Sortir de L’UE et de l’euro pour refonder l’Europe

Sortir de L’UE et de l’euro
pour une Europe des patries et des projets

jeudi 9 mars 2017

Ce texte est extrait du programme présenté par Jacques Cheminade à l’élection présidentielle de 2017. Notre gouvernement ne se dotant pas des moyens à la mesure des défis de notre époque, il reste plus que jamais d’actualité.

L’Union européenne (UE) est devenue la caricature destructrice de ce que devrait être une Europe progressant dans l’intérêt mutuel des peuples et des nations qui la composent. C’est pourquoi il faut en sortir.

L’euro est le relais régional de la dictature financière mondiale. Il n’est pas réformable car il est l’expression de la domination impériale des marchés financiers sur les politiques économiques et les souverainetés politiques des Etats. Même le vice-chancelier allemand a dû reconnaître qu’« il n’est pas impossible que l’euro éclate ».

Dans cette fausse Europe, devenue une « dictamolle » de l’oligarchie :

  • le pouvoir de création monétaire a été confisqué par les plus grandes banques avec la complicité active des Etats ;
  • les établissements financiers brassent des milliards qui ne leur ont rien coûté. Le crédit est ainsi réservé à quelques privilégiés et n’est pas émis dans l’intérêt général ;
  • les pauvres s’appauvrissent et deviennent de plus en plus nombreux ;
  • le revenu médian baisse, l’économie productive est en décroissance nette et les classes moyennes sont matraquées ;
  • la bureaucratie bruxelloise est gangrenée par les lobbies. De quelques centaines de lobbyistes à la fin des années 1960, ils sont plus de 30 000 aujourd’hui, qui exercent leur influence directe ou indirecte sur les rédacteurs des textes de la Commission ;
  • les politiques sont déresponsabilisés face à une machine qui les domine et les nations européennes divergent. L’Allemagne sert de relais à une utilisation politique autoritaire et destructrice de la démocratie par les marchés financiers, qui finira par l’atteindre elle-même, et la France est devenue un toutou atlantiste ;
  • la Cour internationale de justice européenne (CJUE) a élaboré progressivement une jurisprudence au service des intérêts monétaristes et financiers dominants.

L'euro est le relais régional de la dictature financière mondiale.

La coupe est pleine. Sortir de l’UE et de l’euro peut paraître dangereux à ceux qu’on a conditionnés à le craindre. Le paradoxe est que ceux qui se sont emparés du quasi monopole du crédit et de l’émission monétaire pour leurs propres intérêts, engendrant ainsi le désastre économique actuel, sont précisément ceux qui se prétendent les défenseurs des épargnants !

Sortir de l’UE et refonder l’Europe sur la souveraineté des peuples

Il est temps de dénoncer ce bluff devenu mortel. En dehors de cette bureaucratie de faux monnayeurs, l’alternative ne peut être un repli national mais consiste à rebâtir une vraie Europe entre nations souveraines, fondée sur de grands projets conçus et mis en place en commun. Non pas de manière isolée, ce qui serait impossible, mais en entente et en coopération avec les pays membres des BRICS, tout en incitant les Etats-Unis à se joindre à ce nouvel ordre mondial que nous devons construire dans l’intérêt commun de l’humanité. La Chine nous répète que sa nouvelle Route de la soie est un projet gagnant/gagnant, il serait suicidaire de ne pas la prendre au mot, entre partenaires égaux.

C’est dans cette perspective que je propose :

