Vers un « Maïdan » à Washington ?

mardi 9 juin 2020

Chronique stratégique du 9 juin 2020 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

L’étouffement de George Floyd, un homme noir non-armé, lors d’une intervention routinière de la police aux États-Unis, continue de provoquer indignations et manifestations. Au-delà des clichés et des instrumentalisations politiques des uns et des autres, cette affaire n’est que le sommet d’un vaste iceberg.

En premier lieu, ce qui se passe aujourd’hui arrive après trente ans de destruction systématique des niveaux de vie des classes populaires américaines, majoritairement les populations noires ou latino aux États-Unis — que le président ait été blanc ou noir, démocrate ou républicain.

Alors que le slogan « Black Lives Matter » (« Les vies noires comptent ») défile dans les villes du monde entier, la question se pose en effet : ces manifestations vont-elles contribuer à donner une vie décente pour les populations pauvres des États-Unis – et plus largement pour les centaines de millions d’exploités dans le monde, en Afrique, en Amérique latine et ailleurs ? Ou bien, vont-elles être instrumentalisées par les forces qui, en faisant feu de tout bois, rêvent de se débarrasser de Donald Trump (un homme grossier mais échappant souvent à leur contrôle), et de provoquer un changement de régime à Washington, au bénéfice des intérêts de Wall Street, de la City de Londres et du complexe militaro-financier ? — Sir John Sawers, l’ancien chef du MI-6 britannique, vient justement de déclarer que la « relation spéciale » entre les États-Unis et le Royaume-Uni ne survivrait pas à un second mandat Trump...

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Des deux côtés de l’Atlantique, les Bien-pensants ne ménagent pas leur verve hypocrite pour accuser Trump de chercher à diviser l’Amérique pour imposer son autoritarisme ; les mêmes ont fait allégeance à la dictature du « libéralisme » financier, dont le principe de base est justement la compétition entre les individus et les sociétés…

Ajoutons que derrière le beau slogan « Black Lives Matter », déployées en énormes lettres jaunes sur le sol d’une grande artère de la capitale américaine, l’on trouve un mouvement qui a reçu 100 millions de dollars de la Ford Foundation, 60 millions de l’Open Society du milliardaire démocrate George Soros, et un total de 400 millions de diverses fondations de Wall Street, dont les intentions philanthropes et humanistes restent à démontrer…

Un Maïdan contre la présidence Trump

Tout journaliste de bonne foi (une espèce en voie de disparition) reconnaîtrait que les vastes manifestations, survenues depuis l’affaire Floyd du 25 mai, sont exploitées politiquement dans une énième tentative de nuire à la présidence Trump. Les discriminations raciales, auxquelles les frères Kennedy avaient tenté de mettre un terme, n’ont évidemment pas commencé sous son mandat. De plus, en dépit des innombrables défauts du personnage, s’il y a bien une accusation qui ne survit pas à l’examen, c’est celle de raciste anti-noirs, compte tenu des liens à long terme entretenus par l’homme d’affaire avec la communauté afro-américaine, qui lui ont même valu de recevoir en 1986 le « Ellis Island Award » aux côtés de Rosa Parks et de Mohammed Ali (voir photo ci-contre).

Donald Trump, aux côtés de Rosa Parks et de Mohammed Ali, lors de la remise du « Ellis Island Award » en 1983.

Une fois n’est pas coutume, la démesure est de mise : l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, le magazine le plus diffusé d’Europe, titre en couverture « Le pyromane : un président met son pays en feu », avec un dessin de Trump tenant une allumette sur fond d’émeutes et d’incendies, et cite un professeur d’université de Georgetown avertissant que le président américain s’apprête à orchestrer un « incendie du Reichstag » – en référence à l’incendie du Parlement allemand en 1933, qui servit à Hitler pour imposer la dictature nazie. En France, le JDD publie une tribune de Leah Pisar, ancienne conseillère de Bill Clinton à la Maison-Blanche, qui écrit : « Sous l’impulsion d’une tentation fasciste, Trump veut diviser pour régner ».

De son côté, le magazine Atlantic Monthly lève le voile : dans une tribune publiée le 6 juin, Franklin Foer fait directement référence à Gene Sharp, le théoricien des « révolutions de couleur » de Oxford (les « changements de régime » en faveur de « la démocratie » fomentés par les services anglo-américains dans les pays de l’ex-URSS), et compare la présidence Trump avec les régimes autoritaires « qui avaient conduit à des mouvements non-violents en Serbie, en Ukraine et en Tunisie, et qui avaient fait tomber des dictatures comme celles de Miloševi ?, Yanoukovich et Ben Ali ». Le modèle est donc bien la « révolution de Maïdan » qui, n’en déplaise à la mémoire défaillante de Foer et de ses acolytes, fut tout sauf « non-violente », et n’aurait jamais abouti sans l’implication des milices paramilitaires néo-nazies ukrainiennes soutenues en sous-main par les services anglo-américains.

