2-3 juillet 2011, conférence de l’Institut Schiller à Rüsselsheim, Allemagne

La créativité, de quoi parlons-nous ?

vendredi 22 juillet 2011, par Lyndon LaRouche

La créativité : de quoi parlons-nous ?

C’est réellement la question stratégique la plus importante que nous ayons à affronter aujourd’hui. Les capacités du genre humain sont absolument uniques. Nous ne connaissons pas d’espèce semblable dans l’univers, ayant existé ou pouvant y exister, bien que l’homme n’ait évidemment pas fini d’explorer des phénomènes comme la nébuleuse du Crabe ou d’autres parties semblables de cette fantastique galaxie au sein de laquelle nous évoluons, la Voie lactée. Peut-être existe-t-il ailleurs de nombreuses espèces douées de pouvoirs cognitifs, car le système solaire dont nous sommes issus est lui-même défini par ces processus galactiques et l’on commence à avoir quelques idées là-dessus.

Notre mouvement aux États-Unis a consacré ses travaux à cette question : depuis quand la vie existe-t-elle ? Depuis quand la vie existe-t-elle dans cette galaxie, ou en certains endroits de cette galaxie ? Quelle est la nature de l’homme, qui ne peuple cette planète que depuis quelques millions d’années, pour autant que l’on sache ?

Or, pour cette galaxie, on parle de milliards d’années, durant lesquelles sont apparus tous les processus vivants qui nous sont connus. Toute vie est créative, bien qu’il existe une part funeste dans cette histoire : 95 % des espèces vivantes connues se sont éteintes, car elles ont été défaillantes en leur temps. Se pose alors la question : pourquoi, alors que nous sommes entrés dans une période devant connaître de grandes extinctions de processus vivants, en cette phase du mouvement du système solaire dans la galaxie, pourquoi serions-nous assez présomptueux pour imaginer que l’espèce humaine n’est pas, elle aussi, sur le point de disparaître, comme c’est arrivé aux dinosaures lors de la grande extinction précédente ?

Qu’y-a-t-il de si particulier aux êtres humains, faisant en sorte qu’ils ne soient pas une espèce animale de plus, destinée à l’abattoir le moment venu ?

La réponse est… ou plutôt, la réponse est une question très peu connue. La plupart des gens n’en ont pas la moindre idée ! En fait, nos sociétés tournent avec des individus n’ayant pas la moindre idée de ce qu’est l’espèce humaine ! La seule explication qu’ils proposent est celle d’une espèce d’animal, avec des caractéristiques animales, plaisir et douleur et autres choses de ce genre, censées contrôler son comportement.

Pourquoi, dès lors, supposer que nous, l’espèce humaine, puissions prétendre survivre à la période d’extinction qui approche, suivant le cours du mouvement du système solaire évoluant au-dessus, en dessous et autour de la galaxie dans laquelle nous sommes ? Comment savons-nous que ce cycle de 62 millions d’années ne va pas emporter avec lui l’espèce humaine, comme il en a emporté plus d’une autre auparavant ? Et avant cela, et précédemment encore ?

Nous avons tous ces individus qui parlent de politique, de « sens pratique » et d’opinion publique, de différences de coutumes, etc. Et pendant ce temps, nous approchons d’une période de grande extinction, où tout ce qui nous concerne pourrait disparaître, alors de quoi nous soucions-nous ? Pourquoi nous inquiéter si nous devons disparaître ? Pourquoi combattre ?

Qu’y-a-t-il en nous qui n’existe pas chez les autres espèces connues et qui pourrait, d’une manière ou d’une autre, peut-être par miracle, éveiller pour notre espèce humaine une espérance que nous n’accordons à aucune autre espèce vivante ? Le nom de cette qualité spécifique, que nous reconnaissons dans l’espèce humaine et qui n’existe dans aucune autre espèce vivante connue, c’est la créativité, qui est absolument unique à l’humanité. Si vous n’êtes pas créatif, si vous ne comprenez pas ce qu’est la créativité, vous n’êtes pas apte à survivre ! Parce que la créativité ne vous sauvera pas, si vous ne vous en servez pas.

