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Intervention à l’Université d’été de La Rochelle : Hisser le Parti socialiste à la hauteur de la tâche

dimanche 6 septembre 2009

Par Bertrand Buisson

Dans le marasme présent, l’utilité du Parti socialiste pour les Français se mesurera aux actions qu’il entreprendra pour sortir l’humanité de la plus grande crise économique et sociale que le monde ait connue. Au-delà des éléphants et éléphanteaux qui vont de discours en déclarations, comme pour conjurer le sort et maintenir l’illusion qu’ils sont de véritables meneurs, nombre de militants et d’élus locaux socialistes n’attendent qu’un ordre de bataille pour se mobiliser et aller parler vrai aux Français. Ce sont ces gens-là que nous avons rencontrés et qui sont venus à nous à La Rochelle.

Penser grand, penser Jaurès

Il existe entre S&P et le PS certes une différence de « taille », mais aussi de conception : il y a faire de la politique — paraître et se positionner — et se battre pour des idées dont la réalisation continue représente le défi politique. « Tout individu humain a droit à l’entière croissance. Il a donc le droit d’exiger de l’humanité tout ce qui peut seconder son essor. Il a le droit de travailler, de produire, de créer, sans qu’aucune catégorie d’homme soumette son travail à une usure ou à un joug », disait Jaurès. Quel socialiste ne serait d’accord avec cela ? Aucun. Mais est-on prêt à prendre le taureau de la mondialisation financière par les cornes pour honorer Jaurès et tout individu humain ?

Un maire rural du sud-ouest de la France s’est arrêté net à notre stand, installé en amont de l’entrée de l’Université d’été, en voyant que nous parlions de « rénovation » du système financier plutôt que de celle du PS. Elu depuis peu, il nous a dit que, paradoxalement, depuis qu’il a des responsabilités locales, il se rend compte de l’importance primordiale de l’international. Il s’est très sérieusement engagé à lire Nouvelle Solidarité tous les 15 jours et a pris la thèse de Jaurès sur « la réalité du monde sensible ». Une militante socialiste s’insurgea d’ailleurs de voir notre table couverte de ce livre, alors que le PS ne l’a jamais réédité et encore moins fait lire à ses membres.

Nous avons voulu faire revivre dans le débat politique le dialogue entre Jean Jaurès le philosophe et Rosa Luxemburg l’économiste. Qu’ont-ils fait face à l’impérialisme monétaire dominant les peuples et les pays ? Que feraient-ils aujourd’hui contre une accumulation de capital fictif devenue planétaire ? Se seraient-ils contentés de mesurettes ou auraient-ils convenu de la nécessité de mettre ce système fou en faillite organisée ? Voyant cela, une jeune femme est revenue sur ses pas, elle est en train de lire Rosa Luxemburg. Son ami, lui, était déjà lecteur de Nouvelle Solidarité. Un autre militant socialiste s’arrêta pour nous dire « Cheminade a raison », Jaurès devrait être la ligne du PS.

La base socialiste favorable à une nouvelle Commission Pecora

Si nous n’avons pas croisé Didier Migaud à La Rochelle, c’est aussi à lui, en tant que président de la Commission économique de l’Assemblée nationale, qu’incombe d’établir une véritable commission d’enquête sur la crise financière, chargée d’aller fouiller dans les comptes des banques et de convoquer leurs responsables pour les confondre (signez l’Appel ici). La plupart des socialistes à qui nous avons parlé y sont plus que favorables. Ils comprennent très bien que ce sera le premier pas vers une réorganisation du système bancaire et que cela sifflera le retour de l’intérêt général aux commandes de l’économie. Certains militants de base étaient impressionnés par la liste d’élus qui soutiennent cet appel et pensent en faire davantage. Des socialistes de l’est de la France étaient stupéfaits et enthousiastes de voir l’engagement des maires ruraux à nos côtés, au-delà d’un parrainage, dans l’action politique quotidienne.

Cet engagement est d’autant plus urgent que la crise n’attendra pas le PS pour entrer dans sa phase terminale. « Faire face aux Ides d’octobre » était le titre des 1500 Nouvelle Solidarité distribués et en grande partie lus, certainement plus que lors de nos précédentes interventions. Lors d’une discussion avec un couple socialiste, le mari entreprit d’expliquer à sa femme le risque d’effondrement systémique d’octobre en reprenant point par point l’article de Jacques Cheminade. Un professeur d’économie, très à la gauche du parti, s’approcha de notre stand en disant : « J’ai lu l’analyse de Cheminade, il a raison ». Une autre militante était furieuse qu’aucun atelier sur l’effondrement d’octobre n’ait été programmé par la direction du PS. Comme beaucoup d’autres socialistes rencontrés à La Rochelle, elle reçoit notre « lettre du webmestre » et avait déjà lu l’article avant de venir.

Même les MJS

Même chez le Mouvement des jeunes socialistes (MJS), pourtant les plus grégaires et répandus en calomnies à notre encontre, se manifeste finalement une certaine curiosité pour nos idées. Se séparant de son groupe pour venir à nous, un jeune militant nous confia avec enthousiasme qu’il suivait régulièrement notre site et comptait parmi les signataires de l’Appel pour une nouvelle Commission Pecora. Si certains membres des MJS sont venus discuter avec nous, c’est souvent lorsqu’ils se promenaient seuls. Mais certains groupes, comptant pourtant parmi eux de nos calomniateurs patentés, se sont aussi arrêtés pour prendre quelques cours d’économie physique, domaine où ils n’ont absolument aucune formation. Même un jeune affilié au think-tank strauss-kahnien Terra Nova, obsédé par la monnaie, voulait à tout prix comprendre comment un système de crédit productif publique pouvait ne pas être inflationniste... il lui reste encore du chemin à faire !

La soixantaine de socialistes qui nous ont laissé leurs coordonnées pour poursuivre et mener la véritable bataille politique de notre époque, sont la source d’espoir d’une base socialiste non boboïsée, qui ne demande qu’à voir cesser le théâtre des positionnements et qui, surtout, est prête à jouer le rôle de pionnier que n’ont su endosser leurs dirigeants.

C’était notre sixième intervention aux universités d’été de La Rochelle, mais était-ce la dernière ? Si cette intervention 2009 était de loin le meilleur cru, nous n’avons pas toute la vie pour changer et attendre que le changement « arrive ». Que ce soit au PS ou ailleurs, que ce soit en France ou dans le monde, ceux qui combattent au nom d’un idéal supérieur de l’être humain forment une communauté d’idées, et il est urgent que nous triomphions, quoi que fassent les gens en place.


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