La militarisation de la police

Lundi 8 juin, les élus démocrates se sont agenouillés sur le marbre du « Hall de l’Émancipation », à Washington, observant le silence pendant 8 minutes 46 secondes, soit la durée du calvaire de George Floyd, avant sa mort par asphyxie, lors de son interpellation. Puis, ils se sont engagés à réformer les forces de police, promettant d’interdire la technique de « strangulation » – comme l’a fait le même jour notre ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, sans doute à la demande de Macron. Mais oseront-ils s’attaquer à la militarisation de la police débutée sous la présidence Clinton ?

C’est en effet en 1997 que le programme 1033 a été lancé, ouvrant la phase « hardware » de ce processus, consistant à équiper les forces de police avec le matériel de l’armée – allant des lunettes de vision infrarouge à des véhicules blindés – utilisé ensuite en Afghanistan et en Irak. En 2017, une enquête de la NBC a estimé que 5,4 milliards de dollars de matériel avait été fourni en un an.

En parallèle, l’Anti-Defamation Ligue (ADL), en tandem avec les néoconservateurs de l’American Jewish Committee et du Jewish Institute for National Security, a créé en 2002 le National Counter-terror Seminars (NCTS), afin de « former » les gardiens de la paix américains aux techniques modernes d’une armée d’occupation, au nom de la « lutte contre le terrorisme ». C’est la phase « Software » du processus. «  Chaque année, les gardiens de la paix américains se rendent en Israël avec l’ADL pour étudier de première main les tactiques et stratégies israéliennes de lutte contre le terrorisme, explique l’ADL dans l’une de ses rares évocations publiques du programme. Le NCTS est un cours intensif d’une semaine dirigé par des officiers supérieurs de la police nationale israélienne, des experts israéliens des services de renseignement, de la sécurité et de la défense ».

Ce « conditionnement » a atteint son apogée en août 2014, à Fergusson (Missouri), lorsqu’un officier de police a tiré sur Michael Brown, le tuant en plein jour. On ne sait pas si l’officier en question avait participé au NTCS, mais il est apparu que son supérieur, le chef de la police de Saint-Louis, Tim Fitch, avait effectivement participé à un entraînement d’une semaine en Israël, trois ans auparavant.

Avec cet équipement et cette formation, les forces de police américaines ont adopté des comportements de force d’occupation coloniale, traitant les minorités – principalement les Noirs et les Latinos – de la même manière que les éléments les plus extrémistes de Tsahal vis-à-vis des Palestiniens. Dans un article publié le 4 juin dernier sur le site Global Research sur le fait que les officiers de la police américaine sont formés en Israël, le journaliste Timothy Guzman souligne que la technique du « genou sur la nuque » est couramment utilisée par les forces de sécurité israéliennes contre les Palestiniens, qu’elles considèrent tous comme des terroristes.

Il s’agit des méthodes classiques de « gang-contre-gang », dont l’Empire britannique est passé maître. D’un côté, des forces de polices peu formées, surarmées et de moins en moins intégrées dans les communautés locales, et de l’autre des mouvements noyautés par des provocateurs « gauchistes » ou financés par des oligarques financiers.

La vérité est que les États-Unis, et le monde, sont occupés par un capital financier criminel en banqueroute, qui n’a d’autre carte à jouer que la division, y compris la carte ethnique digne des empires coloniaux, et le chaos s’il veut garder la main.

Amelia Boyton Robison, figure historique du Mouvement des Droits civiques, en dialogue avec Lyndon LaRouche, à l’occasion de l’anniversaire de Martin Luther King, en janvier 2004, dans l’Alabama.

Écoutons un instant ce que vient d’écrire l’ancien ambassadeur du Burundi à Washington, Jacques Bacamurwanko, dans un message aux Américains où il fait référence au combat de l’économiste et homme politique Lyndon LaRouche, dont l’élection à la présidence américaine aurait donné un tout autre visage à l’Amérique :

Ceux qui protestent aujourd’hui contre le meurtre haineux de George Floyd par un officier de police du Minnesota doivent savoir qu’il s’agit du même système anti-américain qui a causé la ’strangulation’ [politique] de Lyndon LaRouche, jr. La nuque de Lyn a littéralement été écrasée par les mêmes gangs suprémacistes blancs qui voulaient l’empêcher d’exercer son droit de vote, de se déplacer et de voyager librement. La bonne nouvelle, c’est que ce gang meurtrier n’a pas réussi à stopper la progression des idées de LaRouche. Le monde serait plus libre aujourd’hui si M. Trump ordonnait, par un décret présidentiel historique signé dans le Bureau oval, ordonner à ces gangsters anti-américains de retirer leur genou de la ’nuque’ de Lyndon LaRouche.

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