  • de sortir de l’UE et de l’euro et de nous recentrer sur l’idée de nation. De recentrer en même temps l’Europe sur l’entente entre nations compatibles de par leur histoire et leur développement, autour de grands projets d’infrastructure, pour eux-mêmes et étendus de l’Atlantique à la mer de Chine, jusqu’aux dimensions d’un pont terrestre mondial. C’est la perspective de l’Europe des patries et des projets inscrite dans le Plan Fouchet de 1962, qui, loin de constituer un recul vers un passé révolu, nous libérerait de la tutelle financière et culturelle d’un système dont l’apparence atlantiste n’est en réalité que le masque criminel de la mondialisation financière.
EN BREF
Sortir de l’UE et de l’Euro
fonder une Europe des patries et des projets inspirée du Plan Fouchet de 1962
Pas de replis national ou européen : une entente avec les BRICS et la nouvelle Route de la soie de la Chine, fondée sur la construction de grands projets.
  • La question fondamentale est de savoir qui domine la monnaie et le crédit, et pour en faire quoi. En nous recentrant sur notre souveraineté nationale, nous devons nous dé-financiariser et retrouver le contrôle de notre émission de crédit, car un Etat national demeurant sous tutelle financière n’est pas souverain. Cela implique d’échapper à l’article 123 sur le Traité de fonctionnement de l’UE, qui n’aurait plus lieu d’être, mais aussi d’abroger nos lois du 4 août 1993 et du 12 mai 1998. Car la première interdit à la Banque de France « d’autoriser des découverts ou d’accorder tout autre type de crédit au Trésor public ou à tout autre organisme ou entreprise publics » et la seconde interdit «  au Gouverneur (de la BdF) et aux membres du conseil de solliciter ou d’accepter des instructions du gouvernement ou de toute autre personne ». Pour mettre en place une vraie Banque nationale (et non une Banque centrale comme c’est le cas actuellement), exerçant le monopole de l’émission de monnaie-crédit, il est nécessaire de se débarrasser de ce corset libéral. Une Banque nationale, source de crédit pour les infrastructures physiques et le développement de nos productions, est en effet le pilier indispensable à la réalisation de notre projet. L’Europe des patries que je conçois, libérée de l’UE et de l’euro, ne doit plus être le cheval de Troie de la mondialisation financière mais une locomotive de la reprise mondiale.
EN BREF
Retrouver le contrôle de notre émission de crédit
Echapper à l’article 123 sur le TFUE, et abroger nos lois du 4 août 1993 et du 12 mai 1998 interdisant les avances de la Banque de France au Trésor public.
Mettre en place une vraie Banque nationale, exerçant le monopole de l'émission de monnaie-crédit et source de crédit pour les infrastructures et productions.
  • Entravée par l’euro, il est clair qu’elle ne peut être cette locomotive. La réalité est qu’on a sacrifié la croissance à un euro de faux monnayeurs, de spéculateurs et de bureaucrates, relais, conscients ou pas, du monde criminel de la City et de Wall Street.
    Il faut en sortir en évaluant si ce retour à notre monnaie nationale doit se faire par surprise, au cours d’une fin de semaine, en fermant les banques et les marchés financiers, ou par négociation, en s’accordant au préalable avec nos partenaires sur la mise en place d’une monnaie commune. De toute façon, cette transition, qui ne pose aucun problème technique majeur, doit être la plus courte possible.

La seconde solution est économiquement préférable. On reviendrait entre pays membres économiquement compatibles à un système de monnaies nationales, disposant chacune de l’ensemble de leurs prérogatives dans chacun des Etats, avec une monnaie commune à l’extérieur qui serait protectrice. La convertibilité des monnaies nationales s’effectuerait en fonction d’une unité de compte européenne.

Cependant, c’est sans doute la première solution qui s’imposera, car je crains que politiquement et dans la situation financière que l’on a laissé se créer, il ne soit déjà trop tard pour la seconde. Il y a dans les tiroirs de nos administrations des plans prévoyant cette sortie rapide de l’euro. Dans ces conditions et malgré le risque, le pire de tout serait de rester dans le système actuel, qui est comme un garrot de l’Inquisition nous étouffant cran par cran.

L’abandon de l’euro se ferait en le remplaçant par un franc nouveau, en échangeant un euro existant contre une unité de notre nouvelle monnaie, à un contre un. Notre dette souveraine serait convertie selon le même taux, c’est-à-dire qu’une dévaluation du nouveau franc ne changerait pas sa valeur réelle. En effet, cette dette libellée en euros a été émise pour plus de 90 % en droit français, et en vertu de la lex monetae, qui reconnaît la souveraineté monétaire des pays, elle devra être remboursée en francs et non en euros. Ainsi, contrairement à ce qu’affirment ceux qui veulent répandre la peur du « saut dans l’inconnu », le montant de notre dette extérieure ne serait pas aggravé par le passage à ce nouveau franc.

Les partisans de l’euro veulent aussi faire croire qu’en cas de dépréciation du nouveau franc, les avoirs des épargnants seraient amputés dans la même proportion. La parité de la conversion ayant été faite à un pour un, le montant des avoirs des épargnants resterait inchangé. Ne seraient touchés que les actifs financiers libellés en monnaie étrangère. De toutes façons, les avoirs bancaires et les actifs financiers des épargnants sont aujourd’hui davantage menacés par la nouvelle loi bancaire, qui prévoit qu’en cas de crise bancaire, les banques défaillantes pourront se refinancer au détriment de leurs actionnaires, puis de leurs créanciers et enfin directement sur les comptes de leurs clients. Certes il est affirmé que les dépôts ne pourront être touchés qu’au delà de 100 000 euros, mais les réserves dont disposent la zone euro et l’UE sont totalement insuffisantes pour faire face à une crise importante et les pays susceptibles de venir au secours de leurs banques ont pratiquement épuisé leurs ressources, même s’ils passaient outre à l’interdiction de l’UE.

La vraie question n’est donc pas le retour au franc en tant que tel, mais la nécessité de mettre en place un nouvel ordre économique international, qui ne soit ni financier ni monétaire ni géopolitique, mais incarne un ordre de développement mutuel, commençant par un réexamen des dettes qui ne sont pas remboursables afin de déterminer la part illégitime qui devra être annulée. Un pays souverain pourra plus facilement exercer son influence pour que soit réunie une conférence européenne et internationale sur la dette, qu’un pays ayant les pieds et poings liés par un ordre incompatible avec sa souveraineté.

