G20 : le retour du « triangle stratégique » Russie-Inde-Chine

mercredi 5 décembre 2018

Pour toute personne possédant un minimum de discernement, il est clair que des forces tentent par tous les moyens d’empêcher qu’une issue positive soit trouvée à la crise mondiale. Quelques jours avant l’ouverture du G20 à Buenos Aires, en Argentine, le coup de sang du régime de Kiev en mer d’Azov – appuyé par les réseaux britanniques de propagande infiltrés dans les pays occidentaux – a provoqué l’annulation de la rencontre entre Vladimir Poutine et Donald Trump, qui devait avoir lieu dans la capitale argentine – le président ayant dû céder face aux pressions des néo-cons au sein même de son administration.

Comme l’a rappelé Poutine lors de sa conférence de presse en clôture du G20, l’initiative de cette rencontre avait été prise par les États-Unis ; à l’origine, elle devait se tenir le 11 novembre à Paris, et avait été annulée à la demande d’Emmanuel Macron, avant d’être de nouveau annulée à Buenos Aires.

Les deux présidents ont tout de même pu s’entretenir quelques instants, en particulier à propos de l’Ukraine. « J’ai brièvement répondu à ses questions sur l’incident en mer Noire. Trump a sa propre position sur ces questions. J’ai la mienne. Nous n’avons pas changé nos avis respectifs, mais au moins, je l’ai informé de notre vision de l’incident. Nous avons fourni [aux dirigeants étrangers] la chronologie des événements. Il est difficile de contrer cela ».

Lors de leur courte entrevue, Trump et Poutine se sont mis d’accord sur la nécessité d’organiser dès que possible un sommet en bonne et due forme, afin de discuter plus longuement des questions relevant de la stabilité stratégique, notamment la non-prolifération des armes de destruction massive.

Retour du format RIC – Russie, Inde, Chine

À la demande du président russe, le RIC s’est réuni en marge du G20. La dernière rencontre de ce trio de nations, dans un format conçu par feu le premier ministre russe Primakov sous le nom de « triangle stratégique », qui réuni les pays les plus peuplés et les plus vastes du monde, remonte à douze ans, et avait précédé les BRICS. Comme le note le communiqué officiel du gouvernement indien, les trois pays ont décidé d’organiser de telles rencontres trilatérales sur une base plus régulière, à chaque fois que l’occasion se présentera, notamment lors des différents sommets multilatéraux.

Les trois dirigeants ont évoqué l’impératif d’une coopération et d’une coordination entre leurs pays afin de faire face aux défis de la sécurité et du développement, et de promouvoir un système multilatéral, la démocratisation de l’ordre international, ainsi que la paix et la stabilité mondiales.

« Je souhaite rappeler que la Russie, l’Inde et la Chine entretiennent des relations amicales depuis plus d’un siècle, sur la base de principes de bon voisinage et de confiance mutuelle », a déclaré Vladimir Poutine, cité par l’agence russe TASS. « Il est important d’établir un travail conjoint sur les questions clés de l’agenda économique, y compris à travers le G20, afin de protéger ensemble les principes de compétition justes et équitables dans le commerce et la finance mondiale et de soutenir l’établissement d’un système de relations économiques qui soient les plus ouverts possibles et libérés des restrictions protectionnistes motivées politiquement ».

Vers un accord commercial entre les États-Unis et la Chine ?

La rencontre entre Trump et Xi Jinping, qui elle n’a pas été annulée, a été caractérisée de part et d’autre comme un grand succès. Selon la déclaration officielle de la Maison Blanche, « le président Trump a convenu que le 1er janvier 2019, il maintiendra les taux de 10 % les droits de douane sur les produits d’une valeur de 200 milliards de dollars et ne les augmentera pas à 25 % pour le moment. La Chine acceptera d’acheter aux États-Unis une quantité non encore définie, mais très importante, de produits agricoles, énergétiques, industriels et autres, afin de réduire le déséquilibre commercial entre nos deux pays. (...) Les deux parties ont convenu qu’elles s’efforceront de réaliser ce changement dans les 90 prochains jours. Si au terme de cette période, elles ne sont pas parvenues à s’entendre, les tarifs de 10 % seront portés à 25% ».

Il est intéressant de noter que le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin, dans une interview accordée à CNBC-TV, a déclaré que le président dirigerait personnellement les pourparlers commerciaux des 90 prochains jours avec la Chine, contredisant Peter Navarro, le conseiller commercial anti-chinois, qui a affirmé sur NPR que le représentant au Commerce Robert Lighthizer les dirigerait.

À son retour de Buenos Aires, le président américain n’a pas caché son optimisme à propos de sa rencontre avec Xi : « Les relations avec la Chine ont fait un GRAND pas en avant ! De très bonnes choses vont arriver », a-t-il tweeté.

Provoquant la stupeur chez les va-t-en guerre américains, Trump a affirmé : « Je suis certain qu’à l’avenir, le président Xi et moi-même, ainsi que le président russe Poutine, envisagerons ensemble la nécessité de mettre un coup d’arrêt significatif à ce qui est devenu une course aux armements majeure et incontrôlable. Les États-Unis ont dépensé 716 milliards de dollars cette année. C’est fou ! »

Autant pour la cabale associée au procureur spécial Robert Mueller – les réseaux néocons de l’Atlantic Council ou de l’opération britannique Intergrity Initiative – qui voudraient à tout prix faire de la Russie et de la Chine des ennemis absolus du « monde libre », et ramener l’administration Trump dans le droit chemin que Bush et Obama avaient docilement suivi en leur temps…

Toutefois, preuve qu’une lutte fait rage au sein de l’administration américaine, le secrétaire d’État Mike Pompeo, qui s’adressait le 4 décembre devant la George Marshall Foundation à Bruxelles, a virulemment attaqué la Chine et la Russie, les qualifiant de « mauvais acteurs » dans « l’ordre libéral international ».

De son côté, lors de son discours au sommet du G20, le président Xi Jinping, tout en mettant en garde sur le fait que les causes de la crise de 2008 n’ont toujours pas été traitées, a souligné que l’ensemble des pays de la planète forment progressivement « une communauté avec des intérêts partagés, des responsabilités partagées et un avenir partagé ».

« Aller de l’avant par une coopération gagnant-gagnant est le seul choix qui s’offre à nous, que ce soit dans les bons ou les mauvais moments, a-t-il ajouté. Cela est dicté par la loi de l’économie et s’inscrit dans l’évolution de l’histoire de l’humanité ».