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Victoire des démocrates aux Etats-Unis : Reste à destituer Cheney et Bush

mardi 14 novembre 2006

par Helga Zepp-LaRouche, présidente du Büso

Malgré la défaite des néo-conservateurs et le départ de Donald Rumsfeld, le danger de nouvelles aventures militaires reste très réel. D’où la nécessité d’obtenir au plus tôt le départ de George Bush et de Dick Cheney. Et de donner aux dirigeants démocrates le courage d’opter pour une nouvelle architecture financière mondiale.

 

Enfin, la population américaine a fait ce que la majeure partie de la population mondiale attendait avec impatience : elle a infligé une défaite cinglante au gouvernement Bush lors des élections législatives, qui étaient en réalité un référendum sur tous les aspects de sa politique. Les démocrates ont remporté une nette majorité à la Chambre (235 sièges contre 200 aux républicains), ont pris le Sénat avec 51 sièges contre 49 et occupent désormais 28 postes de gouverneur sur 50. Et sans la multitude d’irrégularités électorales - pannes d’ordinateur, manipulations informatiques, intimidations directes, sales coups - la victoire des démocrates et le rejet de la politique plus que discréditée des néo-conservateurs auraient été encore plus massifs. La démission de Donald Rumsfeld au lendemain du scrutin et son remplacement par Robert Gates représentent des gifles personnelles pour George W. Bush.

On peut donc respirer - mais seulement le temps d’une petite pause bien méritée. Car la bataille commence dès maintenant autour de la direction politique que prendra le Parti démocrate américain. En effet, bientôt, la crise systémique du système financier international - qu’on a jusqu’à présent réussi à reporter grâce à de multiples manipulations techniques - va éclater avec une force que très peu de gens peuvent imaginer. Et c’est justement l’ampleur de la défaite subie par les néo-conservateurs et la perspective que le Congrès à majorité démocrate ouvre des enquêtes gênantes pouvant déboucher sur une procédure de destitution, qui rendent le danger d’une nouvelle aventure militaire dans un proche avenir plus réel que jamais.

C’est pourquoi Lyndon LaRouche, qui était à l’avant-garde de la mobilisation du Parti démocrate et, surtout, des jeunes électeurs, appelle à l’ouverture immédiate d’une procédure d’impeachment (mise en accusation) de George Bush et de son vice-président Dick Cheney. Les motifs ne manquent pas. Le futur président de la Commission judiciaire de la Chambre des représentants, John Conyers, qui avait déjà appelé, il y a quelques mois, à enquêter sur l’incompétence du Président actuel, a accumulé une quantité impressionnante de preuves allant dans ce sens. Car, selon la Constitution américaine, ce n’est pas seulement tel ou tel fait reproché au Président qui constitue un motif de destitution, mais également son incapacité à gouverner.

Par ailleurs, la commission des Affaires étrangères du Sénat a constaté il y a plusieurs semaines que la Maison Blanche savait, bien avant le début de la guerre contre l’Irak, que les motifs officiellement invoqués pour faire la guerre reposaient sur des mensonges purs et simples, c’est-à-dire qu’il n’y avait ni armes de destruction massive en Irak, ni liens entre Saddam Hussein et al-Qaida. Autrement dit, le gouvernement a délibérément menti au Congrès et au peuple américain. Il s’agissait donc, en vertu du droit international (que l’administration Bush bafoue allégrement, de même que les conventions de Genève) d’une guerre d’agression illégale.

Le gouvernement Bush-Cheney est encore menacé dans bien d’autres domaines. Il semble acquis que la commission de Réforme gouvernementale, que devrait présider à l’avenir Henry Waxman, convoquera à des auditions les membres du conseil d’administration d’Halliburton (dont Dick Cheney était l’ancien PDG) et de KBR. Il s’agit en effet d’enquêter sur les contrats accordés dans le cadre de la mission en Irak et suite au passage de l’ouragan Katrina aux Etats-Unis. La commission du Renseignement du Congrès entend enquêter sur l’affaire de corruption impliquant le député Randall Cunningham, condamné en 2005, et sur l’octroi de contrats dans le secteur de la défense. En outre, on croit savoir que la commission sur l’Education et le Travail, que dirigera George Miller, s’intéressera aux pots-de-vin versés par le lobbyiste Jack Abramoff et l’ancien président du groupe républicain, Tom Delay. Sans oublier que le procureur spécial Patrick Fitzgerald doit reprendre son enquête sur la divulgation de l’identité de Valerie Plame, collaboratrice clandestine de la CIA, dont toutes les pistes mènent au bureau du vice-président Dick Cheney.

L’origine du danger de guerre

Il serait cependant tout à fait illusoire de croire que la défaite électorale et les enquêtes à venir empêcheront le gouvernement actuel de lancer de nouvelles opérations militaires, bien au contraire. Comme l’affirme entre autres le général William Odom, l’ancien chef de la National Security Agency, seule une procédure immédiate d’impeachment permettrait de stopper les préparatifs - déjà bien avancés - de frappe militaire contre l’Iran, comprenant le déploiement de petites armes nucléaires, ou bunker busters. Conscient du danger, Téhéran a réagi de deux manières : d’une part en procédant à des manœuvres, il y a une dizaine de jours, au cours desquelles ont été testés des missiles de moyenne portée (2000 km), capables de frapper des troupes américaines ou de l’OTAN en Irak et en Afghanistan, ainsi que des bases américaines dans les pays du Golfe et en Israël, et d’autre part, en offrant de discuter avec Washington de la situation sécuritaire en Irak.

