Le coup d’Etat de la BCE contre l’Italie, un aveu de faiblesse

mercredi 30 mai 2018

Suite au véto imposé par la BCE contre le vote du peuple italien, notre alliée et amie Liliana Gorini, présidente du parti politique MoviSol, a publié le commentaire suivant sur son site.

Aveu de faiblesse des marchés : le coup d’État de la BCE contre un gouvernement italien de changement

Déclaration de Liliana Gorini, présidente de MoviSol

Liliana Gorini, présidente du parti MoviSol.

Avec une intervention allant à l’encontre des règles les plus élémentaires de la démocratie et du droit international, l’Union européenne a mis son veto contre « le gouvernement du changement » en cours de formation et disposant d’une majorité parlementaire.

L’UE vient d’imposer un énième gouvernement « technique », projet préparé de longue date et sous la direction de Carlo Cottarelli, le « monsieur ciseaux » (25 ans d’expérience au FMI) dont l’unique objectif est la réduction des dépenses publiques. À part le Parti démocratique (PD), qui vient de prendre une claque aux dernières élections législatives, aucun parti ne le soutient.

Voici le dernier exemple en date de cette « suspension de la démocratie » réclamée par l’UE il y a un an lorsqu’elle avait introduit « un budget à l’équilibre » comme seul objectif de tout gouvernement membre de la zone euro et de l’UE.

Déjà, Angela Merkel avait parlé quant à elle d’une « démocratie conforme aux marchés ». Cette soumission volontaire, sans précédent dans l’histoire de la République italienne (il s’agit d’une république parlementaire et non d’une république présidentielle), sous-tend les raisons invoquées par Sergio Mattarella, le Président de la République, pour justifier son refus d’accepter, comme ministre des Finances, le professeur Paolo Savona, un économiste de renom, ancien directeur général du syndicat patronal Cofindustria (équivalent italien du Medef).

Mattarella affirme avoir agi pour ne pas déplaire aux « investisseurs étrangers » qui craignent que l’Italie claque la porte de l’euro. Rappelons ici que dans la version finale du contrat de gouvernement élaborée entre la Lega et le Mouvement 5 étoiles, ainsi que dans une déclaration de la part du professeur Savona dimanche dernier, toute intention de quitter la zone euro avait été bannie. Le seul objectif qui restait écrit était un changement de cap mettant fin à l’austérité, une politique qu’ils considèrent comme une source « de pauvreté, de revenus en baisse et d’inégalités » (Savona).

Les jours précédant ce coup d’État inacceptable contre un gouvernement démocratiquement élu et suscitant une espérance certaine dans la population, Mattarella, à en croire les médias, était en contact ininterrompu avec le patron de la BCE Mario Draghi, le même Draghi qui en 2011, par une simple lettre, avait imposé le gouvernement « technique » de Mario Monti et dicté ses prérogatives sans que ce dernier ait reçu une quelconque légitimité par les urnes.

Le Président français Emmanuel Macron a lui aussi jugé utile de s’en mêler en appelant Guiseppe Conte, le candidat pressenti pour devenir le Président du Conseil, pour lui demander de rayer le sulfureux Paolo Savona de sa liste des candidats au poste de ministre. Et lorsque Mattarella a rejeté cette candidature, Macron l’a également félicité par téléphone pour sa sagesse.

Les médias, qui se comportent avant tout comme les porte-voix de la City de Londres et des lobbies financiers dont les spéculations ont été à l’origine de la crise financière de 2008, se sont permis non seulement d’insulter les deux grands vainqueurs du scrutin, dont les dirigeants se sont dépensés sans compter pour finaliser un programme commun en faveur de l’emploi et contre la pauvreté, mais également d’insulter le peuple italien en qualifiant ces deux partis de « barbares » (Financial Times) et de « pique-assiettes » (Der Spiegel). L’UE n’a guère apprécié la réplique de Matteo Salvini qui a rétorqué qu’il « vaut mieux être des barbares que des esclaves » » et Luigi Di Maio qui s’est indigné en disant : « Comment osez-vous ! ».

Au lendemain du coup de l’UE acté par Mattarella, qui a outrepassé son mandat en écartant un candidat à un poste ministériel pour des raisons politiques, le quotidien allemand Handelsblatt exultait : « Le Président de la République a fait ce qu’il fallait, Forza Mattarella ! ».

