L’Asie et les BRICS incarnent l’alternative au « Great Reset »

vendredi 27 novembre 2020

Chronique stratégique du 27 novembre 2020 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

Il y a une alternative au « Great Reset » – cette dictature monétaire malthusienne, présentée comme un New Deal vert, que l’oligarchie financière transatlantique entend imposer au monde via les banques centrales à coups de cryptomonnaies. La semaine dernière, les sommets successifs des BRICS, de l’ASEAN, de l’APEC et même du G20, sous l’impulsion des pays d’Asie et des BRICS, ont démontré que le XXIe siècle devra être celui de la coopération et le développement mutuel entre les nations.

Tandis que le ciel s’assombrit en Occident, une autre partie du monde pose les jalons de l’alternative à la gestion malthusienne, et de plus en plus autoritaire, de la désintégration sociale et économique que nous connaissons. En effet, à l’heure où tout le gratin néolibéral atlantiste se prépare à un « Great Reset » qui confierait, notamment lors du prochain sommet de Davos de janvier 2021, les clés de la dictature financière aux Banques centrales « indépendantes », un ensemble de pays, gravitant autour de l’Asie et des pays émergents représentés en particulier par les BRICS, a montré la semaine dernière que les nations ont encore leur mot à dire.

C’est une impressionnante série de sommets qui s’est en effet déroulée en quelques jours. Le 15 novembre, le Sommet de l’Association des pays d’Asie du Sud-Est (ASEAN) s’est conclu par la signature d’un accord commercial historique entre une quinzaine de pays représentant 2,3 milliards d’êtres humains – d’autant plus historique que le Japon, l’Australie, la Corée du Sud et la Nouvelle Zélande, qui s’alignent habituellement sur le grand jeu géopolitique anglo-américain, ont rejoint l’accord, aux côtés de la Chine. Puis, les 17 et 20 novembre, ont eut lieu le 12e Sommet des BRICS, sous la présidence de la Russie, et le 27e Sommet du Forum économique Asie-Pacifique (APEC), organisé par la Malaisie. Enfin, le Sommet des chefs d’État du G20 s’est tenu virtuellement depuis Riyad les 21 et 22 novembre.

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Les BRICS et les objectifs communs

Lors du 12e Sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), les discussions se sont concentrées sur la sécurité et la stabilité mondiale, avec la volonté d’unir les efforts pour vaincre la pandémie actuelle. Vladimir Poutine, qui présidait le sommet, a notamment annoncé que des accords ont été signés entre la Russie, l’Inde et le Brésil pour réaliser des essais cliniques communs de Sputnik V, le vaccin russe contre le Covid-19 ; et d’autre part, un accord de partenariat a été signé entre la Russie, la Chine et l’Inde pour la production et la distribution de ce vaccin, non seulement à destination de leurs propres populations, mais également de celle des pays les plus pauvres.

Par ailleurs, les cinq pays émergents accélèrent l’établissement du Centre de recherche et de développement de vaccin des BRICS, tel que cela avait été prévu lors du Sommet de Johannesburg en 2018. La Nouvelle Banque de développement des BRICS (NBD) joue également son rôle dans le combat contre la pandémie, avec 10 milliards de dollars investis depuis le début de l’année – la NBD dispose actuellement d’un portefeuille de plus de 20 milliards de dollars, investis dans 62 grands projets.

Ces dernières années, les pays des BRICS ont accru leur coopération dans la science, les technologies et l’innovation. Des contacts intensifs ont lieu entre les milieux universitaires et scientifiques, sur une très large palette de domaines, allant de l’exploration des océans et des cercles polaires à l’astronomie et l’intelligence artificielle. Un état d’esprit de coopération autour des « objectifs communs de l’humanité », comme on le disait après-guerre, que nous devons absolument retrouver en France, et dans l’ensemble du monde occidental, après quatre décennies dominées par l’individualisme, la cupidité et la culture malthusienne entretenus par le système de pillage de Wall Street et de la City de Londres.

Le G20 et la nécessaire mise en banqueroute du système

La bonne nouvelle est que ce G20 a eu lieu, dans le contexte délétère actuel des relations internationales. La mauvaise est qu’en raison de la séparation entre le G20 des Finances et celui des chefs d’État, ce dernier s’avère impuissant à prendre les mesures radicales nécessaires pour changer réellement la règle du jeu. Depuis le mois de mars, 11 000 milliards de dollars ont ainsi été injectés en tant que stimulus pour sauver le système financier, alors qu’il manque sept « petits » milliards au Programme alimentaire mondial (PAM) pour faire face à une vague de famines pouvant causer la mort de 30 millions de personnes dans les prochains mois, comme a alerté David Beasley, le directeur du PAM.

Le point positif est que la question des dettes publiques des pays pauvres était au cœur des débats. Le 13 novembre, le défaut de paiement de la Zambie sur sa dette extérieure a sonné comme un précurseur d’une crise apocalyptique pouvant très rapidement frapper des dizaines de pays qui subissent le double tsunami de la crise sanitaire et de la récession économique mondiale – sans pratiquement aucun filet de sécurité sociale. Pour la première fois, les pays du G20 ont convenu d’un cadre commun pour la restructuration de la dette publique, ce qui implique un effort commun accru pour aider les pays du Tiers-monde (selon la Banque mondiale, 50 % des pays les plus pauvres sont en situation de surendettement).

Plus tôt dans l’année, les pays du G20 ont décidé de suspendre le paiement des dettes des 73 pays les plus pauvres du monde, à travers l’Initiative de suspension du service de la dette (DSSI) — un gel qui vient d’être prolongé jusqu’en juin 2021. La grande avancée du G20 de ce week-end est l’engagement de la Chine dans ce cadre. Le 20 novembre, le ministre des Finances Liu Kun a annoncé que l’Agence chinoise de coopération au développement international et la Banque d’exportation-importation de Chine ont suspendu un total de 1,353 milliard de dollars de paiements au titre du service de la dette au profit de 23 pays. Ce qui fait de la Chine le premier pays du G20 en terme de montants de report de la dette dans le cadre du DSSI. Autant pour les Cassandre qui accusaient la Chine de dresser le « piège de la dette » aux pays du Tiers-monde...

La question de l’annulation de la dette devient d’ailleurs prégnante en Europe. « L’idée fait son chemin chez certains économistes et politiques de l’Hexagone », écrit Mathias Thépot dans le magazine Marianne. Les dettes souveraines de la BCE — dont environ 485 milliards d’euros pour la France — pourraient parfaitement être annulées pour libérer les pays d’un fardeau impossible à rembourser.

Cependant, toutes ces initiatives resteront vaines sans un changement de l’ensemble du système financier et monétaire international. Le « Great Reset », tel qu’il a été conçu par le Forum économique mondial de Davos, et sera mis en œuvre dès janvier 2021 par Christine Lagarde et les autres apôtres du système, vise précisément à écarter toute annulation des dettes, et à prolonger la survie des intérêts financiers transatlantiques, en imposant une dictature des banques centrales et un malthusianisme « vert ».

Face à ce faux « Green New Deal », nous devons nous battre pour un jubilé des dettes et pour la création d’un nouveau système monétaire international, fondé sur le principe de souveraineté monétaire nationale (un « nouveau Bretton Woods »), et pour une coopération internationale autour de l’énergie nucléaire et des infrastructures de base, les deux piliers qui permettront de produire la nourriture et les biens nécessaires à la vie de 7 milliards d’êtres humains.

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