Tout ce qu’il vous reste à faire, c’est adopter une politique de croissance zéro. Une politique de croissance technologique zéro et je peux vous le garantir, votre extinction arrivera, elle sera livrée dans les temps ! Je ne sais à quel moment, mais très vite, par rapport au temps géologique et galactique.

Alors, pour quoi vivez-vous donc ? Pourquoi pensez-vous qu’il existe un futur pour votre espèce ? Pourquoi croyez-vous que vous devez avoir des petits-enfants ? Pourquoi les vôtres devraient-ils exister ?

Interrogez-vous : entendez-vous souvent la question que je viens de poser discutée dans la politique des nations ? Nous y voilà, c’est la chose la plus importante à prendre en considération pour quelque espèce que ce soit : son extinction et la possibilité de ne pas s’éteindre, possibilité qui nous est connue ou que nous pouvons connaître si nous ne le refusons pas obstinément. On l’appelle la créativité humaine, un phénomène qui n’existe en tant que créativité humaine, c’est-à-dire en tant que créativité volontaire, dans aucune autre espèce ayant jamais vécue, à notre connaissance.

L’espèce humaine, qui ne vit sur cette planète que depuis quelques millions d’années, a une qualité dont aucune autre espèce vivante n’a jamais fait la démonstration. Malheureusement, il n’existe qu’un intérêt limité pour ce sujet parmi les êtres humains. Ils parlent de créativité à tout bout de champ : un changement de mode vestimentaire par exemple, une nouvelle recette de cuisine, toutes choses que l’on considère comme des inventions, ou des découvertes de principes. Ça n’a rien à voir ! Que vous portiez vos fringues à l’envers n’a aucun rapport avec la question de l’existence des espèces ! Peut-être que ça vous amuse, mais c’est hors sujet pour ce qui concerne ce problème.

En revanche, l’humanité a une qualité, que nous connaissons et que nous pouvons bien connaître si nous le voulons, d’authentique créativité.

Toute vie est créative, toute forme de vie est créative. Elles ont été créées ainsi, chaque forme de vie que nous connaissons a été créée, par différenciation qualitative, à partir d’autres types d’espèces, pas nécessairement selon une unique lignée de création. La reproduction des espèces emprunte de nombreuses voies complexes, avec des croisements, des dérivés d’espèces. Nous avons pu étudier cela, dans notre groupe de recherche par exemple, à propos de l’histoire de la vie sur cette planète et dans cette galaxie, aussi loin qu’on a pu remonter dans le temps.

Toutes les espèces animales sont créatives, mais elles ne le sont pas volontairement . Elles portent la créativité en elles, mais elles n’en ont pas conscience, elles ne peuvent la contrôler ; elles ne peuvent pas choisir d’être créatives. C’est la créativité qui les choisit. Et lorsqu’il y a une grande extinction… regardez, la plupart des animaux qui vivent aujourd’hui à la surface de cette planète devraient probablement avoir péri, à part l’humanité. Pourquoi avons-nous ces animaux ? Parce que nous les avons promus, artificiellement pour ainsi dire. Nous voulons du bétail, nous élevons du bétail ! Vous voulez du lait, élevez des vaches. Si vous n’en élevez pas, allez au diable, vous n’aurez pas de lait !

Toutes nos denrées alimentaires, et beaucoup d’autres aspects de la vie animale et végétale, sont des choses que l’homme a choisies et reconnues comme nécessaires à l’humanité. Il les a cultivées, utilisées.

(…)

Lorsqu’une grande extinction se produit pour un certain nombre d’espèces ou séries d’espèces, c’est parce qu’elles ont épuisé toutes leurs options pour s’adapter à de nouvelles circonstances.

Il existe un autre aspect à ce processus, crucial pour comprendre ce que je viens de dire : l’existence de la vie, et particulièrement de la vie humaine, sur cette planète, dépend d’un degré naturel de créativité : c’est-à-dire une évolution vers le mieux, vers le haut. Il existe une évolution du comportement, sous forme d’adaptation, qui se produit lors de la création de nouveaux états de nature, automatiquement, dans le règne animal ou végétal.