  • Il faut donc sortir du système de l’euro et de l’UE qui s’est constitué depuis l’acte unique et le Traité de Maastricht, comme je le dis depuis plus de vingt ans, car c’est la condition pour pouvoir passer à un système de crédit productif public (cf. ma section « Séparation bancaire et crédit public, assainissement et libération ») et retrouver notre souveraineté. C’est la condition de notre libération et de notre place retrouvée dans le monde par rapport à un ordre européen qui s’est reconnu lui-même à plusieurs reprises comme non démocratique.
    Cette sortie ne peut se faire sans projet, de manière purement négative. Aussi, ma première décision sera, en même temps que la France sortira de l’euro et de l’UE, de proposer à nos partenaires européens, et tout particulièrement à l’Allemagne, de fonder en commun un système de crédit public coordonné, par association de nos banques nationales. Non pas en vue de gérer un ordre existant, mais pour financer ensemble de grands projets de développement mutuels à l’échelle de l’Europe, de l’Eurasie et du décollage de l’Afrique, qui doit devenir avec nous mieux que la Chine du XXIe siècle. Cela ne peut se faire dans un entre-soi, avec plus de fédéralisme, sous contrôle des mêmes intérêts, de la même idéologie et des mêmes hommes. C’est pourquoi il faut le faire avec un maximum de pays européens et en coopération avec les pays membres des BRICS, pour tracer une nouvelle Route de la soie intercontinentale et un pont terrestre mondial. On ne le répétera jamais assez : il faut en finir avec l’ère géopolitique, qui vise à prévaloir au détriment de l’autre, pour entrer dans le nouveau paradigme des intérêts communs de l’humanité. Telle est la mission de la France, qui peut redonner un sens juste au mot Europe.
EN BREF
La sortie, par surprise ou par négociation, doit être « la plus courte possible »
L'Euro serait remplacé par un franc nouveau, un contre un. Notre dette souveraine serait convertie selon le même taux.
Objectif ? Financer avec nos partenaires européens de grands projets de développement à l’échelle de l’Europe, l’Eurasie et l’Afrique.
  • Comment en sortir ? se demandera-t-on alors. Pour cela, certains invoquent les règles mêmes du Traité dont ils prétendent sortir, en son article 50. En ce sens, je suis plus souverainiste qu’eux, en tant que patriote et citoyen du monde. Je pense comme Pierre-Mendès France, qui, dès 1957, mettait en garde contre l’orientation anti-démocratique du Traité de Rome. Et je ferai comme le conseillait le général de Gaulle, à qui Alain Peyrefitte faisait remarquer que le traité de Rome n’avait rien prévu pour que l’un de ses membres le quitte : « C’est de la rigolade ! Vous avez déjà vu un grand pays s’engager à rester couillonné, sous prétexte qu’un traité n’a rien prévu pour le cas où il serait couillonné ? Non. Quand on est couillonné, on dit : je suis couillonné. Eh bien voilà, je fous le camp ! » Sauf que cette fois, notre rupture n’est plus seulement dans notre intérêt national, elle est aussi dans l’intérêt de ce que nous pourrons faire pour l’avantage d’autrui dans le monde.

Je ferai comme le conseillait de Gaulle : « Quand on est couillonné, on dit : je suis couillonné. Eh bien voilà, je fous le camp ! »

-*Ultime question : que peut-on garder de ce que nous avons fait ? Eh bien, il y a la coopération entre nos chercheurs, nos universitaires, nos industriels et nos enseignants, qui pourra devenir plus intense, libérée de notre carcan financier et culturel. Il y a aussi la grande réussite de l’Europe, Erasmus +, qui n’a rien à voir avec la bureaucratie de Bruxelles et tout avec cette amitié entre les peuples que nous devons renouer là où la logique destructrice de l’UE l’a fait défaillir, et l’étendre pour notre avenir commun. J’entends me battre pour faire doubler tout de suite le financement d’Erasmus et permettre, à une échelle plus vaste, des mobilités de stage pour les apprentis et les demandeurs d’emploi, des mobilités hors Europe pour les doctorants, des stages d’observation pour les formateurs et les enseignants et l’adhésion du sentiment pour tous.

EN BREF
Que garder ? la coopération entre nos chercheurs, nos universitaires, nos industriels et nos enseignants
Erasmus +, dont je doublerai le financement
  • C’est en partant de grands projets de développement mutuel, d’un rapprochement des jeunes et d’un retour à la connaissance de la langue et de la culture des autres qu’on avancera. En rompant avec la logique de libéralisation financière et de libre-échange sans régulation, imposée dès le départ par la tutelle anglo-américaine et aujourd’hui renforcée avec les moyens conjugués de Wall Street, de la City, de la Silicon Valley et de GAFA. Progressisme, Résistance et souveraineté nationale sont une trinité que l’on ne peut séparer qu’en servant la domination des esprits et en consentant à une culture de la destruction des facultés créatrices, appelée justement par le pape Jean-Paul II une « culture de la mort ». Les sources de la France et de l’Europe doivent être des sources de vie et de création humaine, non une culture hors sol ou enfoncée sous terre par ses racines. Les institutions réellement communes sont dans le futur que nous ferons, non dans le passé auquel nous avons consenti.