Les écrits de Lyndon LaRouche

Au-delà de la reconversion du secteur automobile

jeudi 8 décembre 2005, par Lyndon LaRouche

Dans un éditorial rédigé le 26 novembre pour l’Executive Intelligence Review (EIR), Lyndon LaRouche déclare que si les Américains laissent détruire leur industrie automobile, leur pays sera réduit, pratiquement du jour au lendemain, au niveau d’un pays du tiers monde. La perte serait particulièrement sévère sur deux fronts : les capacités en machines-outils et les emplois productifs et hautement qualifiés.

« La perte des usines automobiles provoquerait un désastre économique » pour les collectivités locales et les Etats concernés. Ceci pourrait à son tour déclencher une réaction en chaîne « pire que celle provoquée par l’attitude stupide du président Herbert Hoover face au krach de 1929, son programme ayant provoqué une contraction de moitié de l’économie américaine entre 1930 et mars 1933 ».

Selon LaRouche, « réduire le nombre d’emplois et de sites de production n’est pas une alternative raisonnable ». La solution viendrait plutôt de la diversification. Certes, il faut « accepter de réduire le nombre d’automobiles produites par les constructeurs américains », mais en même temps, « cette activité doit être immédiatement remplacée par la production d’autres catégories de biens de très haute qualité technologique, dont la conception et la production pourraient être réalisées à l’aide des capacités en machinesoutils de l’industrie automobile ». Dans ces catégories s’inscrivent les systèmes de transports en commun et les réseaux de production et de distribution d’électricité.

« Le gouvernement fédéral, entre autres, doit intervenir d’urgence, afin d’éviter l’effondrement non seulement de l’industrie automobile, mais aussi des collectivités locales dont l’existence en dépend ». Mais les problèmes ne s’arrêtent pas là.

En effet, face à la crise financière, le nouveau président de la Réserve fédérale menace de faire marcher à volonté la planche à billets, « ce qui rappelle aux banquiers rationnels le processus d’hyperinflation en Allemagne en 1923. Nous sommes au bord du plus grand effondrement financier de l’histoire, si le gouvernement américain ne change pas rapidement de politique. »

A court terme, dans le cadre d’une réorganisation financière, « les banques doivent rester ouvertes, même celles ayant d’énormes problèmes en matière de produits dérivés. Sur ce plan, le gouvernement pourrait faire le nécessaire, mais il ne pourra pas le faire longtemps sans investir massivement dans la production physique de l’infrastructure économique de base. » Ces investissements encourageront de nouvelles lignes de produits, conceptualisés dans le secteur de la machine-outil, qui réactiveront tout le secteur industriel de qualité et remettront l’économie sur la voie du plein emploi.

« Le problème ne se cantonne pas à éviter simplement l’effondrement de l’industrie automobile. (...) Nombre d’entre nous, au Congrès et à d’autres niveaux de responsabilité, sommes de plus en plus conscients de la nécessité d’une rapide intervention à grande échelle pour enrayer la chute et faire repartir l’économie nationale. Les effets de Katrina ne sont qu’un exemple de la nécessité de changer la politique économique de notre nation. »

En conclusion, LaRouche annonce que de son côté le magazine EIR contribuera aux efforts d’éducation populaire et de conceptualisation économique nécessaires pour sauver l’économie américaine et même au-delà.

LaRouche répond à Ford

Voici le texte, légèrement abrégé, de la lettre ouverte adressée par Lyndon LaRouche à William Ford, PDG de l’entreprise Ford Motors, le 23 novembre dernier.

Je voudrais non seulement vous exprimer mon vigoureux soutien à la déclaration que vous avez faite au National Press Club le 22 novembre 2005, mais également présenter des mesures d’urgence qui sont à la fois faisables et nécessaires. Ce sont des mesures d’assistance essentielles que notre gouvernement doit prendre afin d’empêcher une catastrophe imminente pour l’avenir économique des Etats-Unis, pays qui reste, malgré tout, le pivot et l’espoir d’une reprise économique générale, dans un monde frappé de plein fouet par la crise. (...)

Depuis le changement d’attitude de notre classe dirigeante, remontant à la période 1964-1981, nous sommes passés du statut de machine productive la plus puissante que le monde ait jamais connue, à celui d’ » économie de services » utopique et post-industrielle, totalement ruinée. C’est une évidence si l’on présente, sous forme d’animation informatique chiffrée, le déclin des caractéristiques physiques de notre économie nationale, comté par comté, au cours des dernières décennies.

Comme l’implique votre déclaration, l’industrie automobile représente, pour l’essentiel, la principale composante des capacités de construction de machines-outils de notre République, de pair avec celles du secteur aérospatial. Si nous démantelons cette capacité spécifique, nous ne serons plus qu’un vestige de ce que nous étions, comparable à un pays du tiers monde. Toutes les collectivités locales, directement et indirectement frappées par ce démantèlement, subiront la dépression économique.