Ensuite vient le moment où l’ensemble du système arrive à une limite, du fait de l’épuisement d’une certaine catégorie de ressources ou de l’émergence de nouvelles conditions dans la galaxie, telle une période galactique, lorsque notre système solaire atteint un nouveau bras de notre galaxie ou lorsqu’il évolue au-dessus du plan de notre galaxie, et non plus en dessous, où il est mieux protégé.

Nous avons découvert que, pour que l’humanité vive, nous devions accroître ce qu’on appelle « la densité de flux énergétique » dans l’activité humaine pour changer volontairement son environnement. Ainsi, l’humanité se distingue des autres espèces avant tout par l’usage volontaire du feu. Aucun membre du règne animal, aucun arbre, aucune forme de vie végétale, ne s’est jamais enflammé volontairement, n’est-ce pas ? La caractéristique de l’humanité est partie de la simple combustion du bois permettant l’existence humaine, pour aller vers des formes supérieures de combustion. Nous avons commencé avec des arbustes (ce qu’a très probablement fait notre ancêtre le plus lointain), puis, en passant par le charbon de bois, nous en sommes venus à la combustion de la houille, du pétrole, etc.

Tout au long de ce chemin, à chacune de ces étapes dont a dépendu le progrès de l’existence humaine, nous sommes passés à un degré supérieur de densité de flux d’énergie, c’est-à-dire de température à laquelle se produit la combustion. La capacité à maintenir la vie humaine, ainsi que sa croissance et son extension, reposent sur cet élan vers des niveaux toujours plus élevés de « densité de flux d’énergie ».

Nous sommes maintenant entrés dans une période où la perpétuation de la vie humaine sur cette planète, même sans aucun changement galactique, requiert bien plus que la fission nucléaire comme source d’énergie appliquée aux besoins de l’existence. Nous avons pénétré un territoire où l’énergie de fission nucléaire en elle-même n’est plus suffisante. Nous voici maintenant dans une période où la survie de l’humanité nécessite de recourir à la fusion thermonucléaire comme source d’énergie. Et au-delà, nous devons dès à présent penser à développer une autre technologie, appelée « réaction matière-antimatière ». Chacune de ces sources se caractérise par l’augmentation de la température à laquelle se fait la combustion, par l’accroissement de son intensité par unité de surface en son sein.

Vous devez comprendre qu’une société qui revient aux moulins à vent est une société condamnée. Une société de moulins à vent est une société qui se suicide ! ça ne vous laisse aucune chance [de survivre].

L’univers a une direction, la vie sur cette planète a une direction, qui, pour l’espèce humaine, est sa capacité à organiser ses forces productives à des niveaux supérieurs de densité de flux d’énergie. Au point où nous en sommes, si nous ne voulons pas d’énergie nucléaire ni de fusion thermonucléaire, nous ne sommes pas aptes à survivre en tant que société. Car pour pérenniser l’humanité aujourd’hui, nous ne pouvons plus dépendre du charbon, du pétrole, et encore moins des moulins à vent ! C’est une idée digne de don Quichotte !

Tout dépendra de l’énergie nucléaire et thermonucléaire, sinon la société ne pourra pas survivre.

L’autre aspect de cette histoire, l’idée qu’il y aurait « une limite à la croissance », est une forme de folie criminelle. Il n’existe aucune limite au progrès, aux capacités de l’espèce humaine, qui peut toujours développer des technologies supérieures. Regardez l’univers, là dehors ! Regardez notre système solaire ! Qu’est-ce qui anime le soleil ? Quelle a été l’évolution de notre soleil ? Quelle a été l’évolution de notre galaxie ? Qu’est-il arrivé à la nébuleuse du Crabe, récemment dans la galaxie ? Il y a eu un changement qualitatif. Que veut dire ce changement ?

L’univers est créatif

La galaxie est créative ! Le système solaire est créatif ! L’humanité est intrinsèquement créative, et une humanité qui retourne à des densités de flux énergétique primitives – comme brûler ce qui nous tombe sous la main, ou les moulins à vent – est une culture qui a décidé de se détruire elle-même, de disparaître de cette planète.

