Thin Thread, le programme qu’on aurait dû adopter pour éradiquer le terrorisme

lundi 2 octobre 2017, par Karel Vereycken

Les attentats barbares de Marseille et de Las Vegas nous obligent, dans la lutte contre le terrorisme, à passer à la vitesse supérieure. Que faire de plus ?

Un documentaire La guerre du renseignement, présenté le 12 septembre par la chaine franco-allemande Arte, démasque de façon convaincante les manœuvres du lobby mondial de la sécurité, toujours enthousiaste à nous vendre très cher des moyens de plus en plus intrusifs pour surveiller la population mondiale.

Or, comme le documente l’émission, les fruits de ces investissements tardent à se concrétiser, avec le risque supplémentaire que les données collectées pourront servir un jour à des objectifs bien moins nobles que la lutte contre le terrorisme...

Le documentaire donne notamment la parole à William Binney, ancien directeur technique de la NSA et démissionnaire depuis 2001.

Binney, aujourd’hui un des membres actifs du collectif d’anciens professionnels du renseignement VIPS, rappelle que très tôt, il a vu les employés des agences de renseignement débordés par la masse d’informations et l’explosion de la quantité des données numériques.

Pour leur permettre de rester opérationnel, Binney a mis alors au point le système ThinThread, un logiciel permettant, sur la base non pas des données, mais des métadonnées, de discerner avec précision des interconnections entre les individus et les réseaux prêtes à passer à l’action. Du coup, les agents de l’anti-terrorisme peuvent se concentrer sur l’essentiel et être en mesure d’intervenir à temps. Depuis peu, des experts allemands ont mis au point un procédé similaire.

Bizarrement, peu avant les attentats du 11 septembre, ce programme, peu onéreux, fut écarté au profit d’un programme de surveillance de masse, Trailblazer, qui lui était très coûteux.

Selon Binney, qui tient à rester poli, les dirigeants américains ont choisi d’arroser les lobbies au lieu de protéger les citoyens.

En attendant que les Etats-Unis adoptent ThinThread, Binney a proposé ce système à tous les États de l’Union européenne. Malheureusement, ces derniers, dont la France, sous prétexte de vouloir rester compétitif dans le secteur, se sont systématiquement alignés sur les demandes de l’industrie de la surveillance.

Article publié le 22 novembre 2015 par 01Net.com

ThinThread : le programme fermé par la NSA qui aurait pu éviter les attentats du 11 septembre

Peu coûteux et respectueux des obligations légales, un programme développé par une petite équipe au cœur de l’agence américaine a été fermé au profit d’un autre bien plus coûteux. Il aurait pu prévenir les attentats de New York.

La toute puissante NSA était malade et en train de se noyer. C’est le portrait surprenant que dessine en quelques mots, un ancien directeur technique de l’agence de renseignement américain, devenu lanceur d’alerte.

Une nouvelle façon de traiter les données

Quelques semaines avant les attentats du 11 septembre, un programme baptisé ThinThread a été fermé par la direction de la NSA en faveur d’un autre programme bien plus coûteux, bien plus invasif en termes de vie privée et qui fut finalement abandonné pour cause d’inefficacité quatre ans plus tard, après avoir engouffré quelques milliards de dollars. A en croire, cet ancien officiel de l’agence, qui répond au nom de Will Binney et a participé à la création de ThinThread, ce dernier visait à moderniser la façon dont l’agence récoltait des informations et les traitait ensuite.

Il s’agissait d’un programme, développé par une petite équipe d’ingénieurs, qui filtrait les métadonnées collectées dans le monde entier – des appels téléphoniques à la géolocalisation, en passant par qui parlait à qui et quand. Une fois toutes ces données ingurgitées, des tendances pouvaient être définies, des connexions entre suspects établies et des listes de personnes à surveiller dressées.

Mieux, ThinThread intégrait des filtres pour respecter les restrictions légales et chiffrait et brouillait les communications américaines pour éviter de violer la vie privée des gens et d’écouter des Américains sans mandat, explique son créateur. Il avait été en plus conçu pour fonctionner automatiquement, afin qu’aucun agent ne puisse accéder à des données privées sans y être autorisé.

Mieux encore, selon Will Binney, dont les propos sont rapportés par ZDnet US, ce programme ne coûtait qu’une fraction de TrailBlazer, le programme que la NSA lui a préféré car il lui permettait d’obtenir une plus grosse ligne budgétaire auprès du Congrès des Etats-Unis. ThinThread aurait « coûté 3,2 millions de dollars à construire à partir de rien », précise ainsi l’ancien directeur technique.

L’appât du gain contre des vies

« Il était juste trop peu onéreux », commente Will Binney. « Fondamentalement, ils ont échangé votre sécurité, la mienne et celle de tout le monde contre de l’argent. C’est aussi simple que ça », a-t-il lâché en marge d’une projection d’un documentaire qui raconte l’histoire de ce projet.

Une attaque lourde qui est motivée par une certitude, ThinThread aurait pu éviter les attentats du 11 septembre. Ce programme avait assez de métadonnées pour établir des liens entre les différents pirates de l’air, juge Will Binney. Il aurait pu « absolument prévenir » les attaques contre New-York, affirme-t-il, soutenu par deux anciens membres de son équipe et une ancienne membre du parlement chargée de superviser l’action de la NSA.

Entré en fonction après le 11 septembre, TrailBlazer fut, à ses yeux, le plus grand échec de la NSA. Mais il a également marqué une volonté de récolter toujours plus d’informations. Un amas de données qui semble difficile à gérer, traiter et utiliser.

Au point que la NSA pourrait ne plus suivre le rythme ? Difficile à dire, une chose est sûre les révélations d’Edward Snowden prouvent que la course en avant vers une surveillance de masse tout azimut était encore d’actualité il n’y a pas si longtemps au sein de l’agence de renseignement américaine. Pourquoi changer une équipe qui perd ?

Source : ZDnet US