Hussein Askary : Un plan de développement révolutionnaire pour les proche et moyen-orient

mercredi 5 décembre 2012

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[sommaire]



Résumé

(Voir transcription complète plus bas ou cliquez ici.)

L’orateur, un Iraquien vivant en Suède, a présenté les perspectives à avoir à l’esprit pour résoudre la situation aux Proche et Moyen-Orient et y établir une paix durable. Pour cela, il a repris l’approche de l’économiste et homme politique américain Lyndon LaRouche, selon laquelle la seule voie viable pour instaurer la paix entre les peuples de la région passe par un plan de développement économique mutuel. Cette proposition de LaRouche, présentée pour la première fois à Bagdad en 1974, est connue sous le nom de « Plan Oasis », en particulier du fait qu’elle est centrée sur le développement de nouvelles ressources en eau, source récurrente de conflit dans cette région.

Ces nations aujourd’hui en guerre doivent être considérées comme des Etats-nations souverains, quelle que soit leur attitude actuelle. Askary a bien insisté sur la condition préalable à ce projet, en termes de principes : la nature humaine « ne consiste pas à rivaliser, comme le prétend l’économie d’aujourd’hui, ni à se venger d’anciennes injustices politiques, ni à gagner des terres en les prenant aux autres ».

De nombreux projets dorment, ou pour certains d’entre eux sont en cours de réalisation, qui permettraient de s’attaquer au désert et à ce que cela implique. Mais de petits projets disséminés ici ou là, comme ceux de l’ONU, de la FAO et de l’UE, s’avéreront toujours un échec, aussi bons soient-ils en eux-mêmes. Il faut un plan d’ensemble, impliquant une coopération régionale entre nations, pour attaquer simultanément le désert sur tous les fronts.

Le désert, une menace commune

Askary a commencé par montrer des images satellites de la NASA et de l’ESA, décrivant la trajectoire et l’évolution des tempêtes de sable et de poussière, fréquentes dans ces contrées. Elles naissent dans la région située entre l’Iran et la Syrie, puis descendent tout en gagnant en force, poussées par des vents venus de zones à haute pression qui rencontrent des zones à basse pression, pour finir dans la mer d’Arabie. L’enjeu est donc, grâce aux technologies spatiales, d’attaquer ces tempêtes dès leur naissance pour les neutraliser.

Pour affronter cette menace régionale commune qu’est le désert, il faut le faire reverdir et le rendre hospitalier, ce qui nécessite de l’eau en abondance. Askary a donc défini les sources d’eau éventuellement disponibles : les hydrologies de surface et souterraine et le dessalement de l’eau de mer. « A terme, l’enjeu est de permettre au cycle hydrologique naturel d’acquérir un rythme de vie qui lui soit propre. »

L’hydrologie de surface

Askary a présenté de nombreux projets dans ce domaine, dont notamment :

  • le canal Sibaral, qui consiste à détourner les eaux de l’Ob et de l’Irtych, en Russie, vers la mer d’Aral, grâce à un barrage à leur confluence et à un canal de 2550 km, permettant à terme un transfert de 60 km³ d’eau ;
  • le « fleuve d’Iran », pour transformer les deux dépressions désertiques du pays en immenses lacs d’eau salée, dans l’espoir qu’ils modèrent le climat et, grâce à des unités de dessalement, fertiliser de nouvelles terres arables ;
  • le « pipeline de la paix », suggéré dans les années 1980 par le gouvernement turc dans le cadre du processus de paix israélo-arabe. Ignoré par les Etats-Unis et l’Europe, il prévoyait le transfert des eaux des fleuves Seyhan et Ceyhan par deux pipelines distincts : l’un à l’ouest, de 2700 km et passant par la Syrie, la Jordanie, Israël, la Palestine et l’Arabie saoudite, et l’autre à l’est, de 3900 km, traversant la Syrie, l’Irak, le Koweït et les autres Etats du Golfe. Ils pourraient transporter 16 millions de mètres cubes d’eau par jour.

L’hydrographie souterraine

Deux scientifiques sont connus pour ce qu’ils ont appelé le modèle de Grand bassin hydrographique : Robert A. Bisson, coauteur du modèle d’Exploration des grands bassins hydrographiques (Megawatershed Exploration) avec Farouk El-Baz, le scientifique américano-égyptien de la NASA qui avait cartographié la Lune pour y déterminer des sites d’atterrissage. Ils contredisent la conception traditionnelle des eaux souterraines, qui veut que la pluie tombe au sommet des montagnes, que sa majeure partie disparaisse par ruissellement et évaporation, tandis qu’une faible partie s’infiltre sous terre pour former ce que l’on appelle les aquifères horizontales.

Bisson et El-Baz estiment que la plupart des précipitations ont lieu dans les régions supérieures des montagnes, c’est-à-dire là où il nous est le plus difficile d’effectuer des mesures. De ce fait, 80 % des pluies ne seraient pas prises en compte. Celles-ci s’infiltreraient à travers un vaste réseau de fissures et de failles, créées lors de la formation des chaînes de montagnes, ainsi que par les activités tectoniques et sismiques continues, pour s’écouler verticalement plus profondément que les aquifères horizontales et sur de plus grandes distances, donnant naissance à des rivières souterraines pouvant s’étendre sur des dizaines de milliers de kilomètres carrés, dont nous ne tiendrions pas compte dans nos estimations. L’on pourrait donc trouver de l’eau souterraine en des endroits complètement inattendus. Pour leurs recherches, ils s’appuient sur la cartographie par télédétection, une technologie spatiale.

En 2006, pendant la crise du Darfour, Farouk El-Baz a visité le Soudan pour y présenter son étude. « Le conflit au Darfour, au départ, n’est pas d’ordre politique : il l’est devenu suite au rôle des Britanniques et de leurs supporters aux États-Unis. Il s’agissait initialement de différentes tribus, sédentaires et nomades, s’affrontant pour l’eau. » El-Baz a montré que sous le Darfour s’étend un grand lac, d’une taille proche de celle du lac Érié aux États-Unis, proposant d’y creuser immédiatement un millier de puits afin d’y pomper de l’eau pendant au moins cent ans.

Le dessalement de l’eau de mer

Il est désormais parfaitement clair pour les gouvernements du Golfe et d’autres régions arides dans le monde, que la meilleure solution pour garantir l’approvisionnement en eau pour les consommations domestique, urbaine et industrielle, consiste à dessaler l’eau de mer. D’importantes mesures ont été prises par les pays de la région pour construire des unités de dessalement conventionnelles à grande échelle, en investissant généreusement dans une combinaison de processus de dessalement d’eau et de production énergétique, recourant au gaz naturel et au pétrole.

Plus des deux tiers de la production mondiale d’eau potable par dessalement se font dans la région. L’Arabie saoudite, à elle seule, en produit 25 millions de mètres cubes par jour et les Émirats arabes unis environ 3 millions. Cependant, ces pays devront plus que doubler ces niveaux au cours de la prochaine décennie et les tripler la suivante.

Le problème majeur de ces prévisions tient au choix des énergies. L’Arabie saoudite utilise 1,5 millions de barils de pétrole par jour pour produire l’électricité et la chaleur requises pour le dessalement. Non seulement le coût, mais aussi la charge de la production physique et l’impact environnemental qu’impliquent le doublement et le triplement du dessalement sont à prendre sérieusement en compte. En outre, c’est une perte économique physique nette, dans le sens où ces matières premières, qui pourraient servir à la production pétrochimique au lieu d’être brûlées, ne peuvent rivaliser avec l’énergie nucléaire, en termes de densité de flux énergétique.

L’Institut Schiller avait proposé de coupler des unités de dessalement à des centrales nucléaires : on appelait cela les « nuplexes ». Cette idée n’est pas neuve : pendant la présidence d’Eisenhower, l’une des idées en vogue pour résoudre la crise israélo-arabe consistait à prêter assistance à l’Egypte, à Israël et aux autres pays en construisant de petites centrales nucléaires pour dessaler l’eau de mer. Car la plupart des guerres entre Israéliens et pays arabes n’ont pas pour origine des questions religieuses, mais des questions relatives au contrôle de l’eau. Gaza en est un exemple.

Selon un rapport de l’ONU publié en octobre, Gaza ne serait plus vivable en 2020, du fait de l’épuisement des aquifères. En effet, celles-ci, peu profondes et bordant la mer, sont contaminées par les eaux usées des habitants et le sel s’y répand. Les gens tombent malades en la buvant. Gaza a donc un besoin immédiat d’une unité de dessalement pour produire 500 millions de mètres cubes d’eau potable par jour.

Selon les études de l’Agence internationale à l’énergie atomique (AIEA), les réacteurs nucléaires de taille moyenne sont appropriés pour le dessalement, en cogénération d’électricité, utilisant la vapeur à basse pression de la turbine et l’alimentation en eau de mer du système de refroidissement final.

De nouvelles technologies sont étudiées dans ce domaine, montrant toutes qu’il faut atteindre des niveaux de température et de pression supérieurs pour qu’elles deviennent vraiment intéressantes, ce que l’on ne pourra réaliser efficacement qu’avec l’énergie nucléaire. Si les réacteurs nucléaires à haute température de quatrième génération se sont avérés depuis longtemps les plus efficaces, les efforts consentis pour investir dans ce domaine sont presque nuls.

La politique agricole

C’est une chose d’avoir de l’eau, c’en est une autre de savoir comment l’utiliser sous forme concentrée, afin d’en tirer le plus grand profit. Il faut s’orienter vers de nouvelles technologies agricoles et d’irrigation, y compris dans le domaine de la biogénétique, afin de développer de nouvelles formes de plantes, de graines et d’arbres résistant mieux au climat et davantage capables de retenir l’eau.

Une technique très efficace, utilisant l’effet de serre, est l’hydroponie. L’on n’a pas besoin de sol. Les graines sont semées dans des conteneurs en plastique ou en fibres, remplis d’une eau enrichie en minéraux dont la plante a besoin. C’est efficace, rapide et très productif. Un autre système est l’aéroponie : on maintient les graines en suspension et l’on arrose directement les racines avec de l’eau riche en minéraux. On économise ainsi beaucoup d’eau : l’eau qui s’évapore dans la serre est recyclée. Les statistiques démontrent l’efficacité de ces méthodes, comparées à la culture en plein air.

« Au Moyen-Orient, il est commun d’inonder le champ d’eau : les plantes prennent ce qu’elles peuvent, le reste va à Dieu. Ou à l’évaporation. Ces technologies modernes sont utilisées en Australie, en Israël et ailleurs, et nous devons absolument nous en doter. » L’on pourrait ainsi économiser autour de 90 % de l’eau habituellement utilisée.

