En mentant à la Russie, François Hollande et Merkel ont trahi les valeurs occidentales

vendredi 6 janvier 2023

Chronique stratégique du 6 janvier 2023 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

Suite aux aveux du 7 décembre d’Angela Merkel, l’ancien président français François Hollande, qui était aux côtés de la chancelière allemande lors des négociations pour les accords de Minsk en 2014-2015, a également admis que les accords n’étaient pas destinés à garantir la paix mais à permettre au régime de Kiev de « gagner du temps ».

Hollande a fait ses remarques lors une interview avec Theo Prouvost, le correspondant français du Kyiv Independent, publiée le 28 décembre. L’interview en elle-même est un tissu de mensonges complotistes du début à la fin, dans lequel tout se résumerait à « l’agression » russe, débutée en Crimée en 2014, sous l’impulsion du méchant dictateur Poutine – comme si le coup d’État néonazi de 2014 à Kiev n’avait jamais eu lieu, l’expansion de l’Otan n’avait jamais été un problème, et les efforts de diplomatie déployés par la Russie depuis des années n’avaient aucun sens.

Une rupture s’est produite avec le retour de Vladimir Poutine au Kremlin en 2012, a affirmé l’ancien président. Il rêvait de recréer l’Union soviétique. Poutine a adopté une posture agressive et a attendu de voir quelle serait la réaction de l’Occident. Il a été provocateur et agressif. L’adversaire principal s’appelait (désormais) les États-Unis.

L’objectif de Poutine lors des discussions marathon du 11 février 2015 à Minsk « était de repousser le cessez-le-feu le plus tard possible pour obtenir les plus grands gains territoriaux possibles, a encore affirmé Hollande. Il voulait aussi plus d’autonomie pour les régions (dites) russophones, qui, dans son esprit, pourraient un jour préparer leur annexion ». Les populations locales apprécieront le « dites » russophones...

Prouvost cite ensuite Merkel dans son interview du 7 décembre dans Die Zeit : « Il était évident que le conflit allait être gelé, que le problème n’était pas résolu, mais cela a juste donné un temps précieux à l’Ukraine ». Puis le correspondant du Kiyv Independant a demandé à l’ancien président français : « Pensez-vous aussi que les négociations de Minsk avaient pour but de retarder les avancées russes en Ukraine ? »

Oui, Angela Merkel a raison sur ce point, a répondu Hollande. Les accords de Minsk ont permis de stopper l’offensive russe pendant un certain temps. Ce qui était très important, c’était de savoir comment l’Occident allait utiliser ce répit pour empêcher toute nouvelle tentative russe.

A lire aussi

Guerre en Ukraine : les confessions d’Angela Merkel sur les accords de Minsk

Trahison de l’Otan

Réagissant aux propos de François Hollande lors de son discours du Nouvel An, Poutine a déclaré :

Pendant des années, les élites occidentales nous ont hypocritement assuré de leurs intentions pacifiques, notamment pour aider à résoudre le grave conflit du Donbass. Mais en réalité, elles ont encouragé les néonazis de toutes les manières possibles, qui ont continué à mener des actions militaires et ouvertement terroristes contre des civils pacifiques dans les républiques populaires du Donbass. (…) L’Occident nous a menti sur la paix tout en se préparant à l’agression, et aujourd’hui, ils n’hésitent plus à l’admettre ouvertement et à utiliser cyniquement l’Ukraine et son peuple comme un moyen d’affaiblir et de diviser la Russie.

De son côté, le sénateur russe Konstantin Kosachev, vice-président du Conseil de la Fédération de Russie, a affirmé que les remarques de l’ancienne chancelière allemande et de l’ancien président français selon lesquelles les accords de Minsk ont servi à gagner du temps pour que Kiev se prépare à la guerre sont une « trahison documentée ».

Les aveux de Merkel et de Hollande sont la preuve de la trahison. Le sud-est de l’Ukraine de l’époque a été trahi par l’Occident dès le début, malgré le flou verbal qui l’entoure, a-t-il écrit sur son canal Telegram le 31 décembre, comme le rapporte l’agence Tass. Le coût de cette trahison s’est traduit par des milliers de vies humaines au cours des huit dernières années de guerre civile en Ukraine.

Le député Leonid Slutsky, président de la commission des affaires étrangères de la Douma d’État russe, a accusé l’Occident de tromper systématiquement la Russie depuis la fin de la guerre froide afin de l’affaiblir géopolitiquement. « La Russie a été systématiquement trompée depuis la fin de la guerre froide. L’avancée de l’Otan vers l’Est, la série de révolutions dans les républiques post-soviétiques, la création d’une tête de pont anti-russe à partir de l’Ukraine, tout cela a été fait dans un seul but : affaiblir géopolitiquement notre pays. Le taux de change des promesses américaines et européennes n’est pas seulement tombé à zéro, il a touché le fond », a-t-il déclaré.

Les aveux de Merkel et de Hollande démontrent cyniquement que cette guerre ukrainienne n’a rien à voir avec une « agression russe non provoquée ». Au contraire, on pourrait même dire que Poutine, s’opposant aux plus radicaux en Russie, a en réalité fait preuve d’une certaine patience, attendant de se retrouver le dos au mur avant de réagir militairement, au moment où Kiev s’apprêtait à lancer une vaste offensive contre le Donbass.