Les netconférences de Lyndon LaRouche

Un nouveau Bretton Woods : il est temps de réparer les ravages provoqués par George Shultz

mardi 12 avril 2005, par Lyndon LaRouche

Nous reprenons ci-dessous des extraits du webcast présenté par Lyndon LaRouche le 7 avril 2005 à Washington. Le texte intégral en anglais peut être consulté sur le site www.larouchepac.com.

« Nous nous trouvons dans une situation où un nombre croissant de cercles influents dans le monde, y compris aux Etats-Unis, font écho à ce que le président Clinton avait dit en septembre 1998, au lendemain de l’implosion spéculative des obligations russes : le monde a besoin d’une nouvelle architecture financière pour remplacer le système actuel du FMI.

« A travers le monde aujourd’hui, comme le montre ce qui s’est passé hier à la Chambre des députés italienne où le texte élaboré avec ma collaboration [résolution appelant le gouvernement à convoquer une nouvelle conférence de Bretton Woods] a été adopté à l’issue d’un débat très animé, les gens sont préoccupés par l’idée qu’il nous faut une nouvelle architecture financière. Nous ne pouvons pas continuer avec celle que nous avons maintenant. Beaucoup se demandent encore quelle forme devrait prendre cette architecture. Il n’y a pas de consensus là-dessus. (...) Ma tâche aujourd’hui consiste à résumer cette question, de manière à pouvoir structurer la discussion. (...)

« Nombreux sont ceux qui sont prêts à admettre que la désintégration actuelle du système monétaire a commencé en 2001, avec l’entrée en fonctions du président George W. Bush. Mais ils ne sont pas encore prêts à admettre que Bush junior n’a fait que poursuivre le processus de destruction de l’économie américaine déjà entamé par les gouvernements précédents avec le consentement, du moins tacite, de la majorité de la population.

« Cette destruction est en cours depuis plus de trois décennies. Elle a commencé en fait avec l’entrée des Etats-Unis dans la guerre du Vietnam et s’est accentuée après l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement d’extrême droite, celui de Richard Nixon. Et depuis ce temps, notamment depuis les événements d’août 1971, les Etats-Unis s’autodétruisent, non pas centimètre par centimètre, mais mètre par mètre. (...)

« Nous devons donc corriger les erreurs du Président actuel, mais pas seulement les siennes. (...) Nous devons amener une majorité de la population et aussi des dirigeants démocrates et républicains à reconnaître qu’ils ont été complices du crime de destruction de l’économie américaine et du danger qui pèse sur la sécurité de la civilisation mondiale. (...)

« Dans les années 30 et au début des années 40, Franklin Roosevelt nous a sortis de la Grande Dépression. Ce sont des précédents que de nombreuses personnes, en particulier dans le Parti démocrate, sont prêtes à accepter aujourd’hui. (...) Ils fonctionneraient encore aujourd’hui, mais ils ne sont pas adéquats. Au cours des trois dernières décennies, nous n’avons pas seulement réduit de 50% les capacités de l’économie américaine, nous lui avons infligé des dommages permanents, qui n’existaient pas à l’époque [de Roosevelt].

« Pour organiser alors la reprise économique, Roosevelt a mis à contribution les ressources dont nous disposions encore : les exploitations agricoles, les industries qui avaient plus ou moins fermé, mais pouvaient être rouvertes, les travailleurs dotés des qualifications productives qu’ils avaient acquises dans les années 20. En mobilisant ces ressources, il en a créé de nouvelles et lancé une reprise. (...)

« Pendant les années 50, la population américaine a subi un processus de dégénérescence, notamment sous l’influence du Congrès pour la liberté culturelle. Nous avons produit « le syndrome des cols blancs ». Les gens ont quitté les villes pour s’installer dans les banlieues, où de nouvelles industries se développaient en dehors des villes. (...)

« Nous avons produit une génération de Baby-Boomers dépourvue de cette qualité morale qui nous avait permis, à l’époque de Roosevelt, de sortir de la Dépression et de conduire la plus grande lutte imaginable contre le fascisme : sans nous et sans Roosevelt, l’empire nazi se serait étendu au monde dans les années 40. (...)

« Et ces jolis enfants des banlieues de l’après-guerre, ayant un emploi sympa dans une entreprise sympa, où ils restaient au propre et mentaient systématiquement pour ne pas avoir d’ennuis, qu’ont-ils fait lorsqu’ils ont été frappés par la crise des missiles de 1962, par l’assassinat de Kennedy, par l’engagement dans la guerre d’Indochine ? Ils se sont effondrés... moralement ! Ensuite, nous avons vécu le grand changement de paradigme culturel, celui des soixante-huitards.

« Cette génération a tourné le dos à la réalité, se déclarant contre l’industrie, contre l’agriculture, les cols-bleus et notre culture. Ils voulaient avoir une nouvelle culture. (...) Ceci a permis une évolution anti-industrielle et d’autres changements de type culturel qui, avec l’arrivée de Nixon au pouvoir, ont posé une menace fasciste.