Askary a conclu en revenant sur la volonté politique nécessaire pour mettre ces projets en oeuvre. « Ce cercle vicieux peut et doit être brisé. Cela requiert au préalable certaines conditions globales, bien sûr, notamment de rejeter le système géopolitique meurtrier actuel qui repose sur la devise « diviser pour mieux régner », et restructurer le système financier et bancaire. Ces deux éléments seront le signal donné à ces nations pour changer d’état d’esprit : passer de la destruction à la construction. »

L’orateur, un Iraquien vivant en Suède, a présenté les perspectives à avoir à l’esprit pour résoudre la situation aux Proche et Moyen-Orient et y établir une paix durable. Pour cela, il a repris l’approche de l’économiste et homme politique américain Lyndon LaRouche, selon laquelle la seule voie viable pour instaurer la paix entre les peuples de la région passe par un plan de développement économique mutuel. Cette proposition de LaRouche, présentée pour la première fois à Bagdad en 1974, est connue sous le nom de « Plan Oasis », en particulier du fait qu’elle est centrée sur le développement de nouvelles ressources en eau, source récurrente de conflit dans cette région.

Ces nations aujourd’hui en guerre doivent être considérées comme des Etats-nations souverains, quelle que soit leur attitude actuelle. Askary a bien insisté sur la condition préalable à ce projet, en termes de principes : la nature humaine « ne consiste pas à rivaliser, comme le prétend l’économie d’aujourd’hui, ni à se venger d’anciennes injustices politiques, ni à gagner des terres en les prenant aux autres ».

De nombreux projets dorment, ou pour certains d’entre eux sont en cours de réalisation, qui permettraient de s’attaquer au désert et à ce que cela implique. Mais de petits projets disséminés ici ou là, comme ceux de l’ONU, de la FAO et de l’UE, s’avéreront toujours un échec, aussi bons soient-ils en eux-mêmes. Il faut un plan d’ensemble, impliquant une coopération régionale entre nations, pour attaquer simultanément le désert sur tous les fronts.

Le désert, une menace commune

Askary a commencé par montrer des images satellites de la NASA et de l’ESA, décrivant la trajectoire et l’évolution des tempêtes de sable et de poussière, fréquentes dans ces contrées. Elles naissent dans la région située entre l’Iran et la Syrie, puis descendent tout en gagnant en force, poussées par des vents venus de zones à haute pression qui rencontrent des zones à basse pression, pour finir dans la mer d’Arabie. L’enjeu est donc, grâce aux technologies spatiales, d’attaquer ces tempêtes dès leur naissance pour les neutraliser.

Pour affronter cette menace régionale commune qu’est le désert, il faut le faire reverdir et le rendre hospitalier, ce qui nécessite de l’eau en abondance. Askary a donc défini les sources d’eau éventuellement disponibles : les hydrologies de surface et souterraine et le dessalement de l’eau de mer. « A terme, l’enjeu est de permettre au cycle hydrologique naturel d’acquérir un rythme de vie qui lui soit propre. »

L’hydrologie de surface

Askary a présenté de nombreux projets dans ce domaine, dont notamment :

  • le canal Sibaral, qui consiste à détourner les eaux de l’Ob et de l’Irtych, en Russie, vers la mer d’Aral, grâce à un barrage à leur confluence et à un canal de 2550 km, permettant à terme un transfert de 60 km³ d’eau ;
  • le « fleuve d’Iran », pour transformer les deux dépressions désertiques du pays en immenses lacs d’eau salée, dans l’espoir qu’ils modèrent le climat et, grâce à des unités de dessalement, fertiliser de nouvelles terres arables ;
  • le « pipeline de la paix », suggéré dans les années 1980 par le gouvernement turc dans le cadre du processus de paix israélo-arabe. Ignoré par les Etats-Unis et l’Europe, il prévoyait le transfert des eaux des fleuves Seyhan et Ceyhan par deux pipelines distincts : l’un à l’ouest, de 2700 km et passant par la Syrie, la Jordanie, Israël, la Palestine et l’Arabie saoudite, et l’autre à l’est, de 3900 km, traversant la Syrie, l’Irak, le Koweït et les autres Etats du Golfe. Ils pourraient transporter 16 millions de mètres cubes d’eau par jour.

L’hydrographie souterraine

Deux scientifiques sont connus pour ce qu’ils ont appelé le modèle de Grand bassin hydrographique : Robert A. Bisson, coauteur du modèle d’Exploration des grands bassins hydrographiques (Megawatershed Exploration) avec Farouk El-Baz, le scientifique américano-égyptien de la NASA qui avait cartographié la Lune pour y déterminer des sites d’atterrissage. Ils contredisent la conception traditionnelle des eaux souterraines, qui veut que la pluie tombe au sommet des montagnes, que sa majeure partie disparaisse par ruissellement et évaporation, tandis qu’une faible partie s’infiltre sous terre pour former ce que l’on appelle les aquifères horizontales.

Bisson et El-Baz estiment que la plupart des précipitations ont lieu dans les régions supérieures des montagnes, c’est-à-dire là où il nous est le plus difficile d’effectuer des mesures. De ce fait, 80 % des pluies ne seraient pas prises en compte. Celles-ci s’infiltreraient à travers un vaste réseau de fissures et de failles, créées lors de la formation des chaînes de montagnes, ainsi que par les activités tectoniques et sismiques continues, pour s’écouler verticalement plus profondément que les aquifères horizontales et sur de plus grandes distances, donnant naissance à des rivières souterraines pouvant s’étendre sur des dizaines de milliers de kilomètres carrés, dont nous ne tiendrions pas compte dans nos estimations. L’on pourrait donc trouver de l’eau souterraine en des endroits complètement inattendus. Pour leurs recherches, ils s’appuient sur la cartographie par télédétection, une technologie spatiale.

En 2006, pendant la crise du Darfour, Farouk El-Baz a visité le Soudan pour y présenter son étude. « Le conflit au Darfour, au départ, n’est pas d’ordre politique : il l’est devenu suite au rôle des Britanniques et de leurs supporters aux États-Unis. Il s’agissait initialement de différentes tribus, sédentaires et nomades, s’affrontant pour l’eau. » El-Baz a montré que sous le Darfour s’étend un grand lac, d’une taille proche de celle du lac Érié aux États-Unis, proposant d’y creuser immédiatement un millier de puits afin d’y pomper de l’eau pendant au moins cent ans.

Le dessalement de l’eau de mer

Il est désormais parfaitement clair pour les gouvernements du Golfe et d’autres régions arides dans le monde, que la meilleure solution pour garantir l’approvisionnement en eau pour les consommations domestique, urbaine et industrielle, consiste à dessaler l’eau de mer. D’importantes mesures ont été prises par les pays de la région pour construire des unités de dessalement conventionnelles à grande échelle, en investissant généreusement dans une combinaison de processus de dessalement d’eau et de production énergétique, recourant au gaz naturel et au pétrole.

Plus des deux tiers de la production mondiale d’eau potable par dessalement se font dans la région. L’Arabie saoudite, à elle seule, en produit 25 millions de mètres cubes par jour et les Émirats arabes unis environ 3 millions. Cependant, ces pays devront plus que doubler ces niveaux au cours de la prochaine décennie et les tripler la suivante.

Le problème majeur de ces prévisions tient au choix des énergies. L’Arabie saoudite utilise 1,5 millions de barils de pétrole par jour pour produire l’électricité et la chaleur requises pour le dessalement. Non seulement le coût, mais aussi la charge de la production physique et l’impact environnemental qu’impliquent le doublement et le triplement du dessalement sont à prendre sérieusement en compte. En outre, c’est une perte économique physique nette, dans le sens où ces matières premières, qui pourraient servir à la production pétrochimique au lieu d’être brûlées, ne peuvent rivaliser avec l’énergie nucléaire, en termes de densité de flux énergétique.

L’Institut Schiller avait proposé de coupler des unités de dessalement à des centrales nucléaires : on appelait cela les « nuplexes ». Cette idée n’est pas neuve : pendant la présidence d’Eisenhower, l’une des idées en vogue pour résoudre la crise israélo-arabe consistait à prêter assistance à l’Egypte, à Israël et aux autres pays en construisant de petites centrales nucléaires pour dessaler l’eau de mer. Car la plupart des guerres entre Israéliens et pays arabes n’ont pas pour origine des questions religieuses, mais des questions relatives au contrôle de l’eau. Gaza en est un exemple.

Selon un rapport de l’ONU publié en octobre, Gaza ne serait plus vivable en 2020, du fait de l’épuisement des aquifères. En effet, celles-ci, peu profondes et bordant la mer, sont contaminées par les eaux usées des habitants et le sel s’y répand. Les gens tombent malades en la buvant. Gaza a donc un besoin immédiat d’une unité de dessalement pour produire 500 millions de mètres cubes d’eau potable par jour.

Selon les études de l’Agence internationale à l’énergie atomique (AIEA), les réacteurs nucléaires de taille moyenne sont appropriés pour le dessalement, en cogénération d’électricité, utilisant la vapeur à basse pression de la turbine et l’alimentation en eau de mer du système de refroidissement final.

De nouvelles technologies sont étudiées dans ce domaine, montrant toutes qu’il faut atteindre des niveaux de température et de pression supérieurs pour qu’elles deviennent vraiment intéressantes, ce que l’on ne pourra réaliser efficacement qu’avec l’énergie nucléaire. Si les réacteurs nucléaires à haute température de quatrième génération se sont avérés depuis longtemps les plus efficaces, les efforts consentis pour investir dans ce domaine sont presque nuls.

La politique agricole

C’est une chose d’avoir de l’eau, c’en est une autre de savoir comment l’utiliser sous forme concentrée, afin d’en tirer le plus grand profit. Il faut s’orienter vers de nouvelles technologies agricoles et d’irrigation, y compris dans le domaine de la biogénétique, afin de développer de nouvelles formes de plantes, de graines et d’arbres résistant mieux au climat et davantage capables de retenir l’eau.

Une technique très efficace, utilisant l’effet de serre, est l’hydroponie. L’on n’a pas besoin de sol. Les graines sont semées dans des conteneurs en plastique ou en fibres, remplis d’une eau enrichie en minéraux dont la plante a besoin. C’est efficace, rapide et très productif. Un autre système est l’aéroponie : on maintient les graines en suspension et l’on arrose directement les racines avec de l’eau riche en minéraux. On économise ainsi beaucoup d’eau : l’eau qui s’évapore dans la serre est recyclée. Les statistiques démontrent l’efficacité de ces méthodes, comparées à la culture en plein air.