Mais comment fait-on ces découvertes ? Les plantes, les animaux font des découvertes, d’une certaine manière, mais ils sont limités. Qu’est-ce qui différencie l’espèce humaine ?

Comment aborder ce problème ? Quelle est cette chose appelée « créativité » ? La véritable créativité, et pas l’innovation, comme de porter son pantalon à l’envers…

L’esprit humain (que je n’ai pas encore défini ici) a un pouvoir de créativité proprement et naturellement consubstantiel à l’espèce humaine. Le potentiel est là, à moins qu’il n’y ait, par exemple, des dysfonctionnements sérieux du système biologique de l’enfant, ou quelque traumatisme qui stoppe ce processus ; sinon, les êtres humains sont naturellement créatifs. Cela veut dire que nous sommes capables de découvrir des principes allant bien au-delà de tout ce que nous pouvons savoir par nos perceptions sensibles. L’homme est d’autant plus fou qu’il croit que ces cinq sens déterminent ce qu’il est. La véritable créativité a un tout autre aspect.

Par exemple en science physique, le plus connu, généralement, est son modèle thermodynamique : l’humanité a été capable de découvrir la fission nucléaire contrôlée, comme le feu, et d’autre chose avant cela. Mais comment ça marche ? Sous quelle forme cela se produit-il ? Qu’est-ce que la créativité ? Comment la reconnaître en nous-même ?

Le problème est là : qu’est-ce qui nous rend stupide ? Pourquoi nous comportons-nous la plupart du temps comme des idiots ? Parce que nous croyons en nos perceptions sensorielles, nous croyons que l’expérience de nos seuls cinq sens est le test de la réalité ! Ça, c’est une affaire de singe, pas une affaire d’humain ! Les singes y croient et ils y croiront toujours. Mais si les êtres humains le font, cela en fait des singes.

Nous n’avons pas cinq sens. Lorsque naît le bébé, le bébé humain, lorsqu’il est conçu, s’il n’a subi aucune lésion, il a ce qu’on appelle « cinq sens ». De ce point de vue, nous avons quelques avantages sur les espèces animales, mais aussi quelques déficiences. Par exemple, si vous tentiez de voler comme un oiseau, il ne vous manquerait pas seulement des ailes, vous n’êtes pas né avec. Vous pouvez toujours vous aérer les aisselles en agitant les bras de cette façon, mais ce n’est pas ça qui vous permettra de voler de vos propres forces ! Ça n’est pas inhérent à notre espèce. L’oiseau, lui, sait quelque chose que vous ne savez pas : il sait comment voler vers le nord ou le sud. Il est adapté à une perception sensorielle lui permettant de suivre une certaine direction dans le champ de radiations cosmiques et, sauf en cas de perturbations dans ce champ de radiations, il gardera le cap.

C’est la même chose avec les poissons. On voit ces bancs de poissons qui s’échouent sur la côte pacifique en Californie, cela arrive parce que les poissons trouvent leur route dans les océans grâce aux courants de radiations cosmiques, et lorsque les courants dévient, ces pauvres poissons viennent s’agglutiner dans une anse de Californie, épuisent tout l’oxygène de l’eau et meurent en masse, entassés dans une petite surface et incapables d’en sortir.

Les cochons ont un véritable flair pour les tremblements de terre. Les Chinois l’ont compris et utilisent cette aptitude pour anticiper les tremblements de terre. Beaucoup ont eu la vie sauve, dans certaines circonstances, en écoutant ce que le cochon avait à dire, parce qu’il crie, pour ainsi dire, que le tremblement de terre arrive. Les Chinois écoutent leur cochon et déplacent les populations des zones les plus exposées.

Aujourd’hui, en nous intéressant aux tremblements de terre, nous avons appris à apprendre quelque chose des bêtes : nous avons appris à reconnaître qu’il existe certaines aptitudes que l’on peut recréer artificiellement. Nous ne les avons pas en nous mais nous avons un esprit. Nous sommes capables de développer certains instruments et d’en reconnaître certains qui, dans le champ des radiations cosmiques, nous indiquent ce qui se passe.