« En fait, le fasciste, ce n’était pas tant Nixon. (...) Les architectes du fascisme sont toujours là, alors que Nixon est mort. George Pratt Shultz, par exemple, est toujours là. L’actuel gouvernement américain est sous la férule de George Shultz. C’est lui qui a organisé l’administration Bush, qui a sorti Condoleezza Rice de son trou, en Californie et ailleurs, et l’a amenée à mettre sur pied les « Vulcains ». C’est lui qui a choisi Dick Cheney pour organiser une nouvelle administration sous George W. Bush. (...)

« La destruction [de l’économie américaine] s’est faite en deux phases. (...) La première étape fut la destruction du système monétaire international, les 15 et 16 août 1971. Dès lors, les Etats-Unis ont renié leur engagement dans le système de Bretton Woods. L’année suivante, lors la conférence des Açores, George Shultz a mené la guerre à une France qui résistait sous Pompidou (...) et les Etats-Unis ont gagné, parvenant à imposer au FMI lui-même un accord international qui détruisit le système. (...)

« La deuxième phase a commencé lorsque le conseiller à la Sécurité nationale, Henry Kissinger, fut remplacé par son jumeau : le conseiller à la sécurité nationale Zbigniew Brzezinski (...) qui, sous Carter, devait concocter la « désintégration contrôlée de l’économie américaine ». C’est une doctrine adoptée par la Commission trilatérale, un groupe créé par Brzezinski et qui devint le nouveau gouvernement sous Carter. (...) C’est par la dérégulation que Brzezinski détruisit la structure de l’économie américaine : l’agriculture, les transports, l’industrie, tout ! (...)

« Au printemps et à l’été 1987, j’ai averti que nous étions au bord d’un effondrement boursier général - qui est effectivement survenu comme je l’avais prévu. Ensuite, [Paul] Volcker, qui, de son poste de gouverneur de la Réserve fédérale, avait supervisé la destruction de l’économie américaine, a été remplacé par Alan Greenspan, qui était encore plus fou que lui. (...) C’est lui qui a inventé les "paris risqués et les jeux" à la place de l’économie réelle, sous forme de « produits dérivés financiers » et de hedge funds. (...) Nous avons alors créé une dette basée sur ces produits dérivés. (...) Ces paris et ces jeux ont servi à démolir le système mondial, qui est absolument au bord de l’effondrement général.

« En ce moment, les hedge funds et autres tentent avec leur argent spéculatif de s’emparer de l’approvisionnement futur en matières premières de la planète. Il n’y a pas de pénurie de pétrole (...) - alors pourquoi les prix grimpent-ils en flèche vers les 60 dollars le baril et plus ? (...) A cause d’une pénurie de pétrole ? Non. (...) On parie sur les prix avec l’arme des produits dérivés financiers en vue de mettre la main sur l’approvisionnement futur. (...)

« Il est impossible de tolérer ce genre de système de spéculation sur les matières premières par les hedge funds, et d’avoir en même temps une économie saine. Nous sommes au point de la courbe où l’effondrement immédiat, général, de l’économie mondiale est imminent.

« Si j’étais Président et que j’avais le soutien des personnes appropriées, on pourrait reprendre le contrôle de la situation. (...) en s’appuyant sur le droit et le principe de l’intérêt général. Dans l’intérêt des Etats-Unis et en coopération avec d’autres pays qui partagent les mêmes principes, on s’arrangerait pour mettre ces spéculateurs en faillite, en redressement judiciaire. (...) Mais jusqu’à présent, à part moi et quelques autres qui partagent mon avis, personne n’a la volonté de le faire. (...)

« Nous voyons un reflet du problème dans la crise de General Motors et des nombreuses autres industries qui sont dans la même catégorie au niveau international. La faillite de GM, en l’absence d’autres mesures, ferait couler toute l’économie, en raison de la réaction en chaîne qu’elle produirait. (...) Il y en a certains, sur les marchés financiers, qui ne veulent pas sauver General Motors (...) ils préfèreraient lui donner le coup de grâce. Et c’est ce que s’apprête à faire la Réserve fédérale. (...)

« Pour ma part, je pense qu’il y a de meilleurs moyens de se débarrasser de directeurs incompétents que de détruire l’entreprise ! Car c’est chez GM, et chez les autres industries qu’il entraînerait dans sa chute, que l’on trouve la plus forte concentration de machines-outils, c’est dans le secteur de l’automobile et ceux qui lui sont liés.

« Il est vrai que nous produisons trop de voitures. On ne pourrait jamais vendre assez de voitures, au tarif actuel, pour stabiliser l’industrie automobile. (...) Mais l’industrie automobile dispose de ces capacités de machines-outils qui sont irremplaçables. (...)

« Il est clair, par conséquent, que nous devons effectuer des changements dans notre économie. (...) Commençons par l’industrie automobile et ses ateliers d’outillage. Là, les salariés risquent de perdre leur emploi, et s’ils ne travaillent pas, on ne bénéficie plus de leurs qualifications. Celles-ci sont essentielles pour maintenir une économie moderne. Si nous voulons bâtir un nouveau système de transports aux Etats-Unis, et les équipements qui vont de pair, nous devons employer ces personnes qui fabriquent les outils nécessaires dont nous aurons besoin pour les nouvelles industries.