« Au Moyen-Orient, il est commun d’inonder le champ d’eau : les plantes prennent ce qu’elles peuvent, le reste va à Dieu. Ou à l’évaporation. Ces technologies modernes sont utilisées en Australie, en Israël et ailleurs, et nous devons absolument nous en doter. » L’on pourrait ainsi économiser autour de 90 % de l’eau habituellement utilisée.

Askary a conclu en revenant sur la volonté politique nécessaire pour mettre ces projets en oeuvre. « Ce cercle vicieux peut et doit être brisé. Cela requiert au préalable certaines conditions globales, bien sûr, notamment de rejeter le système géopolitique meurtrier actuel qui repose sur la devise « diviser pour mieux régner », et restructurer le système financier et bancaire. Ces deux éléments seront le signal donné à ces nations pour changer d’état d’esprit : passer de la destruction à la construction. »

Transcription

Ce que je vais présenter est l’autre face de ce qui a lieu aujourd’hui en Asie du Sud-Ouest, des guerres, notamment. Mais ce que je vais présenter sera accompli par ces mêmes nations qui sont aujourd’hui engagées dans des actes de guerre ou qui s’en défendent. Toutes ces nations sont des Etats-nations. Dans un ordre économique et politique mondial juste, toutes ces nations devront contribuer à ce développement. Donc il importe peu qu’il soit question de l’Arabie Saoudite, de l’Iran, du Qatar – toutes ces nations sont considérées comme des Etats-nations, qui doivent être souverains. Mais cela implique un changement politique.

L’autre chose est que nombre des projets que je vais présenter, et que Helga Zepp-LaRouche vient de présenter, sont déjà en cours de réalisation. Certains d’entre eux sont même achevés. Le problème est qu’il s’agit de projets locaux, auxquels il manque une dimension et une perspective globales. C’est donc ce que nous allons ajouter, avec nos plans. Il s’agit d’une mission planétaire.

Je travaille depuis des années sur les enjeux liés à l’Asie du Sud-Ouest, en tant que membre de cette organisation. Je suis confronté à un problème récurrent en parlant de nos programmes à la fois à des citoyens et à des dirigeants politiques d’Asie du Sud-Ouest. Ils disent : « Comment pouvez-vous débarquer avec un programme de développement et de projets économiques, à un moment où l’on nous tire dessus, au beau milieu d’une guerre ? » Le problème est que les excuses ne manquent pas. Ils n’ont pas fait ce que nous leur disions de faire, ou ce qu’ils auraient dû faire, bien avant qu’ils ne deviennent les cibles de tirs. Bien du temps a passé depuis que Lyndon LaRouche était à Bagdad en 1974. D’autres disent aussi : « Nous n’avons pas d’argent. » Et sitôt qu’ils ont fini de vous parler, ils passent le coin de la rue et achètent des armes pour des centaines de milliards de dollars, parce qu’ils se disent qu’ils sont en situation de guerre.

Mais quoi qu’il en soit, il y a une autre excuse, difficile à traiter : « Nous ne sommes pas en mesure de faire ces choses parce que la politique mondiale n’est pas de notre ressort, elle est décidée par les grandes puissances. » Et c’est vrai. Là, nous pouvons débattre. Et c’est ce que nous devons changer. Si nos amis américains destituent Obama, et si nos amis au Royaume-Uni mettent Tony Blair en prison, nous aurons alors un environnement bien plus sain pour débattre de ces enjeux, où les gens n’auront plus d’excuse parce que nous pourrons mettre un terme à toute la politique impériale actuelle.

Se concentrer sur les principes

Je veux me concentrer sur des questions de principe, parce que nous devons définir quelle est la raison d’être de l’existence de l’humanité. Elle ne consiste pas à rivaliser, comme le dit l’économie d’aujourd’hui, ni à assouvir sa vengeance vis-à-vis d’anciennes injustices politiques, ni à gagner des terres en la prenant aux autres.

L’existence humaine consiste à recourir à nos capacités créatrices pour changer l’univers qui nous entoure. Il n’est pas nécessaire d’être un physicien ou un astronaute pour cela. L’on peut être un agriculteur, un enseignant ou un métallurgiste qui éprouve de la joie à appliquer sa créativité et de la passion dans son domaine professionnel, rayonnant autour de lui.

Mais nous avons besoin de scientifiques, d’astrophysiciens. Je vais citer Krafft Ehricke, un pionnier de l’espace et penseur allemand. Il disait, dans son Impératif extraterrestre :

« Le fait que ni la technologie ni l’exploration au-delà de la Terre ne soient tout à fait nouvelles, mais des options de croissance naturelle exercées auparavant, met la réalité de notre temps en perspective. La réalité a deux points d’ancrage : 1) Que la molécule de chlorophylle et le cerveau humain sont les deux seules superpuissances sur cette planète. Elles doivent trouver un moyen de coexister et, n’étant pas intrinsèquement incompatibles, elles le peuvent. 2) Que l’humanité ne vit pas en tant que genre humain mais est « organisée » en tant qu’agrégat de quelque 140 nations. La plupart de ces nations s’efforcent d’améliorer leurs niveaux de vie ou leurs niveaux de protection sociale acquis et d’en faire bénéficier les plus démunis. Sans les moyens de croître – et, qu’on l’aime ou non, ces moyens comprennent les ressources matérielles et la capacité de les transformer – la stagnation générale créera un monde en peau de chagrin dans lequel la compétition pour la croissance deviendra une lutte sinistre pour la survie. »

Le but des gouvernements et des dirigeants politiques est donc de garantir l’environnement dans lequel les individus peuvent mettre en œuvre leur créativité. Notre tâche en tant que citoyens et militants politiques est de pousser ces politiciens et gouvernements élus pour qu’ils fassent leur travail. Nous pouvons aussi leur faire des suggestions utiles quant à ce qui doit être fait ; ce que nous allons faire ici.

La recherche et la compilation de ce qui va être présenté ont été réalisées par une équipe de l’EIR : Dean Andromidas, Ali Sharaf, Marcia Merry Baker et moi-même. Les animations ont été réalisées par Chance McGee, de l’équipe de recherche du Comité d’action politique de LaRouche.

Le point de vue à adopter pour agir contre cette folie géopolitique implique de conceptualiser ce qui devrait se passer dans cette région, à partir de la perspective la plus élevée qu’est la « Défense stratégique de la Terre » – un vrai développement de l’humanité et de l’univers. Nous allons considérer cela en termes de trois principes centraux :

  1. augmenter la base des ressources, en particulier l’eau, en organisant ce qui existe déjà à des niveaux supérieurs ;
  2. fabriquer de nouvelles ressources « naturelles » et augmenter notre puissance par unité de surface ;
  3. développer la plate-forme productive (agro-industrie, transport, avancées sociales, niveaux scientifique et technologique de la société, etc.).

Ces principes sont les mêmes que ceux du fameux « Plan Oasis » que LaRouche avait présenté à Bagdad en 1974 pour toute la région. Il s’agit des mêmes principes scientifiques et moraux.

Désert mondial

Helga Zepp-LaRouche a abordé cette question du désert mondial, qui couvre 30 millions de kilomètres carrés. Si vous comparez cette zone, qui est largement sous-peuplée, aux zones où vivent les 7 milliards d’êtres humains sur cette planète, vous voyez que le désert est presque plus étendu. Dans des pays comme l’Egypte, 80 millions d’habitants vivent sur seulement 4% des terres. Les 96% restants sont vides. Que dire alors des gens en Europe ou aux Etats-Unis qui parlent de « surpopulation » de la planète ? Nous sommes sous-peuplés ! Nous n’avons pas assez de gens sur Terre. Nous avons trop d’espace, mais cet espace est mort.

Figure 1.

Je voudrais tout de suite commencer par l’Asie du Sud-ouest, avec des images de tempêtes de sable et de poussière, qui sont fréquentes là-bas, en particulier dans la région du Golfe, mais aussi jusqu’en Iran et en Afghanistan, voire même jusqu’au Pakistan et en Inde.

Figure 2.

Si vous suivez les images satellites – c’est pour cela que nous avons besoin des technologies spatiales pour déterminer ce qui se passe sur Terre – pour voir d’où provient une tempête de sable, qui part du nord vers le sud, vous voyez que ce sont des vents, des jet-streams arctiques, qui viennent de zones à haute pression et rencontrent des zones de basse pression dans la région du Golfe et de la mer d’Arabie. Elles débutent dans la région frontalière entre l’Iran et la Syrie. Puis elles descendent et gagnent en force, et passent sur l’Irak.

Figure 3.

Ces images ont été prises par la NASA et l’Agence spatiale européenne (ESA). En mars 2011, une énorme tempête a eu lieu et a couvert toute la région. Des images sont disponibles sur internet, qui montrent ces tempêtes arrivant en zone urbaine. Ce sont des images de type apocalyptique. Je n’ai pas les images ici mais elles font des dizaines de mètres de haut. Les tempêtes de poussière peuvent même faire plusieurs kilomètres jusque dans l’espace et couvrent des pays entiers. Donc elles continuent dans le golfe Persique, au Qatar, en Arabie Saoudite.

Figure 4.

Ensuite elles tournent autour des hauteurs au centre de l’Arabie Saoudite et déversent le sable dans le Quart libre. Vous avez une chaîne de montagnes au Yémen et à Oman, qui fait que le Quart libre est la partie la plus sèche du désert mondial. Mais dans ce cas là, la tempête était si forte qu’elle a simplement continué sa route et passé les montagnes jusque dans le golfe d’Oman. Dans les images qui suivent, l’on peut voir qu’elle poursuit sa route en mer d’Arabie.

Figure 5.

S’attaquer au désert

C’est donc un problème récurrent. Avec l’aide de la technologie spatiale, nous pouvons voir où naissent ces tempêtes et déterminer où nous pouvons les attaquer.

L’enjeu pour le Qatar et l’Arabie Saoudite est donc de faire face à cela. Envoyer des djihadistes et des armes en Syrie et en Irak n’y fera rien. Il existe des plans pour cette région, mais comme je l’ai dit, ils ne sont que locaux – mais cela peut tout de même donner une idée. Si l’on considère la région d’où débutent les tempêtes, c’est ce que l’on appelle le Croissant fertile. A ne pas confondre avec le Croissant chiite !