Nous parlons généralement de « découvertes de principes physiques universels » pour évoquer ce qui est arrivé à l’humanité et de quelle façon elle a réalisé ces grands changements. Cela veut dire que les cinq sens sont passés de mode depuis longtemps déjà. Non pas qu’on ne les utilise plus, mais si vous croyez dans vos cinq sens, cela ne donnera pas une société capable de survivre. Parce que nous dépendons – ô combien ! – de ce type de découverte. Par exemple, la découverte du principe de gravitation, accomplie par Johannes Kepler, constitue une découverte d’un principe universel, qui a influencé de nombreux autres domaines de recherche.

Avec le développement du nucléaire, et particulièrement avec les travaux de la NASA, l’humanité a conquis l’espace proche et commencé à y déployer des instruments. Nous dépendons aujourd’hui de nombreux instruments synthétiques et autres sortes d’instruments électroniques, mais surtout de découvertes de principes physiques précis. Nous commençons à utiliser les principes physiques et chimiques comme s’il s’agissait d’organes sensoriels ! Nous pouvons prédire la probabilité de tremblements de terre dans certaines régions. Si nous disposions de davantage d’instruments, et de meilleurs, nous pourrions faire des approximations de plus en plus précises de ce genre de phénomène.

De quoi s’agit-il ici ? De la différence entre l’homme et l’animal. Chaque type d’espèce possède son propre dispositif sensoriel ; l’humanité est capable d’acquérir volontairement ces pouvoirs sensoriels additionnels, ces perceptions.

Le problème auquel nous sommes confrontés se résume à cet individu typique, dans cette société vraiment mal informée, pour qui la vérité se définit selon les preuves apportées par les cinq sens naturels communs à l’humanité – ce qui est faux. Si nous croyons que nos cinq sens, avec notre cerveau compris comme une fonction de ces cinq sens, définissent l’esprit humain, nous ne faisons pas encore partie de l’humanité. Ou du moins, ne savons pas encore ce que c’est qu’être humain.

Prenons le cas de la musique : l’une des principales causes pour lesquelles les individus sont devenus stupides vient du Congrès pour la liberté de la culture (CLC), qui a décrété que la méthode de composition artistique classique était inappropriée. Nous voulons suivre nos instincts, caresser nos organes, ou ceux d’un autre, ou autre chose, n’est-ce pas ? C’est devenu un comportement commun aujourd’hui. Et nous ne le reconnaissons pas comme une croyance en nos cinq sens ; le fait de tester avec les seuls cinq sens, nous tendons à croire que cela équivaut à une démonstration de la réalité. Ce serait plutôt une démonstration de la capacité à mourir, et à mourir vite. Car si vous croyez dans les cinq sens, si vous pensez que les nations ne peuvent pas prévoir les tremblements de terre, vous mettez en péril l’existence de la race humaine ! Car nous nous dirigeons dès à présent vers une ère de tornades, de tremblements de terre, et ça va aller en s’accroissant. Nous entrons dans une période galactique où nous allons rencontrer une recrudescence de tremblements de terre et autres phénomènes similaires, et de plus grande ampleur. Si nous ne reconnaissons pas la possibilité de prévoir ces tremblements de terre et de nous mobiliser pour protéger l’humanité contre ces phénomènes, de concevoir nos villes, notre organisation sociale de façon à pouvoir y résister dans les zones sismiques, nous allons assister à une destruction des cultures à laquelle nous ne survivrons pas.

Si nous n’allons pas plus loin dans notre compréhension du fonctionnement de notre système solaire et de notre galaxie, en comprenant la dynamique de leurs radiations, nous serons incapables de concevoir des méthodes pour protéger l’humanité contre certains types de ces radiations et leurs effets. Souvenez-vous que l’humanité vit dans un spectre de radiation très étroit (en terme de perception sensorielle) du système global. Et si nous nous déplaçons vers des zones de radiations au-delà de celles pour lesquelles nous sommes adaptés, nous allons mourir !

