Il faut libérer Trump des griffes de la « doctrine Blair » !

mardi 21 janvier 2020

Chronique stratégique du 21 janvier 2020 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

Le 10 janvier, l’ambassadeur britannique à Téhéran a été pris en flagrant délit d’ingérence, tentant non seulement de soutenir mais d’instiguer une révolte populaire contre le régime iranien. Cet acte, qu’il n’a bien entendu pas décidé de son propre chef, est révélateur du rôle de « l’Empire britannique » pour mettre de l’huile sur le feu et ramener l’administration Trump dans le droit chemin de la « doctrine Blair », qui a justifié les guerres des vingt dernières années en Irak, en Afghanistan et en Libye.

L’assassinat du général iranien Qassem Soleimani le 3 janvier à Badgad a mis le monde au bord d’une escalade incontrôlable. Celle-ci n’a pu être évitée de justesse, lors de la riposte iranienne survenue le 8 janvier, que grâce à d’intenses négociations diplomatiques. Trois jours plus tard, quelques centaines d’étudiants ont organisé des manifestations contre le gouvernement iranien, encouragés activement par l’ambassadeur britannique Robert Macaire (!). L’information de l’implication et de la brève arrestation de l’ambassadeur s’est cependant rapidement noyée dans le flot médiatique et dans la confusion générale.

Le rôle d’instigateur des Britanniques est au pire complètement ignoré, au mieux réduit à une influence marginale dans un monde dans lequel le géant américain s’impose partout par la force des biceps. Pourtant, avec l’élection de Trump, pour la première fois depuis John F. Kennedy et, pendant un bref moment, lors de la présidence de Bill Clinton lorsqu’il proposa en 1998 de réorganiser l’architecture financière internationale (avant de subir une procédure de destitution), un président américain échappe aux réseaux oligarchiques anglo-américains établis. Les Britanniques, qui habituellement s’accommodent si bien d’agir depuis les coulisses, ont été forcés de prendre de plus en plus d’initiatives, risquant d’apparaître en pleine lumière.

C’est ainsi qu’on les retrouve impliqués dans plusieurs opérations de provocation, telles que « l’affaire Skripal », où une tentative d’empoisonnement de l’ancien agent secret russe a été attribuée sans l’ombre d’une preuve à Moscou, les attaques chimiques sous fausse bannière en Syrie, mises en scène par les Casques blancs – une création des services secrets britanniques, ou encore le « Russiagate » contre Trump, initié dès 2015 par les réseaux du MI6 et du GCHQ (l’équivalent de la NSA) autour de Sir Richard Dearlove – Lire :Qui veut la peau du grand méchant Trump ?

De la géopolitique des sanctions au développement mutuel

L’objectif est d’assurer à tout prix que la présidence américaine ne sorte pas du giron du complexe militaro-financier de Wall Street et de la City de Londres, dont les intérêts dépendent de la vieille stratégie de l’Empire du « diviser pour régner ». C’est ainsi que, depuis 2016, Londres multiplie les efforts, alimentant le Russiagate afin de créer un environnement délétère autour de Trump, et induisant ce dernier à abandonner ses promesses électorales sur le retrait des troupes du Moyen-Orient et la normalisation des relations avec la Russie et la Chine. Les Britanniques cherchent désormais à l’entrainer dans une guerre contre l’Iran.

En juillet 2019, le quotidien britannique Daily Mail avait révélé que Sir Kim Darroch, l’ambassadeur britannique à Washington, agissait activement pour influencer le maximum de personnes dans l’entourage direct de Trump avec les options britanniques. Il « inondait le terrain » – comme il le disait lui-même dans les documents fuités. Darroch, qui a du démissionner à la suite de ces révélations, organisait pour cela des réceptions, dîners et galas à l’ambassade britannique, entre 2017 et 2019, auxquels participaient plusieurs hauts responsables du gouvernement américain, tel que John Kelly, l’ancien chef de cabinet de la Maison-Blanche, et surtout le faucon John Bolton, l’ancien conseiller à la sécurité nationale. Rappelons que Bolton est connu pour avoir tout fait pour saboter le processus de paix avec la Corée du Nord et entraîner Trump dans des conflits contre le Venezuela et l’Iran. Alors qu’il a été viré de son poste en septembre 2019, il se dit aujourd’hui prêt à témoigner contre son ancien patron dans le procès pour l’Impeachment au Sénat.

Dans sa note du 22 juin 2019, écrite au surlendemain de l’attaque avortée contre l’Iran, Kim Darroch faisait état de sa déception, tout en assurant le gouvernement britannique qu’il était fort probable qu’il en soit autrement prochainement.

Une seule attaque supplémentaire des Iraniens quelque part dans la région pourrait déclencher un nouveau retournement de Trump. La perte d’une seule vie américaine pourrait probablement faire la différence.

Soulignons que Sir Kim, officier diplomate de carrière décoré en 2008 Commandant de l’Ordre de St Michael et de St George, a servi entre 2007 et 2011 en tant qu’ambassadeur auprès de l’UE, après avoir été conseiller auprès du Premier ministre Tony Blair, à l’époque où celui-ci fabriquait les mensonges sur les armes de destruction massive de l’Irak… La doctrine Blair, qui est devenue la norme anglo-américaine (et française, depuis Nicolas Sarkozy), vise à remplacer la loi internationale telle que la définit la Charte des Nations unies par la prétendue « responsabilité de protéger » (Responsibility to Protect, ou R2P). Une doctrine « humanitaire » qui a plongé l’Irak, la Libye et la Syrie dans le chaos, et causé des millions de morts.

Il est temps de libérer les États-Unis de la géopolitique de sanctions, de changement de régime et de révolutions de couleur, qui n’a jamais résolu et ne résoudra jamais aucun problème, et ne fait au contraire qu’aggraver les choses et créer les conditions de conflits bien plus terribles dans le futur. Les politiques du « grand jeu » du XIXe et du début du XXe siècle que l’ancienne puissance coloniale britannique a voulu poursuivre, coûte que coûte, en s’arrimant à la puissance américaine, doivent être arrêtées avant qu’il ne soit trop tard. Seule une rencontre au sommet entre les chefs d’État le permettra, et avant tout entre Trump, Poutine et Xi Jinping, afin de sortir de cette géopolitique et d’entrer enfin dans un nouveau paradigme de développement mutuel. C’est le sens de l’appel d’Helga Zepp-LaRouche, la présidente internationale de l’Institut Schiller, que nous faisons circuler depuis le 3 janvier sur tous les continents de la planète.

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