Le Congrès américain évoque le démembrement de la Russie

lundi 4 juillet 2022

Chronique stratégique du 4 juillet 2022 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

Vu de Russie, l’Occident fait tout son possible pour ne plus être considéré comme un partenaire. En témoigne le débat au Congrès sur le démembrement de la Fédération de Russie.

Les propositions en faveur d’un Nouveau Bretton Woods comme fondement d’une nouvelle architecture de sécurité et de développement pour toutes les nations, promues par l’Institut Schiller fondé par Mme Helga Zepp-LaRouche portent plus que jamais l’espérance d’un nouveau paradigme.

Quand le Congrès US veut balkaniser la Russie

Les masques continuent à tomber. Déjà, en 2019, une étude de la Rand Corporation préconisait de pousser la Russie à se sur-étendre et décrivait en détail comment la piéger dans un conflit en Ukraine.

La semaine dernière, dans son communiqué final du 28 juin, les pays du G7 affirment qu’ils « continueront à imposer un coût immédiat et sévère sur le régime du Président Poutine pour sa guerre d’agression injustifiée contre l’Ukraine ».

Enfin, la déclaration finale du sommet de Madrid de l’OTAN du 29 juin accuse la Russie d’avoir « intentionnellement exacerbé, notamment par ses actions militaires, une crise alimentaire et énergétique qui affecte des milliards de personnes dans le monde » et affirme que « La Fédération de Russie constitue la menace la plus importante et la plus directe pour la sécurité des Alliés et pour la paix et la stabilité dans la zone euro-atlantique ».

Ajoutons à cela le fait que le 23 juin, répondant à un débat dans le microcosme washingtonien, une Commission importante du Congrès américain, dans une provocation parfaitement belliciste, a ouvertement évoqué la perspective d’un démembrement de la Fédération de Russie, considéré comme le seul moyen permettant de castrer Moscou et de freiner ses élans impérialistes...

Les Russes ne devront donc pas seulement se soumettre à la « démocratie » à l’occidentale, accepter un « changement de régime » imposé de l’extérieur ainsi qu’une « mise en faillite » les punissant de leurs volonté de défendre le Donbass ; il devront également se résilier à l’idée que leur pays soit littéralement démembré.

Ainsi, le 23 juin, un panel d’experts convoqué pour l’occasion par la Commission américaine pour la sécurité et la coopération en Europe (CSCE), institution connue sous le nom de « Commission américaine d’Helsinki », a donné un « briefing en ligne » de 93 minutes sur YouTube intitulé : « Décoloniser la Russie : Un impératif moral et stratégique ». Notons que cette « décolonisation » signifie ici la « balkanisation » de la Fédération de Russie dans une myriade de micro-Etats qu’on espère plus dociles aux puissances étrangères...

Des « experts en démocratie » sous influence

Cette Commission dite « d’Helsinki », a été créée en 1975 par le Congrès américain pour surveiller et encourager le respect de l’Acte final d’Helsinki et d’autres engagements de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Elle est composée de 9 membres de la Chambre des représentants, de 9 membres du Sénat et d’un membre des départements d’État, de la Défense et du Commerce. En principe, elle contribue à la formulation de la politique américaine à l’égard de l’OSCE et des États participants et prend part à son exécution, notamment par la participation de ses membres et de son personnel aux délégations officielles américaines aux réunions de l’OSCE et à certains organes de l’OSCE. Bien que cette commission se prétende « indépendante », il s’agit d’une agence du gouvernement américain créée et supervisée par le Congrès.

Le panel d’experts réuni par la Commission a prôné l’indépendance de nombreuses républiques de la Fédération de Russie, dont la Tchétchénie, le Tatarstan et le Daghestan, ainsi que des régions historiques qui existaient il y a des siècles, comme la Circassie.

La séance a été ouvert par le co-président de la Commission, le député démocrate du Tennessee, Steve Cohen. Pour lui, pas de doute : la Russie n’est « pas une nation stricte, dans le sens que nous avons connu dans le passé », car les Russes « ont essentiellement colonisé leur propre pays ».

Bakhti Nishanov, le modérateur, a noté avec enthousiasme une audience sans précédent pour un tel briefing en ligne.

L’intervenant le plus actif était Casey Michel, un défenseur millénaire du changement de régime. Le 27 mai, pour alimenter le débat, Casey a publié un article dans The Atlantic intitulé « Décoloniser la Russie ».

Michel a déploré que les États-Unis n’aient pas profité de la chute de l’Union soviétique en 1991 pour dépecer la Russie elle-même. « La Russie continue de superviser ce qui est à bien des égards un empire européen traditionnel, à ceci près qu’au lieu de coloniser des nations et des peuples à l’autre côté des océans, elle a colonisé des nations et des peuples sur terre ferme », a-t-il déclaré lors du briefing.

La dernière participante était l’ancienne députée ukrainienne Hanna Hopko, ancienne président de la Commission des Affaires étrangères de son pays et une figure clé de l’Euromaidan de 2014. Hopko a insisté sur le fait que Washington doit réfléchir « à la manière de changer non seulement le régime, mais aussi la nature impérialiste de l’État russe. »

L’impérialisme pour mettre fin à l’impérialisme

Un mois avant cet événement, Leonid Bershidsky, un jeune chef d’entreprise russe réfugié à Berlin, a publié une analyse sur Bloomberg, repris dans les pages du Washington Post, intitulée « Est-ce que le démembrement de la Russie est le seul moyen pour mettre fin à son impérialisme ? »

Extrait :

L’attaque de Poutine contre l’Ukraine a montré au monde qu’une Russie résurgente signifie, par nécessité, une Russie impérialiste. Et elle a relancé les discussions sur la question de savoir si la Russie doit être ’décolonisée’, ou peut-être ’défédéralisée’, pour enterrer ses ambitions impérialistes et maîtriser sa menace militaire. Un éclatement de la Russie d’aujourd’hui, semblable à la dissolution de l’Union soviétique, est considéré comme une issue possible, voire la plus souhaitable pour certains, d’une invasion ratée de l’Ukraine. Certains regrettent que les États-Unis n’en aient pas fait un objectif dans les années 1990, alors que la Russie post-soviétique était en ruines et luttait pour conserver une minuscule région sécessionniste : la Tchétchénie.

Diane Sare, la candidate au Sénat américain qui s’inspire de l’économiste Lyndon LaRouche (1922-2019) a donc parfaitement raison lorsqu’elle invite les patriotes américains, lorsqu’ils célébreront le 4 juillet, jour de l’indépendance américaine, à admettre que leur pays bienaimé « est actuellement l’auteur d’actes de barbarie injuste que l’Empire britannique avait imposé aux 13 colonies et pour lesquelles nous avons mené une guerre de libération ».

C’est ici que prend tout son sens le commentaire du 27 juin de Sergei Glaziev, l’ancien conseiller de la présidence russe actuellement en charge de l’Union économique eurasiatique :

Il y a un quart de siècle, Lyndon LaRouche, un penseur profond de notre époque, avait anticipé qu’un crash du système financier occidental, construit sur des pyramides et des bulles financières, deviendrait inévitable, provoquant un effacement généralisé des dettes et passant par pertes et profits les produits dérivés. Il a appelé à un nouveau système financier au service des besoins et de la reproduction élargie de l’économie réelle.