Ainsi, le progrès de la science, découlant des considérations que je viens d’établir, nous montre comment l’humanité peut survivre aux évènements que nous pouvons anticiper. Mais cela montre quelque chose de bien plus important encore, qui, une fois de plus, nous ramène à la musique classique, à l’opposé de toute cette saleté qui nous est proposée en permanence, ou de l’utilisation d’un diapason trop élevé, qui est un autre moyen de détruire la capacité humaine de créativité. On cherche une fonction naturelle, un accordement naturel ! Dans l’esprit humain, la voix humaine en est une. Si vous l’abordez convenablement, il vous vient une affinité naturelle pour cela. Comme le dirait Fürtwangler : le secret de la musique, de la composition musicale, ne réside pas dans les notes mais dans « l’entre les notes », comme Bach l’a illustré avec toute son oeuvre.

Alors, être humain, qu’est-ce donc ? Qu’y a-t-il, dans notre espèce, de potentiellement humain, de naturellement humain, qui nous permettra de survivre là où aucune autre espèce animale ne le peut d’ordinaire. Nous sommes capables de développer une forme d’esprit qui ne soit pas délimitée par la notion des cinq sens originels. Or, c’est lorsque nous allons au-delà, dans des domaines supérieurs, lorsque nous accordons l’orientation de notre esprit à des expérimentations qui appellent ce genre de processus, que l’humanité manifeste ce qui la distingue véritablement des autres espèces. Cela démontre une potentialité, dans la capacité de l’humanité à survivre, dont aucune autre espèce ne peut se prévaloir, nécessaire pour réaliser le type d’adaptation grâce auquel l’homme peut assurer sa survie : c’est ce qu’on appelle la créativité !

Comment survient-elle ? La créativité n’arrive jamais par les mathématiques. Les mathématiques sont intrinsèquement non créatifs , car ils ont leur origine dans le témoignage des sens. C’est pourquoi Riemann préconise de quitter le département des mathématiques si l’on souhaite pratiquer la physique ! Si vous vous fiez aux mathématiques, cela prouve que vous ne pensez pas de façon réellement humaine.

La société humaine est aujourd’hui gouvernée par des règles de comportement et des opinions communément acceptées, se bornant à présumer que la vérité est définie par le témoignage de nos cinq sens. Il existe bien sûr quelques cas d’individus qui, malgré des fonctions sensorielles défaillantes, ont acquis une intelligence supérieure. Cela nous montre que l’être humain, doué d’un esprit humain, peut synthétiser d’autres voies pourvoyant à la perte de ses capacités sensorielles.

C’est ce qu’on appelle la créativité. Mais cela pose aussi la question : où réside l’esprit ? Il ne se trouve pas dans les cinq sens. Il réside dans ces caractéristiques conscientes et volontaires de l’esprit humain, situées au-delà des perceptions sensorielles, qui suggèrent une conception de la nature de l’esprit ne correspondant pas nécessairement à l’apparence physique suggérée par nos cinq sens. En d’autres termes, ce à quoi nous ressemblons n’est peut-être pas ce que nous sommes. De fait, nous savons que notre apparence n’est pas ce que nous sommes. Pour certains d’entre nous, c’est quelque chose qu’on est heureux d’entendre dire, n’est-ce pas ? Nous ne sommes pas à blâmer pour notre apparence ! Car il est certain que du point de vue de l’esprit, nous apparaissons très différemment de ce à quoi nous ressemblons du point de vue de nos cinq sens.

Nous avons pourtant tendance à rester prisonniers de conceptions élaborées à partir de nos cinq sens. Cela nous cache le fait que c’est dans le domaine de ces idées, qui complètent, et même supplantent les perceptions sensorielles naturelles, que s’opère la distinction entre l’espèce humaine et les autres espèces animales.

Où réside donc ce pouvoir créatif ? Non pas dans les mathématiques, car c’est un système conçu sur l’hypothèse des cinq sens. Aucun physicien compétent ne dépend des mathématiques, même s’il les utilise.

