Élections US : pour Londres, c’est Biden !

vendredi 30 octobre 2020

Chronique stratégique du 30 octobre 2020 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

A la veille d’élections présidentielles aux enjeux décisifs pour les États-Unis et pour le monde, le parti de la guerre anglo-américain, relégué en touche depuis quatre ans, se tient en embuscade derrière Joe Biden.

Dans le contexte de la nouvelle vague épidémique et terroriste, le danger est très grand d’une dérive autoritaire du système, et le résultat des élections américaines va constituer un point pivot déterminant. Des deux côtés de l’Atlantique, d’énormes pressions institutionnelles sont exercées pour imposer l’élection de Joe Biden, en le présentant médiatiquement comme le garant de la démocratie et de la liberté face à un Donald Trump populiste, raciste et ami des régimes autocratiques (Chine, Russie, etc.).

Ainsi, comme nous l’avons montré dans notre chronique du 23 octobre, faisant honneur à Orwell, tout est fait pour sauver le soldat Biden, quitte à s’asseoir sur la démocratie et la liberté, à l’image des efforts déployés la semaine dernière par Facebook et Twitter pour littéralement censurer la publication du New York Post révélant l’implication du candidat démocrate dans la corruption de son fils Hunter.

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Et les comptes que leurs patrons Marc Zuckerberg et Jack Dorsey ont du rendre devant la commission du Commerce, de la Science et du Transport du Sénat américain, le 28 octobre, étaient un prix à payer nécessaire pour étouffer un scandale susceptible de torpiller la campagne de Biden.

Les lapsus freudiens de Biden

Il faut dire que Joe Biden donne des sueurs froides à ses parrains. A quelques jours des élections, il semble de plus en plus à côté de ses pompes – pour ne pas dire qu’il souffre de toute évidence d’un pré-gâtisme incompatible pour la fonction qu’il tente de briguer, celle de commandant-en-chef de la plus grande puissance nucléaire de la planète. Le 25 octobre, il a commis une énorme bourde en se vantant dans une vidéo « d’avoir mis en place l’organisation de fraude électorale la plus vaste et la plus inclusive de l’Histoire », pensant sans doute dire le contraire. Le lendemain, lors d’un entretien télévisé, il a carrément été incapable de se souvenir du prénom de son rival Donald Trump, l’appelant « George » par deux fois.

Qu’à cela ne tienne ! Ce qu’on attend de Joe Biden, c’est de n’être qu’un parfait homme-caoutchouc du complexe militaro-financier, rôle qu’il a docilement joué tout au long de sa carrière politique. Comme le souligne le journal Le Monde, « les cerveaux du ’blob’ » – expression désignant la communauté d’ « experts » de la politique internationale – se chargeront de définir la politique étrangère américaine. « Ce ’blob’ espère prendre sa revanche après la présidence Trump, qui l’a tenu à la lisière du pouvoir », se réjouit le quotidien qui tire également profit à publier, en échange de quelques espèces sonnantes et trébuchantes, des suppléments du New York Times dans ses propres éditions.

Joe Biden au Chatham House, le Royal Institute for International Affairs, une annexe du Foreign Office, en oct 2018.

Amis de la paix, ressaisissez-vous ! Depuis quarante ans qu’il occupe les bancs du Sénat américain, Joe Biden a soutenu toutes les guerres. A commencer par celle des Malouines, un piège monté par le Royaume-Uni contre l’Argentine en 1982 pour étendre le rayon d’action de l’Otan. Biden, qui est un anglophile notoire, s’inscrit ainsi dans la tradition d’allégeance à l’Empire britannique, dignement représentée par Sir Henry Kissinger. L’ancien secrétaire d’État de Nixon avait en effet déclaré, lors d’un discours à Chatham House, en mai de cette même année 1982, avoir tenu le gouvernement britannique mieux informé sur ses politiques que son propre gouvernement. Comme l’avait dit un jour John Maynard Keynes : « American money and British brains »la puissance militaire et financière est certes américaine, mais le cerveau reste britannique !

Sauver le « divide and rule » britannique

Dans leur quasi-intégralité, les élites britanniques se sont rangées derrière le candidat démocrate – La Reine Elizabeth II, censée ne pas prendre de positions politiques, a exprimé son soutien pour Biden ; de même que Boris Johnson, qu’on présentait pourtant comme le Trump britannique. Les Britanniques savent qu’un second mandat de Trump mettrait en péril la « relation spéciale » entre les États-Unis et le Royaume-Uni, et surtout signifierait sans doute la fin de l’Otan.

La « Special Relationship » et l’Otan sont et ont toujours été deux instruments essentiels au maintien du « divide and rule » de l’Empire anglo-américain, c’est-à-dire le récit de la nouvelle guerre froide, où la Russie et la Chine sont présentées comme les ennemis du « monde libre » ; avec, en toile de fond, la nécessité de garantir le statut quo de l’ordre financier dominé par Wall Street et de la City de Londres, imposant le règne des banques centrales par-dessus les intérêts des peuples et des nations.

« Nous avons vu Trump être plutôt amical avec Poutine, être indulgent vis-à-vis des transgressions de la Russie, lui accordant toutes sortes d’excuses », explique par exemple Julie Norman, une experte en politique et relations internationales University College de Londres, sur Forces.net, un réseau médiatique lié à l’establishment militaire britannique. « Avec Biden, je pense que nous serions davantage dans une approche traditionnelle, d’opposition à ce qui est une agression et une ingérence russe ».

Le célèbre historien Niall Ferguson, qui fut un partisan enthousiaste des guerres de l’ère Bush-Blair, ne s’y trompe pas non plus. En matière de politique étrangère, Biden n’est certainement pas un mou. « Nous pourrions être surpris de voir à quel point Joe Biden est un faucon dans le bon type de crise », a-t-il affirmé lors d’une discussion le 6 octobre avec des experts de la Hoover Institution, ajoutant que son élection pourrait déboucher sur « le scénario d’une nouvelle guerre démocrate » .

La seule voie possible : l’entente Chine-Russie-États-Unis

Seul un accord entre les grandes puissances permettra de résoudre les différents conflits et problèmes du monde, continue de marteler Helga Zepp-LaRouche, présidente et fondatrice de l’Institut Schiller. L’élection de Biden ferme clairement la voie à cette possibilité, alors qu’un second mandat de Trump ouvrirait potentiellement une brèche. Car sa réélection lui donnerait, en principe, la légitimité suffisante pour écarter les éléments va-t-en-guerre de sa propre administration. Comme le rapporte le site Axios, Trump pourrait alors procéder au remplacement de Mark Esper, le belliqueux secrétaire à la Défense, de Gina Haspel, la directrice de la CIA qui protège les ennemis de Trump, sans oublier Christopher Wray, le directeur du FBI, qui freine des quatre fers pour protéger sa boutique. Il pourrait également se débarrasser de Pompeo, dont il s’est récemment plaint de son obstruction dans l’affaire des courriels d’Hillary Clinton. Notons simplement que Pompeo et Esper sont les deux principaux apôtres, au sein de l’administration américaine, de la croisade contre la Russie et la Chine.

L’inclination personnelle de Trump est d’améliorer les relations avec la Russie et avec la Chine, et c’est bien ce qui a motivé la tentative de coup d’État fomentée par l’establishment anglophile américain et les services de renseignement britanniques, avec la complicité de réseaux corrompus à la tête du FBI, de la CIA et du département de la Justice, à travers l’accusation du « Russiagate ».

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