Cependant, une question se pose : pourquoi imposer au forceps un gouvernement technique qui ne durera pas trois mois puisque dépourvu d’une majorité au Parlement et qui, d’après Massimo D’Alema, le vieux routier du PD, va faire gonfler encore plus le vote des deux mouvements anti-système, dont le vote passera sans doute de 60 à 80% ? Les marchés sont-ils si désespérés qu’ils ont réellement besoin d’acheter du temps, même un petit trois mois ?

Une raison bien plus sérieuse pour un tel coup d’État serait plutôt que la Deutsche Bank est au bord du précipice. Même son économiste en chef David Fockerts-Landau, eu égard au volume de produits dérivés se trouvant dans les bilans de la banque, estime désormais qu’elle ressemble plus à un hedge fund qu’à une banque !

Pour sa part, l’économiste de gauche Alberto Bagnai, élu au Sénat sur la liste de la Lega, a déclaré lors d’un entretien radio que

l’euro peut sauter, mais pas à cause de nous (L’Italie). La Deutsche Bank prépare le licenciement de 7000 personnes. Toutes ces grandes banques sont exposées au risque des produits dérivés. Imaginons que ce soit la finance allemande qui provoque le krach au lieu de la dette publique italienne. Nous devons être prêt à cette éventualité.

De son coté, Di Battista, le dirigeant du Mouvement 5 étoiles, a souligné :

Ils ont empêché l’existence de ce gouvernement parce qu’ils sont terrifiés à l’idée d’une séparation bancaire et d’une banque nationale d’investissement.

Ainsi, plus que la crainte d’un Italexit, ce qui fait grimper les marchés aux rideaux est le fait que le gouvernement Salvini-Di Maio avait inclu dans son programme deux points fondamentaux défendus depuis des décennies par le mouvement de LaRouche à l’échelle internationale : le retour à une forme moderne de la loi Glass-Steagall et à une politique de crédit souverain au service d’une relance de l’emploi et l’économie réelle.

Le système financier actuel est si vérolé et si près du précipice qu’aucune remise en cause n’est tolérée. Inclure donc de tels points dans un contrat de gouvernement d’un pays, qui de plus fut l’un des fondateurs du projet européen, ne peut donc être qu’une infamie ! Jusqu’ici, pour faire perdurer ce système vérolé, tous les gouvernements, de Monti à Gentiloni, ont imposé une austérité draconienne.

L’UE, la troïka, la BCE, les économistes orthodoxes et les médias à la botte de cette caste, refusent de comprendre que ces dernières années un nouveau paradigme a émergé. Ce paradigme s’est manifesté avec le Brexit, la victoire de Trump aux États-Unis, le non des Italiens au référendum et aujourd’hui avec le vote du 4 mars.

Une autre expression de ce changement d’époque, et pas des moindres, est le fait que les deux tiers de la population mondiale sont désormais associés à l’initiative Une ceinture une route du président chinois Xi Jinping et sa politique gagnant-gagnant de coopération économique, qui vise à en finir avec la géopolitique et l’affrontement croissant qu’elle induit avec la Russie et la Chine et qui conduit à la guerre.

Certes, ils ont réussi à empêcher « le gouvernement du changement », mais ce changement ne va pas disparaître dans les mois à venir. Ils ne pourront pas éradiquer le nouveau paradigme qui frappe à la porte partout dans le monde. Quant aux « investisseurs étrangers » et à leurs inquiétudes sur notre pays, je répète ici ce que j’ai affirmé depuis toujours dans mes entretiens et mes articles : les marchés ne doivent pas être rassurés, ils ne méritent que la prison pour avoir provoqué le suicide de deux retraités qui se sont fait subtiliser toutes leurs épargnes lors de la crise bancaire, et pour avoir imposé le bail-in, c’est-à-dire le vol légal de notre épargne.

Le Président Mattarella a déclaré qu’il a mis son veto contre le nouveau gouvernement pour « protéger notre épargne ». Or, la seule façon de réellement protéger cette epargne n’est pas de se soumettre aux diktats de Bruxelles, mais d’adopter les « quatre principes cardinaux » développés par l’économiste américain Lyndon LaRouche :

  1. La séparation des banques à la Glass-Steagall ;
  2. Une banque nationale sous contrôle public ;
  3. Un système de crédit productif, pari sur l’avenir ;
  4. L’exploration scientifique (espace, nucléaire du futur, etc.) pour mobiliser la créativité humaine et l’économie physique ;

Nous appelons tous les élus à faire adopter ces principes au plus vite au Parlement en attendant les élections anticipées prévues pour l’automne et le gouvernement qui en résultera. Voilà notre réponse à la finance folle qui vient de torpiller notre gouvernement.