La créativité siège dans l’imagination créatrice. Elle réside dans le principe de métaphore, dans ce que l’on appelle « la composition artistique classique », qui est la forme disciplinée de l’imagination créatrice. Prenons deux exemples : les cas de Max Planck et d’Albert Einstein, deux individus hautement créatifs. Comment se manifeste cette créativité ? Pour Planck, c’était un bon musicien, un musicien professionnel, et un scientifique professionnel. Idem pour Einstein.

C’est dans le domaine classique, celui de la pensée expérimentale, que réside la créativité. C’est pour cette raison que lorsque nous avons formé l’organisation de jeunes, John Sigerson et moi avons insisté là-dessus : étant donné la dégénérescence de la culture populaire, y compris la culture « éduquée » ou « cultivée », dans notre société, en musique comme dans toute composition artistique classique, si nous ne nous attachons pas à développer la personnalité au sein d’un groupe, à travers la participation à une composition artistique classique, nous ne parviendrons pas à développer un esprit humain compétent, apte à assumer ses fonctions. Nous ne pourrons faire face à la pression de la corruption sociale, ni éviter la dégénérescence dans des formes populaires de divertissement qui détruisent le moral de notre population !

Vous devez comprendre que la créativité réside hors du domaine des perceptions sensibles, exactement comme le soutient Riemann dans la conclusion de sa dissertation d’habilitation : « Il nous faut maintenant quitter le département des mathématiques et aller vers une autre science, appelée la physique. » C’est le fondement de tout cela, et c’est à travers le processus métaphorique, par lequel nous acquérons la connaissance expérimentale et l’usage de principes résidant hors du domaine des certitudes sensibles, que l’humanité se distingue des bêtes. La science physique ainsi conçue nous apprend à utiliser ces capacités, mais si vous voulez voir émerger parmi vos enfants un grand physicien, essayez la composition musicale classique comme un bon moyen pour y parvenir.

C’est le génie propre à la composition musicale classique, du moins sous les meilleurs aspects que nous en connaissons. A peine commençons-nous à connaître le langage, tel le langage musical, comme peut en connaître une personne civilisée, nous nous trouvons réceptif, attiré par sa puissance et capable de distinguer, presque instinctivement, ce que nous entendons par cette musique. Penchons-nous maintenant sur le problème de l’ironie, en prenant le cas de la fugue de Bach comme démonstration parfaite de cela : vous pouvez tout démontrer par ce principe.

Il s’agira donc de rendre la population sensible à cet aspect de l’esprit humain, où siège la créativité humaine. Cet aspect de l’expérience humaine, la culture artistique classique en tant qu’expression du principe de métaphore, est le principe même de découverte, fondée sur un principe. Il en est de même lorsque vous utilisez ce type de pensée dans le domaine de la science physique. Vous avez là un exemple du rôle de la composition musicale classique, comme l’illustrent les cas de Max Planck et d’Einstein en particulier, et aussi de Vernadski. Vous avez là la démonstration que c’est dans le domaine de la composition artistique classique que l’esprit expérimente la découverte de principes et exprime son appétit pour ce type de résultat expérimental, comme aiguillon de la créativité pour l’esprit humain. C’est la créativité. Elle réside hors des sentiers battus, hors des habitudes de la vie.

C’est seulement lorsque l’on tente de s’harmoniser avec cela, ce qui, dans un premier temps, peut nous paraître fugace – « qu’est-ce que cela veut dire ? » demande l’enfant. On tente de lui expliquer, parfois en lui demandant de chanter. Vous reconnaissez alors qu’il a un sens de cela, vous le ressentez. Ensuite, vous allez vous emparer d’une grande pièce de Shakespeare, ou d’une tragédie de Schiller, et vous découvrez que ça marche de la même façon ! L’imagination éveillée dans l’auditoire, qui est l’élément créatif, devient manifeste.

