Qui a dit que l’économie russe allait s’effondrer ?

samedi 21 mai 2022

L’explosion de la pauvreté, c’est plutôt en France qu’il va falloir y faire face.

Chronique stratégique du 18 mai 2022 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

Comme nous l’avions anticipé dans notre dossier Les sanctions contre la Russie, le hara-kiri européen, les sanctions occidentales contre la Russie font plus de mal à ceux qui les perpètrent – et en particulier aux pays européens, une fois de plus les dindons de la farce – qu’à l’économie russe elle-même, dont des signes récurrents indiquent qu’elle s’en sort plutôt bien.

Il est donc grand temps de sortir de la Nef des fous !

Le 26 février, soit deux jours après le lancement de l’opération militaire russe en Ukraine, l’Occident a adopté ce qu’il présente comme « les plus lourdes sanctions de l’histoire » contre la Russie, notamment « l’option financière nucléaire », consistant à exclure sept banques russes du système SWIFT.

Quelques semaines plus tard, le secrétaire d’État américain Antony Blinken annonçait que, grâce à ces sanctions, l’économie russe était « en ruine », tandis que son homologue britannique Liz Truss se vantait de leur « impact paralysant », avant d’appeler à « écraser la Russie » comme le prévoit l’étude de la RAND Corporation de 2019.

On a entendu des déclarations similaires de la part d’Ursula von der Leyen et de Josep Borrell, entre autres, qui prétendent que ces sanctions, bien que terriblement douloureuses pour les Européens, sont le seul moyen de priver la Russie des moyens de financer la guerre en Ukraine. De son côté, dans une intervention hystérique qui lui aurait bien valu un petit séjour en maison de repos, le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire avait alors scandé, tout en se voyant obligé de se rétracter sous la pression de l’Elysée, que nous allions « provoquer l’effondrement de l’économie russe ».

Tout permettait pourtant de penser, comme nous l’avions nous-mêmes affirmé, que ces sanctions reviendraient à nous faire « Hara-kiri », davantage qu’à malmener l’économie russe. Et deux mois plus tard, le moins que l’on puisse dire est que cela saute tragiquement aux yeux.

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Sanctions contre la Russie, le hara kiri européen

« On en est à renoncer aux fruits et légumes, à demander aux familles de se chauffer moins », déplorait le 13 mai sur France info Nadia Ziane, la directrice du département consommation à l’association Familles rurales, qui appelle le gouvernement à intervenir en urgence auprès des ménages les plus modestes, qui subissent de plein fouet l’inflation, en mettant en place un « chèque alimentaire ».

Qu’en est-il de l’économie russe ?

Évolution des devises par rapport au dollar : en jaune, ceux qui s’apprécient (le rouble, le réal brésilien et le péso mexicain, et en rose ceux qui se déprécient, dont l’euro...

De plus en plus de voix, moins idéologiquement et politiquement orientée, commencent à évoquer une réalité bien différente de celle évoquée par Blinken et consorts.

Le géant de Wall Street JP Morgan, par exemple, a récemment informé ses clients que l’économie russe se porte mieux que prévu. Alors que la banque avait précédemment prédit une chute de 35 % du PIB pour le deuxième trimestre, elle admet désormais que la récession « ne sera pas très profonde ».

L’Institut de la finance internationale, un groupe politique des élites bancaires mondiales, prévoit que la Russie affichera cette année un excédent record de 250 milliards de dollars de sa balance courante.

En effet, l’excédent commercial russe s’est considérablement accru au cours des trois premiers mois de 2022, principalement en raison de la hausse du prix du pétrole et du gaz sur les marchés mondiaux, elle-même due aux sanctions imposées par l’Occident. Mais cette balance commerciale positive s’explique en même temps par une baisse des importations, en particulier en provenance de pays européens et du Japon. Le gros problème ici, c’est qu’une grande partie des produits qui auraient été importés sont des biens d’équipement, comme des machines-outils, des composants industriels, des pièces automobiles, de l’électronique, etc. Ces produits sont, bien entendu, importants pour l’ensemble de l’économie réelle et doivent être compensés soit par une augmentation de la production nationale, soit par des importations en provenance d’autres pays.

Une analyse des experts de l’Executive Intelligence Review (EIR) note que la Russie a pu compenser certains des effets négatifs du manque d’importations en pratiquant un contrôle rigoureux des capitaux et des changes, en orientant les crédits de l’État vers les secteurs agricole et industriel pour stimuler la production et, surtout, en coopérant avec la Chine, et dans une moindre mesure avec l’Inde et d’autres nations, pour poser les bases d’un autre système commercial.

À cet égard, l’économiste Sergei Glaziev, actuel ministre en charge de l’Union économique eurasienne (UEEA), avance des propositions intéressantes pour un nouveau système monétaire et de crédit, en commençant par l’Eurasie et la Chine.

On notera par ailleurs que le secteur agricole est prometteur, ce qui est une très bonne nouvelle pour le monde entier. Les experts estiment désormais que les récoltes de céréales de cette année atteindront un « record historique » de 130 millions de tonnes, dont 87 millions de tonnes de blé. Le dernier pic de récolte de blé (85 millions de tonnes) remonte à deux ans. En 2020/21, la Russie représentait à elle seule 20 % des exportations annuelles de blé.

Face à cette réalité, les dirigeants occidentaux doivent revenir rapidement à la raison, avant que le retour du bâton soit impossible à stopper. Cela vaudrait mieux pour tout le monde.

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