« Nous pourrions établir un nouveau système de transport ferroviaire qui soit excellent, y compris un système de lévitation magnétique, grâce à ces travailleurs. (...) Oui, on peut accepter une réduction de la production automobile, tout en développant les transports en commun. Produisons un nouveau système ferroviaire dans tout le pays, qui bonifie le territoire des Etats-Unis. (...) Dans la mesure où on fait appel au secteur de la machine-outil, on peut intégrer de plus en plus de travailleurs non qualifiés ou peu qualifiés dans le processus de production et mieux les former. C’est la caractéristique même de tout projet de construction. (...)

« Ainsi, pour lancer une reprise de l’économie physique aux Etats-Unis, il faut commencer au sommet : à partir des ingénieurs et techniciens dans les secteurs de pointe, on bâtira des projets industriels et autres, et ces projets coopteront d’autres travailleurs non qualifiés et semi-qualifiés, comme nous l’avons fait avec la Tennessee Valley Authority du temps de Roosevelt. (...) On le fera aux Etats-Unis, en Eurasie, dans les parties nord et sud des Amériques. (...) Ces régions ont des ressources importantes, des populations en croissance et un grand potentiel : il leur faut un programme qui serve de locomotive, notamment dans le domaine scientifique. (...) Il leur faut un grand programme de développement des infrastructures, de coopération entre les différents pays de façon à ce qu’ils se développent de concert. Ils ont besoin de notre coopération pour pouvoir réussir dans cette entreprise. (...)

« Ceci nous amène à une autre question : comment financer tout cela ? Nous avons le chômage, nous avons des besoins de consommation. (...) Le problème vient du système financier et monétaire international, et aussi bancaire. (...) Ces systèmes, ainsi que la Réserve fédérale, se comportent comme s’ils étaient plus puissants que le gouvernement, et tant que le gouvernement accepte cet état de fait, ils le sont effectivement. (...)

« Le gouvernement, c’est nous. Nous sommes censés être responsables des conditions que nous créons ou que laissons imposer à notre peuple. Nous avons la responsabilité de défendre l’intérêt général de notre nation et de travailler de concert avec d’autres nations pour le bien commun de l’humanité.

« Nous sommes menacés d’une destruction qui est parfaitement évitable. Nous pourrions créer tout de suite les instruments de crédit (...) permettant de sortir l’économie mondiale du pétrin. (...) Le système financier actuel est en faillite, irrémédiablement en faillite. S’il continue d’exister, c’est uniquement parce qu’il peut compter sur le pouvoir du gouvernement, ou imposer au gouvernement de ne pas le mettre en faillite.

« Et si le gouvernement, notamment celui des Etats-Unis, reconnaît que le système financier est en faillite, que ferons-nous alors ? Ce système n’est pas un gouvernement, il n’a aucune autorité constitutionnelle, c’est une entreprise privée. Que fait-on d’une entreprise privée insolvable ? Le gouvernement a la responsabilité de la mettre en redressement judiciaire. (...)

« Comme on le fait toujours dans une situation de faillite, on prend l’entité insolvable - en l’occurrence l’économie - et on la met en redressement de sorte qu’elle recommence à se développer.

« De quelle façon ? Là, nous devons porter notre attention non pas sur le capital financier, mais sur le capital physique. Et il existe, bien sûr, une différence fondamentale entre les deux. L’un ne vaut pas l’autre. Prenons la construction d’une centrale électrique, qui aura une vie physique de peut-être 30 ans. (...) Nous décidons alors d’émettre des crédits en fonction d’un cycle de 25 ans pour un objet dont la durée de vie sera probablement d’une trentaine d’années. (...) L’Etat émet des prêts à intérêt simple de 2% pour la construction de centrales électriques, suivant nos besoins. L’échéance du crédit peut être de 25 ans pour une installation qui doit durer environ 30 ans.

« Ensuite, nous allons créer le nombre d’emplois nécessaire pour sa construction, qui prendra peut-être cinq ans. Pendant ces cinq ans, nous allons employer suffisamment de gens pour produire une installation qui fonctionnera sur 30 ans, en engendrant du revenu physique pour la population durant toute cette période. Ce projet sera financé par un crédit sur 25 ans. C’est de cette façon qu’on peut lancer la reprise.

« Le gouvernement, l’Etat, avec son autorité, doit garantir ce crédit. En créant et en organisant le crédit de cette façon, nous pouvons développer l’économie autant que le permettent les compétences et les qualifications disponibles. (...) Cela veut dire, en termes américains, avoir un système de banque nationale ; c’est ce que Roosevelt a essayé de faire : mettre en place une banque nationale de type hamiltonien.

« Nous devons reconnaître que nous avons fait des erreurs, et reconnaître la nature de ces erreurs (...) qui viennent de notre façon de penser, en tant que peuple, en tant que gouvernement, depuis maintenant une quarantaine d’années. (...) Nous devons cesser de faire semblant de croire que tout ce que nous avons fait jusqu’en janvier 2001 était bien. C’est ce que nous avons fait avant Bush qui nous a donné Bush. »