Le fait que le Pentagone vient de demander une rallonge budgétaire de 160 milliards de dollars indique bien l’intention de lancer de nouvelles opérations militaires. Outre la menace de frappe contre l’Iran et la situation désespérée en Irak et en Afghanistan, on prépare, sous couvert d’action humanitaire, une intervention militaire contre le Soudan au Darfour, ainsi qu’en Somalie. Et si Washington ou Tokyo écoutent les propositions de certains manipulateurs, en interceptant par exemple des bateaux nord-coréens afin d’imposer un blocus alimentaire et pétrolier, une guerre menace d’éclater là-bas qui deviendrait vite incontrôlable.

Toute personne saine d’esprit dira que tout cela est impossible. Le problème, c’est que nous n’avons pas affaire ici à des esprits sensés, mais à certaines forces financières de la mondialisation, pour qui le gouvernement néo-conservateur de Washington n’est qu’un instrument. Ces forces se situent dans la tradition presque ininterrompue des intérêts qui, dans les années 20 et 30, soutenaient Mussolini, Franco, Hitler et le gouvernement de Pétain, et s’accommodent même d’une guerre mondiale si c’est nécessaire pour maintenir leur pouvoir. L’intention de ces forces est le « changement de régime », de façon à écarter tout gouvernement qui s’oppose à leurs plans d’empire mondial. Même si on a du mal à l’imaginer, ces forces préfèrent garder la mainmise sur les matières premières et les ressources énergétiques à la faveur du chaos créé par la guerre, que d’accepter de disparaître dans l’effondrement financier imminent.

La solution : un nouveau Bretton Woods

Dans les semaines à venir, ce krach systémique va se faire durement sentir, déclenché par l’éclatement de la bulle immobilière américaine et l’effondrement des hedge funds et fonds de placement privés, les fameuses « sauterelles » qui ont financé leur pillage par un endettement massif. La seule alternative à l’effondrement du système financier mondial, suite à la chute brutale du dollar, serait la réorganisation immédiate de ce système par une procédure ordonnée de redressement judiciaire et l’adoption par les gouvernements d’une nouvelle architecture financière internationale.

Avec la victoire des démocrates aux Etats-Unis, la possibilité de réaliser à temps une telle réorganisation du système financier mondial est désormais plus proche. Grâce à la discussion intense que Lyndon LaRouche et son mouvement de jeunes ont lancée au sein du Parti démocrate américain pour un retour à la tradition de Franklin Roosevelt, certains cercles importants étudient cette idée. Après son arrivée à la présidence américaine, en 1933, Roosevelt a su sortir l’Amérique de la grande dépression grâce à sa politique de New Deal et en relançant l’économie productive par l’octroi de crédits publics. En outre, il organisa en 1944 le système dit de Bretton Woods, dont les taux de change fixes et la politique de crédit orienté vers le progrès scientifique et technologique assurèrent la croissance économique pendant plus de deux décennies.

En 1971, Richard Nixon, George Shultz et Henry Kissinger mirent fin à ce système de Bretton Woods en découplant le dollar de l’or et en créant le marché de l’eurodollar. Ce fut le début de l’économie de bulle qui se trouve aujourd’hui dans sa phase finale. La seule solution au krach imminent passe par l’annulation des mesures prises à l’époque et l’adoption d’un nouveau système de Bretton Woods auquel pourront participer toutes les nations souveraines du monde. C’est pour cette solution que le mouvement de Lyndon LaRouche se bat depuis des années au niveau international.

Que peut faire l’Europe ?

Pour ce qui est des Etats-Unis, il est clair que le gouvernement néo-conservateur de Washington a tellement discrédité la diplomatie américaine qu’il faudrait des mesures extraordinaires pour rétablir son statut dans le monde. Certes, la méfiance est tout aussi grande vis-à-vis des démocrates, car la politique des Madeleine Albright, Richard Holbrooke, Zbigniew Brzezinski, Felix Rohatyn et George Soros est à peine différente de celles des néo-conservateurs.

L’enjeu de la bataille, dans les semaines à venir, sera de redonner une âme au Parti démocrate et à l’Amérique. Lyndon LaRouche est l’Américain, et le démocrate, qui a gagné la confiance de nombreuses forces politiques en Russie, Chine, Inde, dans le monde arabe et ailleurs. Si LaRouche et la tradition de Roosevelt, qui entendait mettre fin au colonialisme, parviennent à s’imposer, le monde changera pour le meilleur.

Ici, en Europe, nous devons nous préparer à une nouvelle alliance stratégique avec la vraie Amérique, celle de la Révolution américaine, de Lincoln, Franklin Roosevelt, Martin Luther King et Lyndon LaRouche. Dès lors, un partenariat stratégique mutuel avec les pays eurasiatiques ne constituera pas une contradiction, mais plutôt un complément.

Comme le montre la débâcle des républicains aux Etats-Unis, nous vivons une période de changements brusques et de bouleversements soudains. Nous, nous savons comment leur donner une issue positive. Rejoignez-nous !