Chang’e-4 sur la Lune : « Explorer l’inconnu est le propre de l’homme »

lundi 7 janvier 2019

Douze heures après l’alunissage de la sonde Chang’e-4 sur la face « cachée » de la Lune, le rover Yutu-2 (à la suite du rover Yutu qui se trouve actuellement sur l’autre hémisphère) a quitté le module pour commencer sa mission d’exploration. Celle-ci va se dérouler dans un premier temps jusqu’au 12 janvier, c’est-à-dire le début de la « nuit » lunaire sur cette partie de notre astéroïde. Dans cette période, le rover repliera ses panneaux solaires afin de les garder au chaud en attendant le retour du soleil. Yutu-2 pèse 140kg ; c’est le rover le plus léger de l’histoire, ce qui a été rendu possible grâce à des avancées technologiques. Il a été conçu pour parcourir 10km et opérer pendant trois mois.

Comme le montre le journal officiel du ministère de la Science et de la Technologie, l’alunissage de la sonde sur la face cachée a représenté en soi une prouesse technique, réalisée en grande partie au moyen de l’intelligence artificielle. Le site d’alunissage n’a pas été choisi par les ingénieurs de contrôle de la mission, mais par un système de guidage autonome à bord de Chang’e-4. Bien que le délai de transmission des communications entre la sonde et la terre n’était que de 60 secondes, la précision nécessaire pour l’alunissage requérait des décisions rapides, et il fallait donc que la sonde soit capable de prendre ses propres décisions. Le journal rapporte que cet alunissage autonome « a porté les capacités technologiques de guidage, de pilotage et de contrôle de la Chine à un nouveau palier ».

Alors que Chang’e-4 venait juste de se poser sur la Lune, le chef du programme lunaire chinois Wu Weiren a déclaré : « Explorer l’inconnu est le propre de l’homme. La Lune est un monde mystérieux pour nous. Nous avons la responsabilité de l’explorer et de la comprendre. L’exploration de la Lune nous permettra aussi d’approfondir notre compréhension de la Terre et de nous-mêmes ».

Géopolitique ou coopération ?

L’ « effet Spoutnik » de la mission chinoise sur la face cachée de la Lune s’est immédiatement fait ressentir en Occident, où nous avons sacrifié depuis longtemps, sur l’autel de la dictature financière, l’esprit d’explorateurs et de pionniers qui nous animait autrefois. Suite à l’alunissage jeudi dernier, plusieurs responsables de la NASA ont félicité la Chine pour cet accomplissement, saluant ce nouveau pas réalisé par l’humanité, et y voyant une révolution potentielle dans notre compréhension de l’origine et de l’évolution de la Lune et du système solaire.

Pour le chercheur James Head, spécialiste de la Lune à la Brown University, il s’agit d’ « une étape décisive dans l’exploration scientifique internationale de la Lune, initiant pour la première fois l’exploration de la ‘luna incognita’ », c’est-à-dire de la surface de la face cachée.

L’exploration spatiale est par nature un objectif commun de l’humanité, et les progrès chinois dans ce domaine ravivent la nécessité impérieuse de jeter à la poubelle les vieux schémas géopolitiques « ami-ennemi » hérités de la Guerre froide et de poser les bases d’une coopération internationale. La mission Chang’e-4 implique de fait une telle coopération. De l’autre côté du Rhin, par exemple, sans doute en raison de la participation allemande au projet, les médias ont temporairement mis en veilleuse leur propagande contre la Chine, et donnent une vision plutôt positive de sa mission sur la Lune. En effet, une équipe de scientifiques allemands et chinois a été montée à l’Université Christian Albrechts de Kiel pour réaliser un dosimètre neutron capable de mesurer la teneur en eau, et explicitement conçu en préparation des futures missions humaines sur la face cachée de la Lune.

Les pressions politiques sont énormes. Ce week-end, l’administrateur de la NASA Jim Bridenstine a annoncé que la visite aux États-Unis du général Dmitry Rogozine, le directeur de l’agence spatiale russe Roscosmos, prévue à l’initiative de la NASA, était annulée, en raison de l’opposition des sénateurs américains à toute politique de détente avec la Russie.

Ce parti de la guerre, qui orbite étroitement autour du système impérialiste britannique, fait tout son possible pour saboter toute coopération entre des puissances comme la Russie, la Chine, les États-Unis ou encore l’Inde, dans le domaine spatial ainsi que dans les autres objectifs communs de l’humanité. C’est là que se trouve notre véritable ennemi : le système oligarchique de Wall Street et de la City de Londres, qui s’est efforcé depuis plus de quarante ans de détruire l’image optimiste de l’homme avec laquelle nous avions renoué suite à la Seconde Guerre mondiale, après avoir vaincu le fascisme et la barbarie.

Lire notre article du 2 janvier 2019 : Pourquoi la Chine pose pied sur la face cachée de la Lune