A propos du pass sanitaire

Pensée, liberté, responsabilité

jeudi 15 juillet 2021

Ce que nous pensons de la « manip » liberticide du pass sanitaire.

Pro-masque ou anti-masque ? Complotiste ou progressiste ? Pro-Raoult ou anti Raoult ? Ecolo, nucléocrate ? Pro-Européen, nationaliste ? Démocrate, pro-chinois ? Etc.

Voilà le contexte biaisé dans lequel s’est inscrit le supposé « débat » sur le vaccin obligatoire et le pass sanitaire, bien avant l’allocution du président Macron. Voilà comment un débat qui aurait dû être rationnel sur la santé publique s’est transformé en injonction politique culpabilisatrice vis à vis de ceux qui sont victimes.

D’emblée, les personnes encore hésitantes à se faire vacciner ont été cataloguées d’« antivax » et de complotistes. Pire qu’un sophisme médiatique, nous assistons, à l’heure où plus que jamais la science et la pondération sont de mise, à de la manipulation… Une de plus dans le grand tumulte organisé et assourdissant de la pensée. Sans compter les méthodes aussi dignes de nudging qu’indignes de dirigeants d’un pays : infantilisation, culpabilisation, chantage, division ; enfin, stigmatisation des soignants, après les avoir épuisés à la tâche et dépouillés de tous moyens, y compris salariaux. Pourquoi eux n’auraient pas de raisons légitimes de s’interroger ? Qu’ils s’interrogent, eux : n’est ce pas cela qui devrait interroger nos dirigeants ?

Alors, que penser d’un pays « éclairé » – celui-là même qui vit naître Pasteur et la tradition des pasteuriens – en venant au chantage et à la coercition pour convaincre de se faire vacciner ? Ne doit-on pas y voir le même signe de déclin et d’impuissance que lorsqu’au lieu de faire le pari du dialogue et de la main tendue au niveau international, on brandit la sanction, la propagande et la menace militaire à la moindre suspicion ?

La punition et la restriction ont donc remplacé l’éducation, la pédagogie, la bienveillance. Un comble quand on voit que les valeurs aujourd’hui promues au sein de l’Education nationale sont précisément l’inverse !

Mais l’adhésion du sentiment était-elle possible à l’heure où la défiance envers le gouvernement n’a jamais été aussi forte ? A l’heure de la violence des réformes économiques et sociales (y compris celles annoncées dans l’allocution de M. Macron), à l’heure des coupures budgétaires partout, et encore et toujours dans le système de santé ? Alors qu’on a refusé, au début, de construire des hôpitaux de campagne, de tester, de proposer des masques, de fermer les frontières quand il en était encore temps ? Quand on a envoyé au front les soignants sans blouses ni gants ?

Comment susciter la confiance après avoir écarté les médecins de ville de la prise en charge des malades ? Prescrire, tâtonner empiriquement à la faveur de la connaissance médicale et de la réalité individuelle des patients fait pourtant partie de leur métier. Au lieu d’organiser une remontée des expériences de terrain et un dialogue entre chercheurs et praticiens pour faire évoluer les protocoles, au lieu de faire corps avec tous les personnels de soin, on a créé les conditions de leur division.

Le recours systématique à l’approche statistique « off shore » basée sur les essais randomisés, non seulement ne fait pas l’unanimité dans la communauté scientifique et médicale, mais n’est pas exempte de biais ou de zones d’ombres. Les scandales du « Lancetgate » ou du remdisivir en sont un caricatural et triste exemple. Le comble est que malgré les moyens déployés pour les essais, on en est resté à la doctrine du « restez chez vous et prenez un doliprane » (à ceci près qu’on a tout de même d’avantage sensibilisé sur la surveillance à domicile de la saturation en oxygène). Il est difficile de concevoir que l’absence de prise en charge précoce des malades n’ait pas contribué a accroître significativement le nombre de cas de réanimations et de décès.

A propos des vaccins

Deux choses :

  • La vaccination est l’une des plus belles avancées de l’humanité. A Solidarité et progrès nous nous sommes toujours battus pour la tradition pasteurienne et contre le refus irrationnel du progrès. Ainsi, même si elle comporte, comme toute chose, ses limites, la vaccination a contribué à éradiquer nombre de maladies et sauver des millions de vies. Le risque de la défiance actuelle – et de l’alimenter directement ou indirectement – est bien d’accroître le nombre de personnes opposées à la vaccination par principe ; c’est potentiellement un danger pour les générations actuelles et futures. L’urgence est de rétablir la confiance.
  • La vaccination est toujours un pari sur l’avenir, surtout quand l’urgence d’une pandémie nécessite de restreindre le temps de production et de tests. C’est là, et surtout au regard de ce type de vaccins nouveaux, qu’entre en jeu le balance bénéfice/risque.

