Les analyses de Jacques Cheminade

DSK et sa « nouvelle économie »

mardi 11 mai 1999, par Jacques Cheminade

Dominique Strauss-Kahn ne craint pas d’affirmer que « la France est en train d’entrer dans un nouveau régime de croissance, plus durable car porté par les nouvelles technologies, comme cela s’est passé aux Etats-Unis ». Il a tout faux.

Tout d’abord, la réalité. Il n’y a pas eu depuis vingt ans de croissance de l’économie américaine mais, en terme physiques, contraction. Si le produit intérieur brut (PIB) a, lui, augmenté, c’est parce qu’il comprend des opérations financières et commerciales qui amènent artificiellement de l’argent, mais n’entraînent aucun développement et, pire encore, extraient de l’argent au détriment du développement.

Ce « système américain » repose sur quatre choses : une politique monétaire « expansionniste », avec un dollar bas, la « flexibilité » du travail (salaires bas et vulnérables), le boom boursier grâce à l’emprunt et une hausse des investissements grâce aux technologies de l’information.

En France, on écope du pire. Tout d’abord, on a une politique monétaire expansionniste (l’argent qui va à l’argent) et une politique budgétaire restrictive (moins de dépenses publiques pour le bien commun). Ensuite, on a obtenu la flexibilité : les 400 000 emplois créés en 1998 sont en grande majorité des CDD, l’intérim bat des records et les salaires d’embauche des jeunes diplômés ont baissé de 30% en quelques années.

Les 35 heures devenues une escroquerie sociale permettront aux entreprises d’aller encore plus loin. Enfin, la Bourse monte « à l’américaine », formant une immense bulle spéculative.

Quant à l’investissement, les dernières enquêtes d’opinion de l’INSEE montrent qu’il n’est "pas près de prendre le relais de la consommation".

En ce qui concerne l’environnement général, même le rapport sur les prévisions économiques du FMI estime qu’une « correction boursière sévère est très concevable, vu le niveau élevé de la valeur des titres relativement aux résultats financiers actuels et attendus des sociétés. »

Patrick Artus, de la Caisse des dépôts et consignations, reconnaît que « la prochaine crise financière sera beaucoup plus grave (que les crises asiatique et russe) car ce sera la crise du dollar et de l’ensemble du système monétaire international ».

John Crowley, dans Sans épines, la rose (éditions La Découverte), affirme que Tony Blair et Lionel Jospin sont, dans les faits, bonnet blanc et blanc bonnet. Ce n’est pas entièrement vrai, mais si l’on s’en tient à DSK seul... En tous cas, les réunions informelles à Bercy se sont auto-baptisées « Chatham House » (coeur de l’oligarchie londonienne).