtir un nouveau type de relations internationales sous le signe d’une coopération gagnant-gagnant ».

« Les BRICS atteignent une nouvelle étape de leur développement », a affirmé Xi, tandis que la « structure économique traverse de profonds bouleversements, liés à la contraction de la demande globale et aux risques financiers croissants. (…) Nous devons réaliser que nous portons sur nos épaules la responsabilité de la paix et de la stabilité mondiales. La paix et le développement s’épanouissent et se renforcent mutuellement. Les gens à travers le monde veulent la paix et la coopération, non le conflit ou la confrontation ».

Revenant ensuite sur l’initiative « Une ceinture et une route » (Nouvelles routes de la soie) pour laquelle la Chine a tenu en mai dernier un grand forum réunissant 1600 personnes et plus de 130 pays, le président chinois a déclaré : « Laissez moi être parfaitement clair : il ne s’agit pas là d’un instrument destiné à servir des visées géopolitiques, mais d’une plate-forme pour une coopération pratique. Ce n’est pas un plan d’aide au développement à l’étranger, mais une initiative pour un développement interconnecté appelant à davantage de dialogue, de projet conjoints et de bénéfices partagés ».

Le premier mécanisme multilatéral hors du giron des pays occidentaux

De quoi ébranler la condescendance et la suffisance des élites transatlantiques... Dans un article du 3 septembre intitulé « Le mythe des BRICS à l’épreuve du ralentissement de leur croissance », le journal Les Échos parvient difficilement à admettre le fait que ces pays puissent mettre de côté leurs rivalités commerciales, politiques et militaires : « Cela paraît paradoxal, mais les tensions territoriales entre la Chine et l’Inde, qui ont failli dégénérer en conflit le mois dernier, se sont finalement estompées ». Puis, revenant à la glu de la géopolitique où tout est vu comme un agglomérat d’intérêts individuels : « Toutefois, sur fond de contexte économique morose, les cinq pays, qui représentent près de la moitié de la population mondiale, avancent désormais en ordre dispersé ».

Il est remarquable que Steve Bannon et Sebastian Gorka, deux des principaux conseillers de Trump venant d’être limogés, se soient tous deux exprimés contre cette dynamique de coopération, immédiatement après leur départ. On savait déjà que Bannon était, au sein de l’administration, l’un des partisans d’une guerre commerciale avec la Chine. Mais dans son interview du 25 août dans The Economist, il est allé plus loin, lâchant : « Il faut foutre en l’air [l’initiative] Une ceinture et une route. (…) Je voudrais que l’on se projette dans 100 ans pour regarder le monde d’aujourd’hui, et constater que leur mercantilisme, leur système confucéen, a échoué. L’occident libéral judéo-chrétien a gagné » !

De son côté, dans une interview accordée le 31 août dans l’émission radiophonique de Breitbart News (le site web de Steve Bannon), Sébastian Gorka a renchéri : « Si vous cherchez qui a un plan, en-dehors de l’Iran, pour imposer sa domination de partout, c’est la Chine. (…) [Les Chinois] mènent actuellement une guerre économique contre nous. Cela représente notre principale menace à long terme ».

Les deux idéologues, décriés – à juste titre – par les grands médias comme des chantres de la droite extrême américaine, se retrouvent ainsi dans une communauté de pensée avec tous ceux qui présentent les BRICS et les Nouvelles routes de la soie comme une volonté de domination impérialiste chinoise, c’est-à-dire la quasi totalité des médias occidentaux...

Chose étonnante, le Financial Times – habituellement porte-parole des intérêts financiers anglo-américains – a publié le 1er septembre un article intitulé « Les dix mythes sur les BRICS discrédités », par Wang Wen et Guan Zhaoyu du Chongyang Institute for Financial Studies, qui avait co-sponsorisé la publication en langue chinoise du dossier de l’Executive Intelligence Review [EIR, le magazine fondé par Lyndon LaRouche] « La Nouvelle route de la soie devient le Pont terrestre mondial ». Wang et Guan y écrivent que « les BRICS ont réalisé deux premières dans l’histoire humaine. Tout d’abord, il s’agit du premier mécanisme multilatéral créé et dirigé par des pays non-occidentaux et des pays en développement. Avant les BRICS, tous les mécanismes multilatéraux avaient été créés par les grandes puissances occidentales. Ensuite, c’est la première fois qu’une alliance de grandes puissances émerge sur la base d’objectifs de paix et de coopération » et non de domination.