Ce ne sont pas les automobiles qui font l’industrie, c’est l’industrie qui produit, entre autres, des véhicules. Elle pourrait produire presque tout ce qu’on lui demanderait, comme les éléments d’un nouveau réseau de transport, notamment des systèmes à lévitation magnétique, ou certains éléments essentiels des nouvelles centrales électriques dont nous avons un besoin urgent, ainsi que les composants nécessaires pour rebâtir les systèmes de gestion de l’eau, actuellement vétustes et insuffisants. Dans toute conception compétente d’une économie moderne, environ la moitié est constituée de l’infrastructure économique de base. C’est ce rapport qui distingue notre pays des secteurs industriels aujourd’hui terriblement vulnérables des pays asiatiques, comme la Chine et l’Inde, où le revenu national, vu les prix à l’exportation, est insuffisant pour faire face aux besoins des 80 % des ménages qui gagnent le moins.

La transformation de notre pays, de première puissance agro-industrielle mondiale en « économie de services » affaiblie et insolvable, est arrivée au point où la nation est en faillite. Seules les prérogatives de souveraineté nationale, incluses dans notre système constitutionnel, nous ont permis d’éviter une faillite nationale imminente. Mais cela ne peut durer encore longtemps. Il faut mettre en redressement judiciaire la Réserve fédérale, dont la banqueroute est irréversible (la situation est semblable ailleurs dans le monde). Pour lancer la reprise, nous devons renouer avec une démarche faisant à nouveau appel à ce qui a fait des Etats-Unis la plus grande puissance économique de tous les temps, par exemple dans le cadre des programmes mis en oeuvre par Harry Hopkins et Harold Ickes à l’époque du président Franklin Roosevelt.

Privilégier l’infrastructure

En lançant les mesures adéquates de reprise de l’économie américaine, dans le cadre d’une réorganisation de la Réserve fédérale, le gouvernement doit se concentrer sur l’infrastructure économique de base, tout en réactivant le secteur privé au moyen de contrats et de crédits accordés à des fournisseurs et sous-traitants privés participant aux programmes aux niveaux fédéral et des Etats. L’urgence, du point de vue de la sécurité nationale, de mettre en place un système air-rail rationnel, permettant de réunifier efficacement notre territoire, illustre bien la manière dont nous devons diversifier les capacités de l’industrie automobile, utilisant pleinement son parc de machines-outils, dans le cadre d’une nouvelle division du travail par rapport au produit net de l’industrie.

L’essentiel du remède doit être prévu dans une proposition de loi élaborée par le Congrès, mobilisant une part suffisante des capacités existantes pour maintenir intactes les capacités industrielles, en conservant le potentiel en machines-outils actuel et en maintenant le niveau d’emplois dans les villes concernées. La diversification doit tenir compte à la fois de l’intérêt national et de l’adaptation à une réduction du marché national d’automobiles produites par des constructeurs américains.

Avec la dérive vers une société de services, au cours des quatre dernières décennies, nous avons ruiné la nation et son économie. Cependant, en dépit de nos erreurs, les Etats-Unis restent le pays devant fournir le leadership politique pour assurer la reprise dont le monde a besoin, face à la menace immédiate d’effondrement général de tout le système financier et monétaire.

Vous avez vu juste au sujet de l’histoire économique récente. Nous devons assurer la bonne mise en oeuvre que cela implique. Ce n’est pas une option parmi d’autres, c’est la seule option économique dont dispose notre nation. Le Sénat et les autres institutions devront être soutenus dans leur démarche pour déterminer la faisabilité des nécessaires réformes de l’orientation nationale. (...)

Ainsi, le Congrès devra-t-il adopter une loi, probablement proposée par la commission du Sénat compétente, prévoyant la création d’un organisme chargé de réorganiser l’industrie automobile en ce sens.

Dans ce cadre, les industries existantes et le parc de machines-outils qui leur est associé bénéficieront d’aides fédérales pour effectuer correctement leur reconversion, sans suppression de capacités productives essentielles. Cette loi doit également instaurer une entité spéciale chargée de fournir la protection nécessaire, le temps de mettre en oeuvre les programmes d’extension des activités, au-delà des missions actuelles de l’industrie, vers le transport en commun et d’autres domaines.

Vous et vos collaborateurs avez l’expérience nécessaire pour formuler des propositions définissant les vastes possibilités de diversification, sous les formes technologiques appropriées, sur la base des capacités de conception de machines-outils dont nous disposons.

Cette disposition fédérale doit inclure l’intention de redonner aux Etats-Unis leur rang de leader technologique. Et nous encouragerons et aiderons d’autres pays à nous imiter et à nous égaler. La science et son partenaire indispensable, la construction de machines-outils, doivent redevenir la norme exemplaire de la performance industrielle américaine. C’est la mission que doit se donner la disposition fédérale prévoyant cette réforme.