Voilà cette question dépeinte de façon élémentaire (j’aurais encore beaucoup à dire, bien sûr), mais pour vous exposer dans un bref laps de temps ce dont il s’agit, ce sur quoi s’est concentrée toute ma vie, jusqu’à ce jour, c’est tout simplement cela : la composition artistique classique, la fonction de la métaphore, dans son usage classique, où l’on trouve la faculté de créativité. Pas dans la science physique, pas dans les mathématiques. On la trouve par rapport à la science physique, mais pas dans la science physique. On la rencontre dans l’imagination – l’imagination classique, telle qu’elle se manifeste dans le travail de Platon par exemple : hypothétiser l’hypothèse supérieure, aller hors des dimensions présentes de la cognition humaine, pour ouvrir, expérimentalement, une nouvelle avenue possible, ce qui est la véritable créativité. Rien que cette extension…

C’est en cela, dans cette sensibilité aux sens que nous n’avons pas mais qui existent dans l’univers, que nous découvrons comme existant dans l’univers (nous pouvons même créer un principe nouveau dans l’univers, cela a déjà été fait !), c’est lorsque nous pensons en ces termes, plutôt qu’en termes de vulgaires arguments, interprétations et autres, qui ne veulent absolument rien dire au final, que réside la créativité.

Le problème aujourd’hui avec la créativité, c’est que la plupart des individus n’ont pas la moindre idée de ce que c’est. Ils peuvent avoir des opinions, faire des descriptions de ce qu’ils pensent connaître… mais vous découvrirez que la plupart ne tiennent pas la route.

Vous revenez alors à quelques principes fiables, comme dans le cas de Bach, parfaitement accordé, et vous voilà tout à coup, lorsque vous avez cette idée, dans le royaume de la tentation de faire des découvertes. Vous vous interrogez sur ce que vous entendez : pourquoi ? Comment ça marche ? Pourquoi est-ce que ça marche ? Pourquoi sommes-nous influencés par ça ?

Et pourquoi se retrouve-t-on vivant, non pas dans un monde de cinq sens, mais dans un monde d’imagination dans lequel nous faisons des découvertes, qui n’ont rien de perceptions sensorielles. Comme la découverte de la gravitation de Kepler fut une contradiction entre deux choses : l’une, la faculté de vision, la conception de l’organisation des orbites des planètes, mais cela ne rendait pas compte de leur mouvement. Alors Kepler fit appel aux « harmoniques ». Et il se rendit compte qu’il y avait, dans un sens, un système d’harmoniques très compliqué qui définissait la marche des orbites !

C’est donc en examinant le contraste entre les produits des perceptions sensorielles, l’une, la vision, laissant apparaître la façon dont les orbites étaient organisées ; l’autre, les harmoniques, un sens complètement différent de la vision. Le contraste entre la vue et les harmoniques, en tant que principes de perceptions sensorielles, à travers leurs contradictions, manifeste un principe qui n’est pas une perception sensorielle. Le principe de gravitation, découvert par Johannes Kepler en s’appuyant sur les considérations de Nicolas de Cues, fut une découverte d’un principe physique universel, qui n’existe ni dans le domaine de la vue, ni dans celui des harmoniques, mais qui est un principe indépendant de la perception sensorielle : c’est la connaissance de choses indépendantes des perceptions sensorielles humaines, qui est la clef du processus de découverte.

Le problème de la société aujourd’hui vient du fait que cette précieuse connaissance, que je considère personnellement comme précieuse du fait de l’expérience que j’en ai, est le secret de l’humanité. Elle nous inspire un sens d’intention, de but, qui nous appelle vers la découverte, la découverte de principes universels, d’action physique ou autre, qui ne peuvent être définis selon les modalités des perceptions sensibles.

Ce qui vous émeut dans la belle musique, dans une grande interprétation, n’est pas la perception sensorielle que vous en avez : c’est une chose qui réside en un lieu indépendant des perceptions sensorielles, qui vous agrippe parce que cela vient du dehors du royaume des sens ! Il y a quelque chose de magique et de mystérieux dans les grandes représentations musicales par exemple, car c’est un contraste entre de nombreuses activités sensorielles ; vous y trouvez quelque chose qui vous saisit comme rien au monde, et vous ne pouvez définir un seul sens qui en soit responsable ! Cela paraît magique ? Nullement ! C’est véritablement humain.