Toutefois :

  • Le risque inverse serait de l’ériger au rang de solution toute faite, figée et imparable. Comme on l’a vu, bien qu’absolument décisifs, les vaccins ne sont pas les seuls outils dans l’arsenal de lutte contre une épidémie : prise en charge des patients, médicaments, tests, gestes barrières, prévention, prophylaxie, hygiène, sensibilisation, pédagogie, partage des connaissances, etc. Or très tôt elle a été brandie par nos politiques et les scientifiques médiatisés comme la seule solution, LA baguette magique.
  • Rappelons que la science s’applique sur du vivant. Si certains scientifiques appellent à revoir le calendrier vaccinal régulièrement, c’est que les maladies, nos interactions avec elles et l’avancement de nos connaissances évoluent. Dans le cas précis de la Covid-19, nous avons affaire à un virus à ARN, par nature instable et soumis aux variants. C’est un virus nouveau et il est un fait qu’on s’interroge encore sur ses origines et ses symptômes inhabituels (formes longues, perte de goût et d’odorat, hypoxie heureuse, comportement de la protéine spike, emballement immunitaire, etc.). Il nous met donc au défi. En même temps qu’il est une occasion d’extraordinaires découvertes, il appelait à ne pas se précipiter et à prendre le temps de faire le bon choix en matière de stratégie vaccinale.
  • Enfin, tout comme défendre le nucléaire n’est pas défendre les nucléocrates, défendre la vaccination ne signifie pas faire de l’angélisme. Marx évoquait en son temps la captation d’opportunité du capital. On doit lui donner raison en ajoutant, avec Rabelais, que science sans conscience n’est que ruine de l’âme. Solidarité et progrès et Jacques Cheminade ont dénoncé depuis 30 ans l’occupation financière – bien avant que certains ne découvrent aujourd’hui le problème des lobbies pharmaceutiques. Ainsi, quand la finance s’infiltre et impose sa loi de rentabilité immédiate à tous les secteurs, la santé devrait-elle y échapper ? Des scandales tels que le Mediator ou le sang contaminé sont en droit de susciter la méfiance. Pfizer, pour ne citer que lui, n’a-t-il pas déjà été épinglé par la justice et des clauses actuelles n’enjoignent-elles pas les pouvoirs publics de dédommager les laboratoires en cas de litige sur les effets secondaires ? Qu’elles qu’en soient les raisons, est-il complotiste de s’en offusquer ? Si le marché du vaccin n’est pas rentable en « temps normal », la pandémie le rend au contraire particulièrement juteux. Dans ce contexte, on doit s’indigner que la France ait laissé filer des occasions concernant les vaccins contre la Covid-19. Une réforme en profondeur du contrôle sur les conflits d’intérêts, sur le financement de la recherche et de l’industrie pharmaceutique, ainsi qu’un patriotisme économique dans le domaine, sont à l’évidence indispensables. 2022 devra être l’occasion d’un véritable débat sur le sujet.
  • Certes la thérapie génique et les récentes découvertes sur l’ADN et l’ARN messager ouvrent des perspectives extraordinaires pour le traitement de certaines maladies, dont le cancer. Toutefois elles n’en étaient encore jusqu’à présent qu’à l’état de recherche ou d’applications restreintes. On est donc on droit de s’interroger face à une mise sur le marché aussi rapide, sur une population générale et mondiale. Dans ce contexte, la vaccination apparaît potentiellement d’avantage comme une prise de risque que comme un pari sur l’avenir. Il est un fait que les clôtures des essais de phase 3 pour Moderna et Pfizer n’auront lieu qu’en octobre 2022 et en mai 2023. Il est un fait que les effets secondaires (myocardites, tromboses, décès, etc.), sont inédits tant par leur nature que par leur nombre. Ils auraient dû ou devraient attirer l’attention des autorités et des laboratoires sur les causes, comme le rôle de la protéine spike ou la nature de la réponse immunitaire, pour savoir si l’on doit continuer ou arrêter. Ils devraient faire l’objet d’une transparence accrue auprès des utilisateurs. En outre, nous n’avons pas pris le temps et le recul nécessaire pour mesurer les risques à long terme de ces nouveaux types de vaccin.
  • La notion de balance bénéfice/risque et de vaccination sur une population générale doit prendre en compte, et d’autant plus quand il s’agit de nouveaux types de vaccins, le fait que la grande majorité des morts du Covid à ce jour sont des personnes de plus de 65 ans.

Au-delà de toute polémique inutile et stupide, l’approche du docteur Raoult sur la question nous semble raisonnable. Notons au passage son engagement depuis un an avec ses équipes contre la Covid-19 et pour le partage des connaissances de la maladie, et ce en dépit des multiples frondes. Rappelons également que l’IHU de Marseille a été fondé sur l’exemple du volontarisme de la Chine en matière technique, scientifique et médicale de pointe. Son idée était de développer plusieurs centres « à la Vauban » de même nature en France, afin d’être à la pointe en terme de veille épidémiologique, de réponse sanitaire en cas d’épidémie, et de dialogue entre recherche et pratique médicale de terrain. Au regard de la situation actuelle, on ne peut que regretter amèrement que les autorités n’aient pas suivi de tels conseils.