Figure 6.

C’est ce dont parlait son Excellence l’ambassadeur. Cette zone est ainsi nommée pour des raisons évidentes. Des historiens estiment que l’agriculture a vu le jour à cet endroit. Cependant, elle n’est plus si fertile, à cause des guerres, des sanctions et du manque de développement.

Figure 7.

Mais pour faire face à cette situation, il y a ce que l’on appelle les ceintures vertes. Quelques exemples : c’est l’idée du ministère irakien de l’Agriculture. Quand j’étais enfant, nous lisions des choses à l’école sur ce programme national pour préserver le pays des tempêtes de sable et des déserts. C’est un plan impressionnant mais qui n’a jamais été réalisé. Je suis né en 1968 et nous avons tout de suite eu une guerre civile en 1973 ; puis la guerre Iran-Irak en 1980 ; puis la guerre du Golfe en 1990 ; puis des sanctions ; et aujourd’hui cela continue. Rien n’a avancé.

Mais des initiatives courageuses sont en cours pour en construire des tronçons. L’Irak et l’Iran ont signé un accord en 2010 pour investir environ 2,1 milliards de dollars dans des projets de création de ceintures vertes dans la partie sud-ouest de l’Irak, en particulier dans la région des villes religieuses de Karbala et de Nadjaf, qui sont fréquemment frappées par les tempêtes de sable et de poussière.

A Karbala, au Sud de Bagdad, un projet a été lancé en 2006 pour combattre la désertification de la région. Une ceinture verte a été établie sur un croissant de 27 km, en alignant des milliers de jeunes arbres, irrigués par une douzaine de puits. Cette zone est désormais la ligne de front de la bataille de Karbala contre les tempêtes de sable et la salinisation des sols, de plus en plus fréquentes. On y a planté 62 000 oliviers, 20 500 palmiers, 37 000 eucalyptus et 4200 tamariniers, tous ces arbres ayant été choisis tant pour la force de leurs racines que pour la nourriture et le bois qu’ils produiraient. Le ministère irakien de l’Agriculture a établi une agence spéciale pour faire face à la désertification.

Dans les dernières décennies, des ceintures vertes ont été prévues pour l’est de la Syrie, l’ouest de l’Irak et certaines parties de l’est de la Jordanie. Kilomètre par kilomètre, l’on peut repousser le désert et l’encercler, comme quand on essaye de coincer un tigre.

Figure 8. Programme de lutte contre le désert en Chine

Différentes sources d’eau

Il y a trois catégories de sources d’eau à considérer ici, qui sont déjà disponibles ou peuvent l’être à très court et à long terme. Bien sûr, l’enjeu devrait être de permettre au cycle hydrologique naturel d’acquérir un rythme de vie qui lui soit propre. Nous autres êtres humains, comme Socrate aurait aimé à l’entendre, sommes les sages-femmes de la Terre. La première est évidemment l’eau des fleuves et des lacs.

1) Canal Sibaral : l’un des plus grands projets de détournement des eaux en Eurasie, en plus de ce que les Chinois font, est le détournement des eaux de l’Ob et de l’Irtych – qui se jettent dans la mer arctique de Kara – vers la mer d’Aral, en créant un énorme réservoir grâce à un barrage là où se rencontrent les deux fleuves, à Khanty-Mansiïsk. L’eau sera ensuite transférée via un canal de 2550 km, puis élevée d’une altitude de 100 m par un système de six pompes jusque dans la mer d’Aral. Cela ponctionnerait environ 7% du débit des deux fleuves, en transférant, dans la première phase, 27 km³ d’eau le long de l’itinéraire Kourgan-Tourgaï-Irgiz, pour ensuite passer du côté est de la mer d’Aral, puis traverser le Syr-Daria au Kazakhstan, qui se jette dans la mer d’Aral par l’est, puis vers le sud pour traverser l’Amou-Daria en Ouzbékistan, qui lui aussi finit dans la mer d’Aral sur sa côte sud. Dans la seconde phase, l’on transférerait 60 km³ d’eau en augmentant le pompage et le gabarit du canal (100 m de largeur et 15 m de profondeur) pour permettre le passage de bateaux plus importants.

Figure 9.

2) Un autre projet majeur de détournement des eaux consiste à détourner l’eau de la Petchora, en Russie, vers la Volga, via l’affluent de celle-ci, la Kama. Ce projet remonte au plan de 1933 de « reconstruction de la Volga et de son bassin ». Le but était de transférer 19 km³ d’eau vers la Caspienne. Le projet non seulement augmenterait le débit mais régulerait les niveaux d’eau dans l’ensemble du bassin. Cela bénéficierait aux régions céréalières les plus productives de la Russie mais permettrait aussi, par des canaux, de transférer l’eau depuis le cours inférieur de la Volga le long des côtes ouest de la Caspienne jusqu’au Caucase.

Plutôt que de faire de la mer Caspienne le terminus du canal, un porteur d’eau sous la forme d’un grand pipeline souterrain de 4 ou 5 m de diamètre pourrait prendre de l’eau du canal Turkmène jusque dans les régions côtières de la Caspienne et et celles très fertiles en Iran, qui aujourd’hui souffrent d’une pénurie d’eau sévère. Ce pourrait être une option plus attractive que de dessaler de l’eau de la Caspienne, puisque la région au travers de laquelle passerait le porteur aurait ainsi accès à cette eau. Celle-ci pourrait être pompée pour franchir l’Elbourz et arriver dans le centre de l’Iran.

Elle pourrait même être acheminée dans les régions des Dasht-e Kavir et Dasht-e Lut, deux des régions désertiques les plus arides du monde.

Le gouvernement iranien a lancé en avril 2012 un projet pour établir une unité de dessalement d’une capacité de 200 millions de mètres cubes par jour sur la côte de la Caspienne, pour alimenter en eau, grâce à un pipeline de centaines de kilomètres, les villes des provinces de Semnan, Yazd et Kerman. Le projet comporte des unités hydroélectriques, des stations de pompage, des lignes de transmission d’électricité et des réservoirs. En inaugurant le projet, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a dit que ces dernières années les sécheresses se sont intensifiées, laissant craindre que les forêts puissent disparaître d’ici 50 ans. Il a aussi dit que l’Iran coopère avec le Tadjikistan sur la construction d’un canal/pipeline apportant de l’eau à la province iranienne du Khorassan en traversant tout l’Afghanistan par Hérat. Cela pourrait créer un important corridor de développement à partir d’Hérat, puisque l’Iran construit une ligne ferroviaire liant le réseau iranien au Tadjikistan qui passe par Kaboul.

Deux autres propositions de canaux existent pour relier la Caspienne à l’océan Indien. L’un d’eux concerne le nord-ouest de l’Iran. Selon des rapports de presse confus et non-confirmés, le gouvernement iranien veut bâtir une voie navigable entre la Caspienne et le golfe Persique. L’idée n’est pas neuve : elle avait été développée dans les années 1970 et une étude de faisabilité avait été réalisée sous la présidence de Hachemi Rafsandjani. Le projet rejoindrait la Sefid-Roud (la rivière Blanche), deuxième fleuve d’Iran, qui se jette dans la Caspienne. Il traverse l’Elbourz par la Trouée de Manjil. L’on présume que ce projet lierait ce fleuve au Karkheh puis au Karoun, qui se jette dans le Golfe et est la seule voie navigable du pays. Ces trois fleuves, qui sont les plus grands du pays, ont déjà été développés dans une certaine mesure, avec de grands barrages hydroélectriques, dont certains ne sont encore qu’à l’état de projet. Mais le niveau d’eau baisse ; il faut donc un apport en eau. Comme en Irak, où nous sommes en crise, parce que les barrages sur le Karoun, en Iran, retire l’eau qui va au Chott el-Arab, en Irak. Du coup l’eau de la mer du golfe s’avance sur les terres et touche Bassora.

L’autre projet relierait directement la Caspienne à l’océan Indien, par un canal nord-sud entre Türkmenba ?y, au bord de la Caspienne, en passant par la ville iranienne de Gorgan, en traversant le Dasht-e Kavir par la ville de Tabas et le Dasht-e Lut, pour terminer dans la Baie de Chabahar sur la côte de l’océan Indien.

3) Les projets Transaqua/lac Tchad : je ne les décrirai pas mais nous avons des documents de l’Institut Schiller là-dessus : pour traiter la crise humanitaire et environnementale grave dans cette région, le canal du Transaqua permettra de revitaliser le lac Tchad en prenant de l’eau du fleuve Congo. Toute cette région doit être développée, car les ressources qui s’y trouvent sont utilisées pour l’économie mondiale alors que la population locale doit abandonner ses terres pour laisser la place à des multinationales et des cartels de matières premières. C’est ce qui a lieu dans l’est du Congo, depuis quelques temps déjà.

Figure 10.

4) La proposition, généralement connue sous le nom de « fleuve d’Iran », vise à transformer les deux dépressions désertiques en immenses lacs d’eau salée, espérant qu’ils puissent modérer le climat. Cela affecterait même le climat plus à l’est, en Afghanistan. Grâce à des unités de dessalement placées en différents endroits au bord de ces lacs et des canaux les reliant, de nouvelles terres arables seraient remises en valeur et l’impact sur le climat et les niveaux de précipitations serait positif, à la fois pour l’est iranien et l’Afghanistan. Il s’agit non seulement de surmonter le fait que la mer Caspienne se situe à 28 m sous le niveau de la mer, mais aussi de franchir une chaîne montagneuse.

L’Iran et l’Afghanistan, deux pays qui ont été tragiquement affectés par plus de 200 ans de géopolitique et d’impérialisme britanniques, étaient ironiquement des parties clés des plans du président américain Franklin Roosevelt pour le monde de l’après Seconde guerre mondiale, libéré de l’impérialisme et fondé sur des Etats-nations souverains. Il choisit l’Iran et plus tard l’Afghanistan comme pays que les Etats-Unis entendaient aider à devenir des exemples : comment d’anciennes victimes du colonialisme pouvaient s’en sortir seules et prospérer selon des méthodes de développement utilisées aux Etats-Unis sous sa présidence.

