Ces canots de sauvetage qui nous attendent

mardi 30 juin 2020

Chronique stratégique du 30 juin 2020 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

La décomposition avancée de la classe politique française, largement rejetée par les Français comme le démontre l’abstention record du second tour des élections municipales, n’est que la partie émergée de la banqueroute générale du système financier transatlantique, que l’on appelle à tort la « mondialisation ».

Malgré les incantations des uns et des autres, le naufrage économique et social ne fait qu’accélérer, sous l’impulsion d’une pandémie de Covid-19 qui ne cesse de s’étendre dans le monde, en l’absence de coopération Est-Ouest-Nord-Sud. Dans son dernier rapport, le FMI prévoit une récession mondiale de 4,9% pour 2020, une aggravation par rapport aux 3% anticipés en avril, quand il soulignait déjà qu’il s’agissait de la pire crise depuis la Grande Dépression des années 1930. Les États-Unis et les pays d’Europe devraient quant à eux voir leurs PIB chuter de 8 à 13%, dont 12,5% pour la France.

Jamais la dichotomie entre la finance et l’économie réelle n’aura été aussi criante, donnant mille fois raison à la méthode de prévision de l’économiste et homme politique américain Lyndon H. LaRouche (1922-2019), incarnée par sa « triple courbe » (voir ci-contre). Les banques centrales inondent littéralement les marchés – qui n’ont de « marchés » plus que le nom, et ressemblent davantage à un casino financier dopé par de la fausse monnaie.

Depuis le début de la crise épidémique, la Réserve fédérale américaine et la Banque centrale européenne ont injecté à elles deux environ 4000 milliards de dollars, faisant « repartir » les bourses à la hausse, après la chute vertigineuse de février-mars et le quasi-défaut de l’Italie. Les bourses et les autres bulles spéculatives attirent de plus en plus vers elles les capitaux financiers, tandis que les taux annuels de croissance de l’économie réelle – production et services –, après leur déclin progressif, passent désormais dans le rouge...

Le fil de l’épée de la Renaissance internationale

Dans son dernier éditorial publié dans le magazine Marianne, Jean-François Kahn commente le spectacle déplorable du monde politicien français : « Le chef de la droite est un imbécile, celui de LREM un nul, celui de la gauche socialiste un ectoplasme, celui de l’extrême-gauche insoumise un caractériel. Soyons positifs : tout cela annonce une renaissance. Il y a quatre-vingt ans, le général de Gaulle lançait également l’appel du 18 juin ».

Très juste ! A condition que l’on sorte du petit bocal franco-franchouillard dans lequel les médias veulent nous faire nager, et d’engager les citoyens dans le véritable combat : mettre fin à ce système transatlantique, où une minorité d’ultra-riches croit pouvoir opérer au-dessus des nations, spéculant, exploitant et pillant, tout en maintenant le monde dans un environnement d’instabilité, de chaos et de conflits ; et le remplacer par un nouveau paradigme de coopération entre nations, dans lequel les États et les peuples reprennent en main la création monétaire, pour la réorienter vers le travail humain créateur, dans le cadre d’une politique de développement économique mutuel.

Il ne s’agit pas d’un vœu pieux, mais d’une bataille en cours, dont Solidarité & progrès et l’Institut Schiller sont le fil de l’épée. Pour amorcer ce changement de cap, le premier enjeu sera d’amener les chefs d’État des principales puissances du monde à se rencontrer au sommet, afin d’initier une politique de « détente, d’entente et de coopération ». C’était la volonté exprimée lors de la visio-conférence de l’Institut Schiller, qui a réuni samedi dernier des diplomates, économistes, scientifiques, artistes, personnalités politiques et jeunes citoyens engagés de Russie, d’Europe, de Chine, des États-Unis, d’Afrique, d’Amérique latine, etc. (voir ci-contre).

Le 27 juin, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Ryabkov a souligné l’urgence de rétablir des relations de confiance entre les États-Unis et la Russie : « Aujourd’hui, pour être franc, il y a zéro confiance. Nous souffrons malheureusement de nombreuses tensions dans nos relations », a-t-il déclaré. A propos de la proposition du président Trump de réunir un « G7 élargi » incluant la Russie, l’Australie, l’Inde et la Corée du Sud, Ryabkov a affirmé que la Russie l’étudiait avec intérêt, mais que l’absence de la Chine « reflète un point de vue biaisé du problème » car sans participation active de cette dernière, les grands problèmes resteront insolubles.

Le président Poutine, comme nous l’avons rapporté dans notre chronique du 24 juin, multiplie les initiatives diplomatiques en faveur d’une rencontre entre les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, en invoquant leur responsabilité morale en tant que vainqueurs contre le Nazisme et le fascisme.

Des paroles aux actes

Il est important et prometteur que Macron et Poutine se soient longuement entretenus au téléphone, le 27 juin, évoquant justement la nécessité pour les deux pays de « garantir la paix et la sécurité mondiales », comme le souligne le communiqué du Kremlin. Le président français, qui a accepté l’invitation du président russe de se rendre à Moscou dès que les conditions de la pandémie le permettront (sans doute en août), a déclaré depuis le Palais de l’Élysée : « La crise que nous traversons, et les autres crises régionales, démontrent l’importance de l’espace européen dans le sens large du terme, de Lisbonne à Vladivostok. Il s’agit d’un véritable espace de coopération et de paix. Nous en comprenons l’importance et les défis auxquels nous faisons face ».

La discorde grandissante entre les États-Unis et les pays européens pousse de plus en plus ces derniers – en particulier la France et l’Allemagne – à se tourner vers la Russie, comme Macron l’a exprimé lui-même en appelant à la création d’un système européen de sécurité qui soit conçu non pas « contre », mais « avec » la Russie.

Bien entendu, on ne peut se satisfaire des déclarations d’un personnage qui depuis trois ans nous a habitués à des déclarations d’intention aussi grandes par leur lyrisme que par l’absence d’actes y correspondant. Avec de tels dirigeants, et surtout en l’absence de mobilisation citoyenne, il est très facile pour l’oligarchie financière, qui dispose des moyens de la presse et des médias, de saboter toute initiative allant dans le bon sens, comme elle l’a fait depuis l’élection de Donald Trump, à travers le montage du « Russiagate » puis les accusations contre la Chine, destinés à entraîner la présidence américaine dans la voie d’un nouveau conflit mondial.

Le changement de paradigme ne se réalisera que par une pression « éclairée » des populations sur leurs gouvernements. Comme l’écrit Jacques Cheminade dans sa déclaration publiée suite au second tour des Municipales, « notre travail à tous, patriotes et citoyens du monde », est de transformer en une renaissance la colère populaire qui se manifeste aujourd’hui sous diverses formes, « dans un esprit d’éclaireurs et d’explorateurs portant la cause de la création humaine pour la justice sociale, de Dunkerque à Perpignan et de Lisbonne à Vladivostok ».

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