Un krach avant Noël ? Vite, le Glass-Steagall !

vendredi 8 décembre 2017

Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne (BCE), qui assurait il y a deux semaines ne voir aucune bulle financière nulle part, devrait urgemment prendre un rendez-vous avec son ophtalmologue. Car, dans son dernier rapport trimestriel, la Banque des règlements internationaux (BRI), la « banque centrale des banques centrales », fait état d’une situation financière globale périlleuse. Les sommets atteints par les valeurs financières et les niveaux insoutenables d’endettements publics et privés rappellent la période ayant précédé la crise financière de 2008, malgré les efforts des banques centrales pour resserrer les crédits (source : CNBC).

Le directeur du département monétaire et économique de la BRI, Claudio Borio, a déclaré le 3 décembre lors d’une conférence de presse que « les vulnérabilités, qui se sont accumulées dans le monde entier pendant la période prolongée des taux d’intérêts exceptionnellement bas, persistent encore aujourd’hui. (...) De plus, » a-t-il ajouté, « les prises de risques exposent les établissements à des problèmes de bilans très importants. Le calme à court terme se fait au prix d’éventuelles turbulences à long terme. (…) C’est comme si le temps s’était arrêté, les acteurs des marchés financiers se dorlotant dans la lumière et la chaleur de leur ‘économie dorée’ ».

De son côté, le Guardian attire l’attention sur Neil Woodford, fondateur de Woodford Investment Management au Royaume-Uni, qui a récemment mis en garde contre le fait que les marchés boursiers mondiaux se trouvent actuellement dans une bulle, dont l’explosion sera plus grande et plus dévastatrice que certains des pires krachs boursiers de l’histoire. « Les voyants rouges sont tellement nombreux que je ne parviens plus à les compter », a-t-il déclaré.

Bombe à retardement

Le journal Les Echos a publié mercredi un article montrant que certaines des plus grandes banques du monde sont encore plus grosses qu’en 2006-2007. « Voilà au moins une espèce qui n’est pas en voie de disparition, dix ans après la chute de Lehman Brothers. Les éléphants de la finance, ces géants bancaires dits ‘systémiques’ – tant leur faillite provoquerait des problèmes en cascade dans l’ensemble de l’économie d’un pays ou d’une zone du globe – restent bien vivaces ».

Selon une récente étude menée par S&P Global Market Intelligence, les bilans de certaines banques ont même été jusqu’à quadrupler ! La banque américaine JP Morgan Chase, par exemple, est passée de 1350 milliards de dollars d’actifs en 2006 à 2560 milliards en 2017. En France, en dépit d’une période de tassement entre 2008 et 2014, les actifs de la BNP Paribas sont passés de 1640 milliards de dollars en 2006 à 2490 milliards en 2016. Soit dit en passant, il est remarquable que la plus forte progression de la BNP Paribas soit intervenue dans la période 2006-2008, c’est-à-dire en plein milieu de la crise financière... Le groupe Crédit agricole a de son côté gagné 400 milliards d’euros d’actifs en 11 ans. (lire à ce sujet notre article : Le bilan effroyable des banques françaises exige qu’on les coupe en deux)

Le problème est que, contrairement aux banques chinoises (dont Les Echos pointent également du doigt la forte croissance), ce gonflement des banques transatlantiques est complètement artificiel ; il n’aurait pas été possible sans l’assistanat des banques centrales, à travers les programmes de rachats d’actifs, les taux d’intérêts bas et l’« assouplissement quantitatif » (la BCE continue à injecter chaque mois 30 milliards d’euros dans le système bancaire). Tout le monde sait que cela ne pourra pas durer, et redoute le moment où cette politique arrivera à son terme. A travers son programme de rachats d’actifs, la BCE a ingéré une masse de « junk bunds » (titres pourris), et son bilan hypertrophié rappelle la grenouille de la fable, devenue plus grosse que le bœuf. En effet, le bilan de la BCE atteint aujourd’hui 4441 milliards d’euros, ce qui représente 41,16 % du PIB de l’UE !

Les solutions existent, et il ne tient qu’aux citoyens de s’en emparer. Ne faisons pas la même erreur que Jean-Luc Mélenchon qui, sur le plateau de l’Émission politique de France 2, a bien évoqué le fait qu’il allait y avoir « une nouvelle crise parce que la bulle financière va de nouveau exploser », mais rate l’occasion d’apporter les remèdes.

Notre mobilisation se poursuit auprès des députés et sénateurs, afin d’ouvrir un débat sur la si nécessaire séparation bancaire (Glass-Steagall) ; en ce moment-même, plusieurs centaines de citoyens vont au contact de leur élu pour le pousser à agir, avec en main notre proposition de loi de « moralisation de la vie bancaire ». Joignez-vous à eux !