Roosevelt envoya dans cette région son représentant personnel, le général Patrick J. Hurley, en 1943-44. Suivant l’instruction de Roosevelt, Hurley ébaucha la « Déclaration sur l’Iran » au cours de la Conférence de Téhéran à la fin 1943. La déclaration garantissait l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Iran, et promettait une assistance pour affronter la situation économique d’après-guerre. Roosevelt commanda à Hurley d’élaborer un programme de développement économique de l’Iran. Le rapport d’Hurley à Roosevelt présentait les clauses suivantes :

« L’inauguration en Iran du modèle américain de gouvernement autonome et de libre entreprise sera une assurance que les avancées du développement des ressources iraniennes seront substantiellement dirigées vers la construction d’écoles, d’hôpitaux, de systèmes sanitaires, de systèmes d’irrigation et d’amélioration de tous les équipements contribuant à la santé, au bonheur et au bien être général du peuple iranien. Ce plan de construction d’une nation pourrait être amélioré par notre expérience en Iran et devenir la référence pour les relations entre les Etats-Unis et toutes les nations qui souffrent aujourd’hui des maux des minorités avides, des monopoles, de l’agression et de l’impérialisme. »

5) Le projet d’Anatolie du Sud-est (GAP en Turc) : l’un des plus ambitieux projets d’infrastructure liée à l’eau dans la région est en construction depuis deux décennies.

Figure 11.

Le GAP prend modèle sur la célèbre Tennessee Valley Authority. Lancé il y a 20 ans, le projet comprend 22 barrages pour fournir 7,4 GW d’électricité, pour gérer l’eau, l’irrigation et le contrôle des crues. Il couvre 10% du territoire de la Turquie (75 000 km²) et 20% de ses terres arables, sur 9 provinces. Il s’agit aussi de développer les infrastructures requises pour l’intégration de toute la région : transport, énergie (la région représente 28% du potentiel hydraulique total de la Turquie), tunnels, canaux, etc. D’après les estimations du gouvernement turc, au terme des travaux, 1,7 millions d’hectares seront irrigués.

La pièce centrale du GAP est le barrage Atatürk (85 millions de mètres cubes de roche et de terre), l’un des plus grands au monde. Il a été achevé en 1992. Il mesure 169 m de haut et 1820 m de long. L’unité de production hydroélectrique a une capacité totale installée de 2400 MW. Le réservoir du barrage couvre une aire de 817 km² avec un volume d’eau de 49 km³, soit l’équivalent du flux annuel du Nil quand il entre en Egypte.

Figure 12. Barrage Atatürk, en Turquie

Les pipelines de la paix et Franklin Roosevelt

Figure 13.

L’un des projets intéressants suggérés dans les années 1980 par le gouvernement turc et qui avait réuni des soutiens au début du processus de paix israélo-arabe – et en 1993 avec les accords de paix d’Oslo, désormais pratiquement morts et enterrés sous les vagues de bombardements israéliens des territoires palestiniens –, était le pipeline turc de la paix. Ce projet, qui n’a jamais quitté la planche à dessin et qui a été ignoré par les Etats-Unis et l’Europe, envisageait le transfert d’eau de Turquie vers Israël, la Palestine, la Jordanie et les Etats du désert Arabe dans la région du Golfe.

Les eaux des fleuves Seyhan et Ceyhan, qui tout deux se jettent dans la Méditerranée à Adana, sans affecter le débit du Tigre et de l’Euphrate, seraient déplacées par deux pipelines distincts, l’un à l’ouest de la Péninsule arabe par la Syrie, la Jordanie, Israël, la Palestine et l’Arabie Saoudite, et l’autre à l’est, par la Syrie, l’Irak, le Koweït et les autres Etats du Golfe. Les pipelines, d’une longueur respectivement de 2700 et 3900 km, pourraient transporter 16 millions de mètres cubes d’eau par jour.

Ce projet est similaire au plan des « quatre quartiers » du gouvernement Roosevelt pour le Colorado. Le barrage Hoover, achevé en 1935, était à l’époque le plus grand au monde et avait permis à l’agriculture de prospérer jusqu’au sud de la Californie, y compris dans la vallée Impériale, grâce aux grandes quantités d’eau provenant du Colorado par le biais du All American Canal. La vallée Impériale faisait auparavant partie du Grand désert américain. C’est un bon exemple de ce qui peut être fait en Asie du Sud-ouest en termes de transferts d’eau.

Seconde source d’eau : le dessalement de l’eau de mer

Il est désormais parfaitement clair pour les gouvernements du Golfe et d’autres régions arides dans le monde que la meilleure solution pour garantir l’approvisionnement en eau pour les consommations domestique, urbaine et industrielle, est le dessalement de l’eau de mer. Evidemment, d’importantes mesures ont été prises par les pays de la région pour bâtir des unités de dessalement conventionnelles à grande échelle, en investissant lourdement dans une combinaison de processus de dessalement d’eau et de production énergétique, en recourant aux énergies fossiles comme le gaz naturel et le pétrole.

Plus des deux tiers de la production mondiale en eau potable issue du dessalement se font dans la région. L’Arabie Saoudite, à elle seule, produit 25 millions de mètres cubes par jour, que l’on estime représenter la moitié du total mondial. Les Émirats arabes unis (EAU) produisent environ 3 millions de mètres cubes par jour. Les unités de dessalement les plus importantes sont situées dans le Golfe, près des emplacements des industries pétrochimiques et de production de gaz et de pétrole, comme la ville industrielle de Jubail.

Cependant, ces pays devront plus que doubler ces niveaux au cours de la prochaine décennie et les tripler celle d’encore après. Des investissements massifs sont prévus dans ce domaine.

Un problème majeur de ces prévisions est que le dessalement repose sur des centrales thermiques au gaz et au pétrole. L’Arabie Saoudite utilise 1,5 millions de barils de pétrole par jour pour produire l’électricité et la chaleur requises pour le dessalement. Non seulement le coût, mais aussi la charge de la production physique et l’impact environnemental qu’impliquent le doublement et le triplement du dessalement sont à prendre sérieusement en compte. En outre, c’est une perte économique physique nette, dans le sens où une matière première valable sur le plan industriel, qui peut donner plusieurs fois sa valeur si elle est utilisée comme base à des produits pétrochimiques et autres plutôt que d’être brûlée, ne rivalise pas avec l’énergie nucléaire en termes de densité de flux énergétique.

L’une des solutions clés à ce problème est en effet le recours à l’énergie nucléaire. Lyndon LaRouche et Helga Zepp-LaRouche avaient proposé par rapport à cela de bâtir des unités de dessalement adjointes à des centrales nucléaires : l’on appelait cela les nuplexes. Cette idée n’était pas neuve. En effet, l’une des idées en vogue pendant la présidence d’Eisenhower pour résoudre la crise israélo-arabe consistait à fournir une assistance aux Egyptiens, aux Israéliens et aux autres pays en construisant de petites centrales nucléaires, pour dessaler l’eau de mer. Car la plupart des guerres entre Israéliens et pays arabes ne partent pas de questions religieuses mais de questions relatives au contrôle de l’eau. Quand vous voyez les Israéliens occuper un endroit, il faut vous demandez s’il n’y a pas un fleuve, un réservoir ou des eaux souterraines aux alentours. A Gaza, cela a été particulièrement violent.

Un rapport de l’ONU a été publié en octobre, qui dit que Gaza ne sera plus vivable en 2020. Il n’y a plus d’eau, les aquifères sont vidées. Les Israéliens ont pris ce qu’ils ont pu avant de partir. Mais aujourd’hui, les aquifères, peu profondes et bordant la mer à Gaza, sont contaminées. Le sel s’y répand. Les gens tombent malades en buvant l’eau. Donc Gaza a immédiatement besoin d’une unité de dessalement pour produire des millions de mètres cubes d’eau potable par jour.

J’ai rencontré à Stockholm le ministre palestinien responsable de l’eau lors d’une conférence sur l’eau et il disait que son équipe essayait d’obtenir 250 millions de dollars de la part des Européens ; en vain. Les Qataris et les Saoudiens ont promis 250 millions de dollars – la moitié du plan. La Banque centrale européenne et les gouvernements européens renflouent les banques par centaines de milliards de dollars ! Il y a un problème d’ordre moral.

Figure 14.

Il existe ce type de centrales nucléaires flottantes. Les Russes en ont produites pour l’Arctique. Elles sont de taille modeste et elles flottent, comme un bateau. Elles sont placées le long de la côte. On pourrait en produire très rapidement pour la région : d’Allemagne, de Suède ou de France, elles seraient placées sur le littoral pour dessaler l’eau de mer et produire de l’énergie à des fins industrielles ou autres dans la région.

Vous savez que les Emirats arabes unis ont un contrat avec les Coréens du Sud pour obtenir quatre unités nucléaires à 20 milliards de dollars.

Mais le gâchis est inimaginable. Abou Dabi, qui finance ce projet, paye à Dubaï 20 milliards de dollars par an pour payer la dette aux banques internationales qui ont financé le boom immobilier à Dubaï. Tout le miracle de Dubaï reposait sur le crédit. C’est l’une des plus grandes arnaques foncières de l’histoire. Il faut savoir qu’ils n’ont introduit aucune technologie moderne. Les gens voyagent à Dubaï, ils voient les bouchons automobiles au milieu des grandes tours, mais les routes ne sont pas efficaces pour s’ajuster à ce développement. Ils pensent désormais à des transports de masse ferroviaires, mais la tâche sera dure car il va falloir bouger des immeubles entiers.

Le fonds souverain des EAU détient 750 milliards de dollars. Que fait-il ? Il achète des clubs de football, en France, en Angleterre... C’est désormais connu. Tous les pays du Golfe ont leurs clubs de football.

Selon les études de l’Agence internationale à l’énergie atomique (AIEA), des réacteurs nucléaires de taille moyenne sont appropriés pour le dessalement, souvent en cogénération d’électricité utilisant la vapeur à basse pression de la turbine et l’alimentation en eau de mer chaude du système de refroidissement final.

Il y a bien sûr de nombreuses nouvelles technologies qui sont testées dans ce domaine, lesquelles pointent toutes dans la direction des températures et des pressions supérieures, que l’on ne pourra atteindre efficacement qu’avec l’énergie nucléaire. Les réacteurs nucléaires à haute température de quatrième génération se sont avérés depuis longtemps les plus efficaces, mais presque aucun effort n’est consenti pour investir dans ce domaine.

Pour le moment, l’Iran est le seul pays dans la région à avoir une grande centrale nucléaire civile en marche, en dehors d’Israël. La centrale de Bushehr, fruit de la coopération entre l’Iran et la Russie, a été inaugurée officiellement en septembre 2001 et a atteint toute sa capacité de production énergétique (1000 MW) en août 2012. Dans les conceptions initiales réalisées par l’entreprise allemande Siemens au début des années 1970, la construction d’une unité de dessalement d’eau de mer était incluse. Toutefois, dans la nouvelle conception russe, cette partie n’est pas encore accomplie. En dépit de tous types de menaces, de sanctions et de sabotages de la part des États-Unis, de la Grande Bretagne, d’Israël et de l’UE, l’Iran prévoit de bâtir plusieurs nouveaux réacteurs nucléaires, dans le but affiché d’augmenter sa production énergétique et de dessaler de l’eau de mer.