Comme lui nous pensons a priori qu’il aurait été préférable – et qu’il est souhaitable pour la suite – de privilégier un vaccin dit « traditionnel » (à virus atténué ou désactivé, etc.) (à ne pas confondre avec l’adénovirus atténué comme AstraZeneca, Johnson&Johnson ou même Spoutnik V). D’une part car on en maîtrise d’avance la nature et le type d’effets secondaires – surtout quand dans une période d’urgence on doit accélérer certaines phases d’essai ; et d’autre part parce que face à un virus instable comme la Covid-19, il est a priori plus raisonnable de créer une réponse immunitaire plus « générique » qui ne cible pas uniquement un aspect du virus – la protéine spike – mais l’ensemble du virus, afin d’éviter la possibilité que celui-ci ne s’adapte en mutant. Le vaccin à virus atténué pourrait au besoin donner lieu, comme pour la grippe, à un mélange de plusieurs souches, et être ainsi réajustable en fonction des variants. Toujours selon M. Raoult, les chiffres sur le premier vaccin chinois à virus atténué émanant d’une étude chilienne (sur 17 millions de vaccinés contre 5 millions de non vaccinés), sont à ce titre intéressants : 65 % de protection contre toute infection, 87 % contre l’hospitalisation, 90 % contre la réanimation et 86 % contre les décès. Des chiffres qui semblent raisonnables, et plus proches des réalités de terrain observées pour Moderna et Pfizer que de leurs effets d’annonce initiaux.

Pass sanitaire, vaccination obligatoire, lois et « libertés »

Que cela passe ou ne passe pas, le pass sanitaire resserré (qui a pour but revendiqué d’ostraciser et de jeter à la vindicte populaire les non-vaccinés) est, avec la vaccination obligatoire des soignants, le marche-pied vers la vaccination obligatoire pour tous. Ce n’est qu’une question de temps.

Précisons toutefois que ces notions existent déjà, notamment pour se rendre dans les pays sous-développés encore fortement exposés à certaines maladies : le passeport vaccinal contre la fièvre jaune en est un exemple. La différence est qu’il ne concerne pas toute une population et se fonde sur une décision personnelle, en l’occurrence celle de voyager vers une destination risquée ; et qu’il concerne des vaccins éprouvés en terme d’efficacité et d’innocuité (de même pour les 11 vaccins obligatoires sur les nourrissons – même si on peut comprendre qu’un débat existe sur le sujet).

Cela étant dit, au regard de tout ce que nous avons dit précédemment et des problèmes que posent les vaccins actuellement disponibles, nous ne pouvons que nous opposer au pass sanitaire, dans les conditions où il est conçu et imposé à tous, et à la vaccination rendue de fait obligatoire par une « manip » indigne.

Non seulement ils sont un aveu de l’échec du gouvernement à convaincre et susciter l’adhésion des Français, mais ils auront précisément comme conséquence d’accroître cet échec ! D’autant qu’ils arrivent dans la continuité des différents dispositifs d’exception et de restriction des libertés mis en place depuis les attentats terroristes et les manifestations des Gilets jaunes. Notons également que le pass sanitaire entre, sous sa forme dématérialisée, en conjonction avec la préparation du Health Data Hub.

Les quelques premiers rétropédalages montrent que le gouvernement est sur le fil du rasoir : ces décisions entrent en contradiction avec plusieurs textes concernant les libertés et le rapport de l’individu à la santé. Citons-en deux :

  • Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, datant de 1966, qui stipule que « nul ne peut être soumis sans son consentement à une expérience médicale ou scientifique » (ce qui peut se justifier par la date de fin des essais de phase 3 pour plusieurs vaccins).
  • La loi Kouchner du 4 mars 2002, qui dit, dans son article 11-4 que « toute personne prend avec le professionnel de santé et compte tenu des informations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé. Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d’interrompre un traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d’accepter les soins indispensables. Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment ».

Aujourd’hui, les manifestants crient à la liberté perdue. Ceux qui ne manifestent pas sont désorientés ou soumis. Mais attention : il ne s’agit pas seulement de liberté de vivre et de circuler, de la « sûreté individuelle ». La liberté est aussi morale. Elle est aussi fondée sur la raison et la nécessité : être en mesure de discerner ce qui est vrai et nécessaire, pour soi mais aussi pour la collectivité. Cela suppose d’être en capacité de savoir et de penser. De cette capacité fondamentale, notre « démocratie » est en train de nous priver. Cela a commencé bien avant le pass sanitaire.

« Ce qui précisément le fait homme, c’est qu’il ne s’en tient pas à ce que la nature a fait de lui, c’est qu’il possède la faculté (...) de transformer l’œuvre de la nécessité en une œuvre de son libre choix (...) »

Friedrich Schiller, Lettres sur l’éducation esthétique de l’Homme.