Brèves

LaRouche propose des contrôles de prix sur le marché pétrolier

mardi 1er juin 2004

Comme l’OPEP l’a affirmé à de nombreuses reprises ces derniers jours, le prix record du pétrole n’est pas déterminé par la loi de l’offre et de la demande - au contraire, les livraisons dépassent actuellement la demande de plusieurs millions de barils/jour- mais plutôt d’une frénésie spéculative sans précédent, sur fond de crise dans l’ensemble de l’Asie du Sud-Ouest. Déjà en 2000, comme l’EIR l’avait montré dans une étude, sur 570 barils de pétrole faisant l’objet d’un contrat à terme à la Bourse du pétrole de Londres, seul un baril physique était réellement transporté. Pourtant, l’échange de titres sur les 569 autres faisait monter le prix du seul baril effectivement vendu. Parmi les plus importants acteurs sur la bourse de Londres, on trouve Barclays Capital, Bear Stearns International, Deutsche Futures London, BP Oil International et Shell International Trading. En même temps, des centaines de hedge funds, souvent liés aux grandes banques internationales, ont envahi les marchés à terme des matières premières. Selon la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), les contrats de produits dérivés sur le prix futur du pétrole atteignent des niveaux records au New York Mercantile Exchange (NYMEX). Le 26 mai, le commissaire européen à l’Energie, Loyola de Palacio, a déclaré : « Nous avons affaire à une bulle spéculative. (...) Il n’y a pas de véritable pénurie sur les marchés. Voilà la réalité. »

La spéculation sur le prix de pétrole se fonde naturellement sur quelques considérations géopolitiques, notamment la situation désastreuse en Asie du Sud-Est et la probabilité de graves perturbations dues à des attaques terroristes, comme celles perpétrées en Arabie séoudite en mai. Le 27 mai, Lyndon LaRouche a proposé de fixer le prix du pétrole, par exemple aux alentours de 25 dollars le baril, afin de faire échec aux spéculateurs qui le font monter jusqu’à 42 dollars et au-delà. Il a confirmé que ces prix n’avaient rien à voir avec l’offre et la demande, mais étaient simplement le résultat de la spéculation, notamment de la part de hedge funds - dans le contexte d’un système financier en désintégration.

LaRouche a aussi soulevé la question d’une composante stratégique dans la frénésie actuelle des prix du pétrole. Selon un expert italien du pétrole, auteur de plusieurs livres sur le fondateur de l’ENI, Enrico Mattei, les Etats-Unis augmentent dès maintenant leurs réserves stratégiques en prévision d’une éventuelle crise majeure au Moyen-Orient. Alors qu’ils importaient entre 11 et 12 millions de barils/jour l’année dernière, ces chiffres sont de 14 à 16 millions de barils/jour aujourd’hui. Officiellement, cette augmentation des importations est due à la « reprise américaine ». La semaine dernière, dit-il, un représentant iranien de l’OPEP a déclaré que la hausse des prix du pétrole n’était aucunement due à des raisons économiques, mais à des motivations « politiques ».

De nombreux pays se constituent des réserves stratégiques de pétrole

Le terme « réserves stratégiques de pétrole » désigne non pas les ressources pétrolières connues, mais non exploitées, mais plutôt les volumes de brut ou de produits intérimaires qui ont déjà été extraits et stockés et sont donc utilisables à court terme en cas d’urgence. Suite aux événements du 11 septembre 2001, l’administration Bush a décidé en novembre 2001 d’accroître la Réserve stratégique de pétrole (RSP) américaine - établie en 1975 - pour la faire passer de 540 millions à 700 millions de barils, capacité maximale des dépôts actuels. Avec 40 millions de barils de réserve supplémentaires l’année dernière et 20 millions jusqu’à présent pour cette année, la RSP se situe actuellement à environ 660 millions de barils. A cela s’ajoutent des stocks de pétrole commerciaux qui avaient atteint, en janvier dernier, leurs plus bas niveaux depuis 30 ans, avant d’être reconstitués. Ces stocks commerciaux représentent 1,15 milliard de barils. Au total, la RSP et les stocks commerciaux représentent 180 jours ou 6 mois d’importations.

Ces dernières semaines, plusieurs sénateurs démocrates ont demandé au gouvernement de suspendre les achats de pétrole destiné à la RSP, ou même d’utiliser ces réserves pour la consommation, afin d’empêcher une montée en flèche des prix de l’essence. Le gouvernement a catégoriquement rejeté ces appels. Le porte-parole de la Maison Blanche, Scott McClellan, a déclaré le 19 mai que la réserve stratégique ne devait être utilisée qu’en cas « d’urgences nationales, au cas où nous serions attaqués ou s’il y avait de graves ruptures d’approvisionnement ». Le même jour, le président Bush déclara : « Cette réserve de pétrole est là en cas d’importantes ruptures d’approvisionnement énergétique aux Etats-Unis. L’idée de vider la Réserve stratégique de pétrole mettrait l’Amérique dans une position dangereuse dans la guerre à la terreur. Nous sommes en guerre. Nous sommes confrontés à un ennemi dur et déterminé sur tous les fronts, et nous ne devons pas aggraver notre position dans cette guerre . »

Parmi les autres pays développés, il existe un certain standard pour les réserves stratégiques de pétrole, imposé par l’Agence internationale de l’énergie (AIE), agence fondée par l’OCDE suite à la crise pétrolière de 1973. En font partie : les Etats-Unis, le Canada, l’Union européenne et d’autres pays d’Europe de l’Ouest, le Japon, la Corée du Sud, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. L’AIE exige des stocks pétroliers équivalents, pour chaque pays, à 90 jours de livraison. Les pays membres de l’UE sont aussi tenus légalement de maintenir des réserves pétrolières égales à au moins 90 jours de consommation. L’année dernière, la Commission européenne avait proposé que ces réserves soient portées à 120 jours de consommation, mais aucun décision n’a encore été prise. Le problème principal pour l’UE vient des dix nouveaux membres de l’Est, qui n’ont pas suffisamment de réserves.

Probablement, les pays les plus vulnérables en cas de rupture de l’approvisionnement pétrolier - au moins au sens physique - sont la Chine et l’Inde. Ces deux pays coopèrent avec l’AIE et ont annoncé des plans pour constituer des réserves stratégiques de pétrole. Mais pour l’instant, elles n’existent pas. A la fin de l’année dernière, le gouvernement chinois a annoncé que la Chine, qui importe près du tiers de sa consommation pétrolière, allait constituer quatre réserves stratégiques côtières. En septembre 2003, le ministère indien du Pétrole a annoncé qu’il projetait de bâtir des réserves stratégiques couvrant 45 jours de demande. Les importations de pétrole brut représentent 70% des besoins énergétiques du pays.

Si les réserves stratégiques de pétrole permettraient de couvrir pendant quelque temps la demande physique pour les transports, le chauffage, la production et les besoins militaires, les effets dévastateurs des prix records du pétrole frapperaient toutes les économies de l’OCDE et risqueraient de donner le coup de grâce au système financier international.