En décembre 2006, le Conseil de coopération du golfe (CCG) a annoncé qu’il avait commandé une étude sur l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. En 2007, les États-membres ont signé un accord avec l’AIEA pour coopérer sur une étude de faisabilité d’un programme régional d’énergie nucléaire et de dessalement.

Les EAU ont été les premiers des pays en question à lancer leur programme d’énergie nucléaire. L’Emirates Nuclear Energy Corporation (ENEC) a été établie en 2009 à Abou Dabi en tant que véhicule d’investissement en faveur du programme nucléaire. En décembre 2009, l’ENEC a annoncé qu’elle acceptait l’offre faite par la Korea Electric Power Corporation (Kepco) sud-coréenne pour bâtir quatre centrales nucléaires de 1400 MW dès 2020, pour un montant de 20 milliards de dollars US. (En passant, Abou Dabi a payé 25 milliards de dollars chaque année depuis 2009 à son confrère Dubaï pour rembourser la dette accumulée là-bas par la frénésie de l’immobilier.) La construction de la première des quatre centrales a été entamée en juillet 2012, et la quatrième et dernière sera achevée en 2020.

L’Arabie Saoudite, à son tour, a annoncé en avril 2010 l’établissement de la Cité Roi Abdallah pour l’énergie nucléaire et renouvelable, par décret royal du Roi Abdallah ben Abdelaziz al-Saoud. Peu après cela, le gouvernement saoudien a annoncé des plans pour bâtir 16 réacteurs nucléaires dès 2030.

Contrairement au programme nucléaire iranien, les programmes du CCG sont autorisés et approuvés par les États-Unis et l’Occident en général, pour des raisons géopolitiques évidentes.

Le Plan Oasis : justice aux Palestiniens et clef pour la paix

A partir de 1974, l’économiste Lyndon LaRouche a défendu l’idée que la seule possibilité d’une paix durable entre Palestiniens et Israéliens passerait par l’adoption d’un plan de développement économique qui démontrerait aux deux populations que les conditions de la paix et de la coopération profiteraient à eux-mêmes et à leur postérité. Au fil du temps, la proposition de LaRouche s’est faite connaître sous le nom de « Plan Oasis », en particulier du fait qu’elle s’axait sur le développement de nouvelles ressources en eau pour cette région désormais en manque. Ce plan a été le centre d’intenses activités militantes auprès de représentants israéliens, palestiniens et autres.

Commentant l’accord d’Oslo fraîchement signé entre le dirigeant palestinien Yasser Arafat et Yitzhak Rabin et Shimon Peres pour Israël, LaRouche a dit dans une interview le 8 septembre 1993 :

« L’urgence ici est que nous mettions immédiatement en place ces projets de développement économique, comme le canal de Gaza à la mer Morte, parce que si nous attendons de débattre de ces choses, les ennemis du progrès et de l’humanité, comme Kissinger et ses amis, réussiront, par le biais de personnes comme les copains de Sharon, à intervenir pour noyer cet accord dans le sang et le chaos. »

Et devinez ce qui s’est passé !

Figure 15. Le Plan Oasis pour l’Asie du Sud Ouest

C’est donc un exemple de comment l’on peut créer la paix et la stabilité par le développement économique. C’était tout à fait possible, mais l’Occident n’a pas soutenu. Nous avions à la fois les canaux de la mer Rouge à la mer Morte, située à environ 430 m sous le niveau de la mer, et où le niveau d’eau baisse du fait de l’utilisation des eaux du Jourdain et du Litani et autres par Israël, la Syrie et la Jordanie. L’idée était donc de remplir de nouveau la mer Morte grâce à l’eau de la Méditerranée. Puis de la mer Rouge, creuser un canal jusqu’à la mer Morte, en utilisant le dénivelé pour une production hydroélectrique, l’idée étant de dessaler l’eau avec cette énergie, pour le Jourdain. Ce projet est mort, du fait des déstabilisations politiques. Mais les études et les ingénieurs sont prêts.

Les Occidentaux ont à la place encouragé les Palestiniens à réaliser des projets de tourisme à Bethléem et Jérusalem, en vendant des souvenirs aux touristes américains et européens. Ils ont même utilisé le peu d’eau de certaines terres pour exporter des fleurs. « C’est comme ça que vous allez gagner de l’argent, que vous pourrez ensuite utiliser pour le développement économique. » La même chose est arrivée en Égypte, où l’on exporte des légumes et des fruits, mais où l’on doit importer les céréales et le riz des États-Unis pour nourrir les gens.

Donc, la politique menée par les États-Unis et l’Europe à l’égard d’Israël et de la Palestine a été un désastre. Ils ont simplement contribué à faire capoter le processus de paix. C’est quelque chose que notre organisation, avec LaRouche, a toujours combattu. C’est pour cela que je l’ai rejoint, en 1994.

Je travaillais à Oslo comme interprète, avec des enfants palestiniens et israéliens qui venaient au festival culturel à l’occasion de la signature de l’accord. Quand les militants de l’Institut Schiller sont venus à Oslo – c’était la première fois que je les rencontrais – ils m’ont parlé de développement économique : que sans développement économique il n’y aurait pas de paix. J’avais quitté l’Irak deux ans avant, après la terrible guerre, et j’avais encore cette idée en tête. Et là je rencontre quelqu’un qui me dit cela : on empêchera la guerre grâce au développement économique. Si l’on n’a pas de développement économique et de dépendance entre les nations pour leur survie, l’on ne peut pas établir la paix et la stabilité. C’est la raison pour laquelle j’ai rejoint cette organisation. Évidemment, il y a d’autres raisons, mais celle-ci est la principale : quelqu’un vient avec une nouvelle idée. Toutes les autres idées n’ont jamais fonctionné. Celle-ci le peut. L’Institut Schiller ne peut pas mettre en place ces projets, mais les politiciens et les nations le peuvent.

Donc, la deuxième source pour apporter de l’eau, disions-nous, c’est le dessalement de l’eau de mer. Il y a la mer partout autour : retirons-en le sel et nous aurons de l’eau potable. Nous avons donc besoin de beaucoup d’énergie. Nous pouvons utiliser le nucléaire, avec les nouvelles générations de réacteurs nucléaires, à haute température.

Une guerre contre les déserts : les aquifères

Ce que l’on appelle les aquifères constituent la troisième source d’eau. Il y a ce que l’on appelle les bassins hydrologiques. Parce que comme je le disais, l’on ne peut pas affronter ce problème au niveau local, l’on doit se donner une mission planétaire où l’on décide de s’attaquer au désert. On ne peut pas l’affronter avec des petits projets ici et là, comme le font les Nations Unies, la FAO et l’UE. L’on doit généraliser ces projets.

Le désert a certaines vulnérabilités. On peut couper le désert en régions, là où se trouvent ces différentes sources d’eau. Par exemple, nous avons le massif montagneux de l’Atlas, qui a un bassin hydrologique. Franklin Roosevelt discute des rivières souterraines, dans le livre écrit par son fils, et de pourquoi ce désert n’est pas développé. Il disait que la pluie tombe sur les montagnes, qu’elle passe sous terre et disparaît dans le sable. Donc si on détourne cette eau, on peut reverdir le désert. Déjà dans les années 1940, Roosevelt avait cette idée. Il l’avait accomplie aux États-Unis, en reverdissant la vallée Impériale et en bâtissant la Tennessee Valley Authority.

Ensuite, vous avez le centre de l’Afrique, où serait le projet Transaqua : nous pouvons utiliser les sources qui s’y trouvent, installer du nucléaire et attaquer le désert par le nord et l’ouest, mais ensuite nous pouvons couper le désert avec le canal du Transaqua. Cela diminuera l’effet cumulatif du désert : nous devons le couper en secteurs et nous attaquer à chaque secteur avec ces trois sources d’eau. Et l’eau souterraine, c’est la troisième source.

Ensuite, nous avons le Passage africain – notre ami Aman va en parler, je ne vais donc pas entrer dans les détails –, des usines de dessalement, des projets turcs, des projets de ceintures vertes, le projet de fleuve d’Iran, le projet de la mer d’Aral, les projets chinois...

Pour ces derniers, je ne vais pas non plus aller dans les détails car cela prendrait tout une journée. Ce qu’ils font est simplement incroyable. Ils réalisent le plus grand détournement d’eau de toute l’histoire de l’humanité.

Je disais donc que l’eau souterraine est la troisième source. Il se trouve que nous assistons à une vaste campagne de psychose menée par les organisations internationales : l’ONU, en particulier le Programme des Nations unies pour le développement, des organisations écologistes et autres ; même les gouvernements s’y mettent.

L’histoire à faire peur est que l’on ne peut plus pomper l’eau du sous-sol. D’abord parce qu’elle finira par être épuisée. Le sol deviendra alors salé et empoisonné. Donc l’on ne devrait pas pomper l’eau. Et dans le même temps, ils disent qu’il ne faut pas construire de centrales nucléaires. La campagne consiste à faire peur au point que les gens accepteront de mourir de soif au bord du puits.

Le modèle de Grand bassin hydrologique

Deux scientifiques sont connus pour ce qu’ils ont appelé le modèle de Grand bassin hydrologique : Robert A. Bisson, coauteur du modèle d’Exploration des grands bassins hydrologiques (Megawatershed Exploration) avec l’ancien scientifique américano-égyptien de la NASA Farouk El-Baz, qui a cartographié la Lune avant que l’on y pose le pied. Ce dernier en particulier est très renommé. C’est un vieil homme maintenant, mais il est toujours actif, il se rend en Égypte régulièrement et y présente ses projets, dont un nommé le « corridor de développement », consistant à bâtir une vallée du Nil parallèlement au Nil.

Figure 16.

Ils contredisent la conception traditionnelle de comment se comportent les eaux souterraines. L’on dit en général que la pluie tombe en altitude, au sommet des montagnes, puis que sa majeure partie s’écoule à la surface et ruisselle jusqu’à la mer ; qu’une bonne partie s’évapore ; qu’une partie bien moins importante rentre sous terre et est enfermée entre les couches sédimentaires et le soubassement rocheux. L’on aurait donc une aquifère horizontale, locale, avec une certaine quantité d’eau.

Le problème qui survient, surtout dans une région comme la nôtre en Asie du Sud-ouest, où il ne pleut pas tout le temps, c’est que cette eau piégée sera surexploitée. C’est vrai. L’on peut surexploiter cette eau : c’est le cas à Gaza. Mais cette théorie conventionnelle, qui est acceptée en termes météorologiques aux Nations Unies et dans d’autres organisations, exclut une autre idée que ces deux scientifiques présentent : ils appellent cela le modèle de grand bassin hydrologique.

Figure 17.

Cela s’appuie sur la cartographie par télédétection, une technologie spatiale. Pour aller à l’essentiel – car c’est une étude approfondie, par ailleurs disponible sur internet – ils disent que la plupart des précipitations ont lieu dans les régions les plus hautes des montagnes, là où il nous est difficile d’effectuer des mesures ; ce qui aurait pour conséquence que 80% des pluies ne seraient pas pris en compte.

Le processus de création des chaînes de montagnes en des périodes géologiques précédentes, les changements dans la croûte terrestre, ainsi que l’activité tectonique et sismique continue, qui en ont découlé, a engendré un grand réseau de fissures et de failles au sein de ces chaînes montagneuses, et que l’eau s’infiltre dans ces fissures et ces failles pour couler verticalement à des profondeurs supérieures aux aquifères horizontales et sur de plus grandes distances. Ce qui implique une grande quantité d’eau dont nous ne tenons pas compte. Ce dont parlent les gens en général, c’est de l’eau qui y est piégée, c’est-à-dire des aquifères horizontales.

Cela créé en conséquence des rivières souterraines qui s’étendent sur des centaines et parfois des milliers de kilomètres, recouvrant des surfaces de dizaines de milliers de kilomètres carrés. Ce qui veut dire que l’on peut trouver de l’eau souterraine en des endroits complètement inattendus. Ces deux scientifiques ont découvert d’énormes réservoirs d’eau. Par exemple, Farouk El-Baz, en 2006, a visité le Soudan au cours de la crise du Darfour pour y présenter son étude. Le conflit au Darfour, au départ, n’est pas d’ordre politique : il l’est devenu suite au rôle des Britanniques et de leurs supporters aux États-Unis. Il s’agissait initialement de différentes tribus, sédentaires et nomades, s’affrontant pour l’eau. Des gens ont eu la brillante idée d’en faire une crise politique.

El-Baz est allé voir le gouvernement soudanais et lui a dit : « Sous le Darfour se trouve un très grand lac, d’une taille proche de celle du lac Érié aux États-Unis. Vous pouvez donc immédiatement creuser 1000 puits pour pomper de l’eau pendant cent ans de plus. » Il a donné sa garantie. C’est là le moyen de bâtir la paix au Darfour, en y apportant de l’eau.

Dans leurs études, ils utilisent la télédétection pour localiser des rivières souterraines. Regardons la carte. El-Baz dit que sous le sable s’est formé un grand lac, qui existait avant l’âge glaciaire, ou en tout cas depuis au moins 5000 ans, qui alimentait les aquifères profondes.

La grande rivière artificielle, en Libye, est aussi un cas intéressant. Le problème est qu’ils pompent de l’eau pour l’emmener sur la côte, à Syrte notamment. Donc le désert n’est pas positivement affecté par l’eau pompée.

Vous pouvez voir une rivière sous l’Arabie Saoudite. Elle est ancienne et se trouvait en surface, auparavant. Mais aujourd’hui, ce sont des oasis qui bordent cette vieille rivière. C’est la route que prenaient les pèlerins à l’époque d’Hâroun al-Rachîd, ce qu’on appelle la route de Zoubaïda, du nom de l’épouse d’al-Rachîd qui, quand elle se rendait à la Mecque, séjournait dans ces oasis.

L’on peut donc trouver de l’eau en quantité très importante. Beaucoup d’efforts sont faits, dans l’espace et sous terre, pour trouver plus de pétrole ; bien peu pour de l’eau. Nous avons donc beaucoup d’eau sous le désert saoudien et sous les déserts africains.

Cette eau n’est pas seulement stockée là depuis des millions d’années – car l’on dit que cette eau est réservée aux générations futures et que l’on ne peut pas leur retirer l’eau de la bouche. Si c’est pour les générations futures, il faut bien qu’une génération commence ; nous sommes la génération future de ceux qui nous ont précédés. Mais cette idée folle est incrustée.

Nous devrions plutôt leur laisser un monde sans désert ! Dans le désert du Quart libre, ils ont commencé à forer des puits très profonds, de plusieurs kilomètres parfois, et ils trouvent de l’eau, qu’ils transfèrent à la ville de Jizan, au sud-ouest de l’Arabie Saoudite ; mais c’est une démarche très limitée.

La politique agricole

Maintenant que nous avons parlé des sources en eau, il nous faut aborder la politique agricole. C’est un enjeu crucial. Les gens parlent d’eau. Mais c’est comme lorsque l’on parle d’énergie : Lyndon LaRouche présente le concept de densité du flux d’énergie. C’est une chose d’avoir de l’énergie, c’en est une autre de savoir comment l’utiliser sous une forme concentrée permettant d’en tirer un effet plus grand. Cela vaut aussi pour l’eau. Nous pourrions parler de densité du flux d’eau, qui varierait selon l’usage que nous en ferions. Nous devons nous doter de nouvelles technologies agricoles et d’irrigation, y compris dans les domaines de la biogénétique pour développer de nouvelles formes de plantes, de graines, et d’arbres qui résisteront mieux et seront plus capables de conserver l’eau.

C’est une technique très efficace, basée sur l’effet de serre, que l’on appelle l’hydroponie. L’on n’a pas besoin de sol. L’on plante surtout des légumes – c’est aujourd’hui très à la mode aux Émirats arabes unis, mais aussi en Australie et dans d’autres pays. L’on plante les graines dans des conteneurs en plastique ou en fibres, dans de l’eau enrichie en minéraux dont la plante a besoin. C’est très efficace, rapide et très productif.

L’autre système s’appelle l’aéroponie. L’on maintient les graines en suspension, comme les Jardins suspendus, et l’on arrose directement les racines avec de l’eau riche en minéraux. De cette façon, on économise beaucoup d’eau ; et l’eau qui s’évapore, du fait de la serre, est recyclée. C’est donc très efficace. Des statistiques existent, qui comparent l’efficacité de ce mode à celui de la culture en plein air.

Au Moyen-Orient, il est commun d’inonder d’eau le champ : les plantes prennent ce qu’elles peuvent, le reste va à Dieu. Ou à l’évaporation. Ces technologies modernes sont utilisées en Australie, en Israël et ailleurs, et il nous faut absolument nous en doter. Les Israéliens ont été très efficaces en développant ces technologies à l’université de Néguev, où se trouvent des études énormes sur le sujet.

Figure 18. Illustration du concept de densité du flux d’eau : appliquer et concentrer l’eau là où elle est nécessaire

L’on peut ainsi économiser autour de 90% de l’eau utilisée habituellement. Voilà une utilisation de la science et de la technologie modernes qui permet d’accroître ce que l’on pourrait appeler la densité du flux d’eau, en concentrant l’eau seulement là où elle est nécessaire.

Prudence

Il y a cependant plusieurs mises en garde à formuler. L’une au sujet de la Turquie, d’abord. Les projets turcs impressionnants dont nous avons parlé posent un gros problème : le gouvernement turc, avec l’aide du ministère de l’Agriculture américain, transforme la région en l’une des plus importantes régions du monde en termes de production de coton.

Le coton est connu pour être un type de culture consommant beaucoup d’eau, de quatre à cinq fois plus que la culture du blé. La mer d’Aral a été asséchée à cause de la culture de coton qu’avaient développée les Soviétiques aux alentours. Par ailleurs, ils estiment que c’est une exportation bon marché, parce qu’ils disposent de l’eau. Mais c’est faux, car cette eau n’est pas bon marché. Si elle était utilisée correctement, cette eau pourrait avoir une plus grande valeur que le pétrole. C’est donc une grave erreur en termes de politique agricole.

Le cas de l’Arabie Saoudite est un bon exemple. Dans les années 1980 et 1990, elle a développé un impressionnant programme de production de blé, et d’un importateur net de blé, elle est devenue le sixième exportateur de blé du monde. Il y a des photos où l’on peut voir les champs circulaires, avec ces systèmes d’arrosage rotatifs au centre, qui sont très efficaces. Mais le climat est aride. Si l’on regarde autour, il n’y a aucun arbre ! Où sont les palmiers pour créer de l’ombre ? Où sont les oliviers ? Je pense que les Saoudiens devraient relire plus attentivement le Coran. C’est dans la Sourate de la caverne (versets 32 et 33) : « Donne-leur l’exemple de deux hommes : à l’un d’eux Nous avons assigné deux jardins de vignes que Nous avons entourés de palmiers et Nous avons mis entre les deux jardins des champs cultivés. Les deux jardins produisaient leur récolte sans jamais manquer. Et Nous avons fait jaillir entre eux un ruisseau. »

Figure 19.
Le Coran, Sourate de la caverne (versets 32 et 33) : « Donne-leur l’exemple de deux hommes : à l’un d’eux Nous avons assigné deux jardins de vignes que Nous avons entourés de palmiers et Nous avons mis entre les deux jardins des champs cultivés. Les deux jardins produisaient leur récolte sans jamais manquer. Et Nous avons fait jaillir entre eux un ruisseau. »

Telles sont les techniques agricoles dont parle le Coran. Car un olivier sous le Soleil, sans ombre, perd autour de 50% de sa productivité. Nous devons faire ce qui vient d’être décrit, sauf que nous allons y ajouter un élément de technique moderne : nous ne ferons pas des canaux ouverts, car l’eau s’évaporerait, mais des canaux couverts.

Voici des palmiers ; ceux-là sont très productifs. Vous avez tous mangé des dattes. Donc, non seulement ils protègent du Soleil et de la poussière, mais ils sont aussi une source d’alimentation et d’énergie pour la population.

Figure 20.

Donc, une fois qu’ils ont épuisé le sol, les Saoudiens sont allés ailleurs. Les tempêtes de sable et le désert n’ont donc guère été affectés par ces procédés.

Maintenant, ils ont arrêté ce projet, parce que c’était un échec total. Tout cela a presque entièrement été arrêté. Ils laissent la place à des compagnies étrangères, ils utilisent l’eau et exportent du blé. En réalité, ils n’ont pas de secteur agricole. Il n’y a pas d’agriculteurs qualifiés, pas d’infrastructure, pas de forêts, lesquelles pourraient changer le climat et garder l’eau et le sol. C’est donc une politique totalement folle, qui n’a rien engendré de bon, qui impressionnait beaucoup mais de façon trompeuse.

Je crois qu’en 10 ans ils ont utilisé 300 milliards de mètres cubes d’eau, soit six fois le débit annuel du Nil – et cela n’a eu aucun effet sur le désert au cours de cette période. Il est important que les nations produisent elles-mêmes leur propre nourriture, mais l’on ne fait pas cela de cette façon. Il faut combiner plusieurs cultures, permettant de créer un climat différent, de préserver l’eau et les sols.

Il en va de même pour l’industrie pétrochimique. Nous allons bientôt publier une étude là-dessus dans l’EIR. Des investissements massifs ont lieu dans le golfe vers l’industrie pétrochimique. Mais cette industrie est toute orientée vers l’exportation et ne transforme ni le territoire ni la société. Ce sont des compagnies étrangères qui viennent et exploitent le gaz à bas prix, produisent de l’aluminium, utilisent d’autres produits pétrochimiques, du fer, etc. mais en vue de l’exportation. Ce n’est pas utilisé en Arabie Saoudite. La population et l’économie physique du pays ne bénéficient guère de cette activité.

Transport

Je ne rentrerai pas dans les détails de la question des transports. Vous pouvez avoir une idée de l’intégration de cette région dans notre projet de Pont terrestre eurasiatique.

Figure 21.
« Les Saoudiens construisent des chemins de fer dans la région, mais ils ne vont nulle part. »

Même les Saoudiens construisent des chemins de fer dans la région, mais ils ne vont nulle part. Ils aboutissent à des mines, notamment de phosphate et de bauxite, au nord de l’Arabie Saoudite.

Mais si nous faisons ce que propose Helga Zepp-LaRouche et ce dont nous débattons ici, nous pouvons très vite relier cette région au reste du Pont terrestre eurasiatique ; car pour l’heure c’est un endroit isolé. D’énormes ports et aéroports existent dans la région du golfe, comme à Dubaï, qui a un port et un aéroport qui sont parmi les plus grands du monde. Mais là encore, ils ne transforment pas l’économie : il faut des systèmes de transport terrestre qui relient Dubaï à l’Asie, car l’Iran et l’Irak sont les plus gros importateurs de biens produits à Dubaï. Au lieu de jouer le jeu de la guerre, Dubaï ferait mieux d’intégrer son économie à celle de l’Iran.

Développement social

Je voudrais finir par la question du développement social, qui joue un rôle clé dans la situation de guerre actuelle, avec la montée du fondamentalisme et des guerres de religion.

En Asie du Sud-ouest, nous sommes confrontés à une situation très paradoxale quand on en vient à la corrélation entre les niveaux de vie, la culture, l’éducation et les ressources à la fois économiques et financières. Traditionnellement, ou depuis la crise du pétrole en 1973, ces pays sont divisés en deux catégories : les riches et les pauvres. Les riches sont les pays exportateurs de pétrole du golfe et le Conseil de coopération du golfe, avec de petites populations et beaucoup de richesses minières. Ils sont aussi membres du club impérial britannique, et sont câlinés par les États-Unis et l’Europe. Les autres ont moins de ressources de ce type et des populations plus importantes, mais ont reçu la malédiction des Britanniques et des Américains. Ces pays sont l’Iran, l’Irak, la Syrie, le Liban, l’Égypte et le peuple palestinien. La Jordanie est un pays qui oscille entre les deux camps.

Le paradoxe est que la population des pays en apparence plus pauvres ont des niveaux d’éducation et de qualification professionnelle bien supérieurs, ainsi qu’un sens d’identité historique plus profond. Les autres, les plus riches, vivent suivant une étrange dichotomie entre richesse matérielle d’une part, et traditions primitives et fondamentalisme religieux d’autre part, surtout dominés par la doctrine du Wahhabisme salafiste.

Les sociétés dites riches sont organisée sur le modèle du système oligarchique vénitien. Le progrès technologique y est le bienvenu, mais uniquement en tant qu’outil pragmatique de pouvoir, et non en tant qu’outil d’amélioration des conditions culturelles et physiques des citoyens ou de leurs missions futures. Une classe moyenne éduquée représente évidemment une menace politique pour les familles dirigeantes. La divergence entre la petite force de travail native du pays et les travailleurs étrangers tourne autour des 80 à 90% dans le secteur privé en Arabie Saoudite – des travailleurs invités, alors que les jeunes Saoudiens sont au chômage. Au lieu de travailler, ces derniers vont dans des écoles religieuses. Cet état des choses posera de sérieux problèmes dans un avenir proche, puisque le chômage de masse chez les natifs du pays et l’absence de droit du travail de base chez les travailleurs immigrés devient de plus en plus tangible, et que leurs salaires ne suivent pas la hausse réelle générale des prix. Il est évidemment difficile de faire dépendre une société d’esclaves domestiques.

Chez l’autre catégorie de nations, un grand nombre des meilleurs cerveaux et des personnes éduquées doivent fuir ces pays, en raison des nombreuses guerres, civiles ou non, de l’oppression politique et de l’invasion par des armées étrangères, comme en Irak, ou par des groupes terroristes soutenus de l’étranger, comme la Syrie aujourd’hui.

Les sanctions économiques contre l’Irak, l’Iran et la Syrie, et les politiques imposées à l’Égypte par le FMI et la Banque mondiale, ont mené à la dégradation des niveaux de vie, de l’infrastructure et des systèmes d’éducation.

Tout cela a ramené ces nations plusieurs décennies en arrière. Notre programme pour le développement de la région permettrait de sortir de ce déséquilibre de façon drastique, puisque à la fois la richesse financière, la richesse minérale, les ressources humaines et les compétences seraient dirigées vers une mission unifiée pour tous les pays. Les jeunes natifs seraient formés pour s’intégrer à la force de travail afin de bâtir leurs nations et reverdir le désert, de façon similaire au New Deal de Franklin Roosevelt et aux programmes qui y étaient associés, comme le Civilian Conservation Corps, qui a sorti les chômeurs de l’ère de la Dépression des rues pour les remobiliser autour de projets de reconstruction nationale, et a fait des États-Unis la plus grande puissance économique du monde.

Un terme serait mis à la fuite des cerveaux et des centaines de milliers de scientifiques et de personnes éduquées qui travaillent en exil ou sont expatriées en Europe ou aux États-Unis, seraient encouragés à revenir et à servir leurs nations.

Les richesses financière et minérale, ainsi que le crédit national généré dans les pays riches, peuvent à court terme être mis en correspondance avec les qualifications professionnelles des autres pays plus pauvres, pour lancer immédiatement le processus de construction. En constituant une autorité commune aux États en question dans la région, en tant qu’organe exécutif, qui prenne la responsabilité de mettre conjointement en œuvre ces propositions de projets, et d’émettre et de répartir le crédit nécessaire entre ces nations, plutôt que de faire passer des militants et des armes aux frontières des uns et des autres, ces projets peuvent être immédiatement démarrés.

Chaque nation travaillerait simultanément sur ses projets nationaux et les projets régionaux en unifiant les objectifs du développement de l’infrastructure, les niveaux techniques de construction mis en œuvre et la mise en marche des différents systèmes. Un système de crédit commun, établi par une banque de développement ou un fonds similaire à celui du Plan Marshall, peut répondre au défi de remplir le fossé entre les pays pauvres en pétrole et les pays pauvres en eau.

Des nations comme le Yémen et la Jordanie ne seront pas laissées à la merci du FMI ou des drones d’Obama. Une nation comme la Jordanie sera aidée dans la construction de sa première centrale nucléaire, pour utiliser ses ressources humaines et naturelles, comme le phosphate et l’uranium, et les améliorer, lui permettant de devenir une nation riche en une génération, plutôt que d’attendre désespérément les subventions des États-Unis, de l’UE, du FMI et la Banque mondiale.

Le partage du savoir-faire, par exemple, pour affronter les conditions désertiques et les enjeux agricoles, serait le plus efficacement réalisé par l’établissement d’un centre de recherche scientifique unifié, fonctionnant sous l’autorité exécutive commune.

Aujourd’hui, à cause des politiques anglo-saoudiennes et des États-Unis, qui attisent les conflits d’ordre religieux et les guerres dans toute la région jusqu’au Caucase et à la Chine, toute la région est menacée d’une guerre de Trente ans, selon des lignes religieuses ou sectaires, dont cette région pourrait bien ne jamais se remettre.

Il a fallu des centaines d’années pour guérir des blessures des Croisades et des invasions mongoles de l’État islamique de l’est et de son centre à Bagdad. Même après plusieurs centaines d’années, la région ressemblait à peine à ce qu’elle était au début de la période du Califat des Abbassides et de la Renaissance que Bagdad avait amorcée aux VIIIème et IXème siècles. Les Croisades et les invasions mongoles en 1258 ont été précédées/suivies par presque cent ans de lutte religieuse et sectaire du même type.

Ce cercle vicieux peut et doit être rompu. Cela requiert des préconditions globales, bien sûr, notamment de rejeter le système géopolitique meurtrier actuel qui repose sur la devise « diviser pour mieux régner » de l’Empire britannique, et de restructurer le système financier et bancaire. Ces deux éléments seront le signal donné à ces nations pour changer d’état d’esprit : passer de la destruction à la construction.

Je voudrais terminer par une citation de Wilhelm Kardorff, un allemand, qui a aussi une idée claire de ce à quoi correspond le véritable Système américain. Il disait :

D’après [Henry] Carey, la richesse nationale dépend de la domination remarquable et perfectionnée d’un peuple sur les pouvoirs gratuits de la nature.

Plus une nation est capable d’augmenter 1) la richesse et l’abondance de son sol et la diversité de ses produits naturels ; 2) la perfection d’outils par lesquels les pouvoirs de la nature sont faits pour servir l’homme (capital) ; 3) l’éducation intellectuelle de son peuple (travail humain) pour acquérir cette domination, plus grande sera son avance en richesse sur les autres nations.

C’est ce qui est nécessaire pour changer la société. Comme l’a dit Helga Zepp-LaRouche, c’est à vous de choisir entre ces deux visions du monde : vous pouvez choisir de mener la guerre pour l’Empire et pour détruire la civilisation, ou vous pouvez contribuer à rebâtir la civilisation. Merci.